6 - Bavardages

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Le lendemain matin, Tristana s'était assise dans le couloir devant sa salle, et avait ouvert son manuel d'histoire. Elle était arrivée à l'heure d'ouverture du portail, soit une demi-heure avant le début des cours. Elle détestait être en retard, et elle avait tout particulièrement appréhendé l'absence de panneaux pour la guider. Finalement, la salle 202 n'était rien de plus que la deuxième salle du deuxième étage. Heureusement pour la lycéenne, elle ne s'était pas trompée de bâtiment.

De temps en temps, elle jetait un coup d'œil à sa montre, pour surveiller l'heure.

À 7h50, ses futurs camarades commencèrent à arriver. Ils se répartirent sur le sol le long du mur, certains scrollant sur leur téléphone, d'autres discutant avec passion du match de la veille, qui avait été remporté par Clovis.

À 7h55, le professeur arriva dans un cliquettement de clés, déverrouilla la porte, et la referma aussitôt derrière lui sans un regard pour ses élèves. Sympa.

À 7h59, Sophie fit apparition dans le couloir sans se presser, avec une veste colorée qui aurait pu servir de gilet de sécurité routière tant elle était tape-à-l'œil. Lorsqu'elle vit Tristana, son visage s'éclaira et elle agita la main pour la saluer.

— On est dans la même classe ! s'enthousiasma Sophie.

Tristana eut un sourire gêné, rangea son livre et se leva. Au même moment, la porte de la salle s'ouvrit. Les élèves se dirigèrent en piétinant vers l'entrée tout en continuant de bavarder. Lorsqu'elle passa devant le professeur, celui-ci l'interpella :

— Mademoiselle Thibert ?

— Oui ? s'enquit Tristana en s'immobilisant.

— Attendez avant de vous asseoir, Mme Martin m'a demandé de vous présenter à la classe.

Y a-t-il moment plus embarrassant que celui-ci ? Tristana se lamentait, tandis qu'elle faisait désormais face à trente paires d'yeux qui la fixaient avec curiosité. Le professeur semblait d'ailleurs prendre un malin plaisir à prolonger cet instant, puisqu'il s'était assis devant le vieil ordinateur et entreprenait de s'y connecter. Enfin, il se racla la gorge.

— Je vous présente Tristana, qui intègre dès aujourd'hui votre classe. Tristana, vous pouvez aller vous asseoir, conclut-il en désignant une table au dernier rang.

Tout ça pour ça ?! Et en plus, il lui avait donné une place loin du tableau. Coup du sort, c'était la chaise à côté de Sophie. Tristana l'aimait bien, mais elle redoutait ses bavardages. Elle se faufila entre les tables et rejoignit sa seule connaissance.

Bien sûr, Tristana avait eu raison de se méfier. À peine s'était-elle installée que le moulin à paroles s'était mis en route.

— Je déteste ce prof, chuchota-t-elle. Heureusement, c'est un remplaçant. Ça fait deux semaines que Mme Saint-Clair est en congé maladie. J'espère qu'elle n'a rien de grave. Elle était plutôt sévère, mais dans la bienveillance, tu vois ? On sentait qu'elle voulait nous voir progresser. Tu vois le mec au premier rang ? Il y est pas par choix bien sûr, c'est Mme Saint-Clair qui l'a placé là. Elle l'avait déjà l'année dernière. Il a redoublé. Bref, il m'a dit qu'au début de l'année, elle cherchait toujours à mettre la pression, mais en vrai...

Un redoublant ? s'alarma Tristana. C'est pas vrai, mais qu'est-ce que je fais dans cette classe ? Clovis était pourtant un bon lycée. Et en plus, elle avait pris spé maths ! Impossible qu'elle se retrouve avec d'aussi mauvais élèves.

— ... après, c'est pas sa faute, tu vois. Il a eu de gros problèmes de santé l'année dernière, et il a manqué six mois de cours. Mais comme il bavardait un peu quand il était là, Saint-Clair l'a dans le viseur, alors elle l'a mis devant son bureau. Comme ça, pas le choix, il doit écouter !

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