13 - Une routine bien rodée

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À cinq heures tapantes, le réveil de Tristana sonna. L'esprit encore embrumé, elle chercha son téléphone à tâtons et éteignit l'alarme qui lui agressait les tympans. Machinalement, comme un robot qui a déjà répété d'innombrables fois les mêmes gestes, l'adolescente s'extirpa de son lit et ouvrit la fenêtre. Même à travers les volets, elle sentit l'air glacé de la nuit lui mordre la peau.

Frissonnant de froid, elle ouvrit les battants puis entreprit de défaire ses draps afin d'aérer son lit. Sans plus s'attarder dans sa chambre, elle descendit les escaliers avec la lampe torche de son portable pour prendre son petit déjeuner. Sa journée venait de commencer.

Tous les matins, Tristana suivait la même routine, qu'elle ait cours ou non. Ce jour-là, c'était un dimanche, et la lycéenne entendait bien le rentabiliser. Après tout le temps qu'elle avait perdu la veille entre son rendez-vous avec César et sa traditionnelle soirée avec sa sœur, elle avait une montagne de travail à abattre.

Jusqu'à onze heures, elle enchaîna les exercices et autres devoirs à rendre pour la semaine. Véritable machine de guerre, elle ne s'interrompait que pour boire et aller aux toilettes. C'était le matin qu'elle était la plus efficace, aussi ne voulait-elle pas perdre une minute.

C'est près de cette heure-là qu'elle entendit sa sœur remuer dans la chambre d'à côté, et sortir peu de temps après en bâillant et en traînant des pieds. Parfois, Tristana l'enviait de pouvoir se prélasser ainsi. Mais ensuite, elle se rappelait les reproches des parents que ça impliquait, et elle se sentait alors transportée d'une énergie nouvelle.

À table, ça ne manqua pas.

— Tu as eu la note de ton contrôle d'histoire ?

Tristana glissa un regard discret vers sa sœur, qui trifouillait dans sa poêlée de légumes. Elle détestait les courgettes, qui s'amoncelaient sur le bord de son assiette.

— Pas encore, répondit-elle. Le prof n'a pas fini de corriger les copies, il nous les donnera au prochain cours.

— Et tu as d'autres évaluations, cette semaine ?

— Vendredi, oui..., souffla Amélia à contrecœur.

Le regard de leur père se durcit.

— Et tu as commencé à réviser ? l'interrogea-t-il d'un air ombrageux.

— C'est dans une semaine ! se défendit aussitôt l'adolescente.

Aïe. Mauvaise stratégie. D'expérience, Tristana savait que la réaction de sa sœur ne lui amènerait que des ennuis. Quitte à avouer sa faute, elle aurait mieux fait d'assurer qu'elle se mettrait à étudier dès la fin du repas, plutôt que de se braquer de la sorte.

— Ma chérie, mange tes légumes, intervint leur mère avec douceur.

Comme toujours, trop effacée pour défendre ses filles face à son mari, elle tentait de détourner la conversation. Bien sûr, ça ne fonctionnait jamais longtemps.

— Mais j'aime pas les courgettes, maman !

— Quoi ? s'étonna celle-ci. Tu adorais ça, quand tu étais petite.

Amélia roula des yeux, et Tristana retint difficilement un sourire amusé. Elle ne savait pas quelle maladie frappait leur mère, mais celle-ci était toujours persuadée de connaître les goûts des deux sœurs – à tort, évidemment. Les jeunes filles avaient parfois même l'impression qu'elle s'inventait des souvenirs.

— Peut-être, mais plus maintenant. On en discutait encore il y a deux semaines, soupira Amélia.

Un couvert bruyamment reposé sur la table vint interrompre la discussion. Le visage fermé, leur père déclara froidement :

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