Alice
- Alice ? Alice, réveille-toi.
La voix de Fabio, douce mais insistante, perça le voile épais du sommeil qui m'enveloppait. Je me sentais comme une noyée remontant lentement à la surface, mes paupières refusant de s'ouvrir complètement, trop lourdes, comme si elles portaient tout le poids de mes nuits blanches, de mes angoisses enfouies. Fabio, mon frère, se tenait au-dessus de moi, me secouant doucement l'épaule. Nous nous étions levés à l'aube pour attraper notre vol pour la Sicile, et je sentais déjà la fatigue accumulée m'alourdir les membres, comme un manteau de plomb.
Ces vacances étaient censées être une échappatoire, une bouffée d'air après la tempête qu'avait été ma relation avec Tobias.
Tobias... Ce nom, même murmuré dans le silence de mon esprit, avait le pouvoir de réveiller en moi un tourbillon d'émotions contradictoires. Il avait été tout pour moi. C'était lui qui me contrôlait, qui me façonnait à son image, jusqu'à ce que je ne reconnaisse plus la femme que j'étais devenue. Chaque tenue que je portais devait recevoir son approbation, chaque parole que je prononçais, chaque geste que je faisais étaient passés au crible de son jugement. Il ne se contentait pas de me rabaisser, il m'écrasait, et pourtant, je l'aimais. Ou du moins, je croyais l'aimer. L'amour a cette capacité effrayante à nous rendre aveugles aux souffrances que nous endurons. Même ses insultes, ses coups, je les avais supportés. Je m'accrochais à cet espoir insensé qu'il changerait, que l'homme doux et charmant que j'avais rencontré referait surface.
Mais il ne changea jamais. Au contraire, il s'en alla, me laissant seule dans un désert émotionnel aride. Quand il est parti, sans un mot, sans une explication, il m'a laissée en miettes, brisée comme une poupée de porcelaine jetée au sol.
Les premiers jours après son départ furent flous, comme si je me trouvais dans une réalité parallèle, une bulle de douleur où le temps s'étirait infiniment. Je ne pouvais plus sortir de chez moi. Le monde extérieur me semblait cruel, hostile, vide sans lui. Je passais mes journées à pleurer, à boire, à me perdre dans la drogue pour anesthésier la douleur qui me rongeait. Pendant quatre mois, je me suis laissée sombrer, incapable de trouver une issue, de m'accrocher à quelque chose de solide. C'était comme si tout ce que j'avais été avant lui s'était dissous dans l'acide de notre relation toxique.
Puis, un jour, Fabio est venu chez moi. Je ne l'avais pas vu entrer, trop occupée à m'effondrer sur mon canapé, une bouteille à moitié vide à la main. Je me souviens vaguement d'avoir entendu un fracas, puis il était là, dans mon salon, ses yeux brillants d'une colère froide que je ne lui connaissais pas. Il m'a secouée, littéralement, me sortant de la torpeur dans laquelle je me complaisais.
- Bouge ton cul, Alice, je t'emmène en vacances avec moi en Sicile, m'a-t-il lancé, sa voix tranchante comme une lame.
Ses mots résonnèrent dans ma tête, un écho qui me semblait à la fois lointain et proche. Je le regardai, mon esprit encore embrouillé par l'alcool et les résidus de drogue qui circulaient dans mon sang. Mais quelque chose dans sa voix, dans la manière dont il me parlait, m'a poussé à accepter. Peut-être que c'était le besoin désespéré de m'accrocher à une dernière chance, de fuir un passé devenu trop lourd à porter.
J'ai empaqueté quelques affaires, pris ce billet d'avion qu'il m'a tendu, et je l'ai suivi, comme une automate, mue par une volonté qui n'était plus vraiment la mienne.
- ALICE !
Le cri de mon frère me tira brusquement de mes pensées. Je sursautai, la tête encore alourdie par le sommeil et les souvenirs. Mes yeux s'ouvrirent enfin, et je pris conscience de l'environnement autour de moi. L'avion était silencieux, les autres passagers commençaient à se lever, récupérant leurs affaires dans les compartiments à bagages.

VOUS LISEZ
Le prix de la liberté
Roman d'amourAlice, une jeune femme, part en vacances avec son frère Fabio. Ils arrivèrent en Sicile, prêts à profiter du soleil italien, loin du tumulte quotidien. La chaleur douce de l'île et les paysages pittoresques promettaient un séjour idyllique. Cependan...