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Après cette visite à l'hôpital, quelque chose en moi avait changé. Reprendre ma vie étudiante semblait
à la fois familier et étranger. Les cours, les travaux
de groupe, les discussions légères dans les couloirs... tout cela continuait comme si de rien n'était, mais moi, je portais un poids nouveau.

Je retrouvais souvent ma meilleure amie après
les cours. On allait boire un café, on parlait de tout
et de rien, comme avant. Je souriais, je riais même parfois, mais au fond de moi, il y avait toujours une petite voix qui me rappelait que pendant que je vivais ces moments simples, Chayil était là-bas, dans cette chambre d'hôpital, prisonnier de son corps malade.
Il m'avait touchée d'une façon que je n'aurais jamais imaginée.

Alors, j'ai commencé à intégrer mes visites à Chayil dans mon quotidien. Une ou deux fois par semaine, parfois plus. C'était devenu une sorte de rituel.
Je m'assurais d'apporter quelque chose pour égayer
un peu son environnement : un livre, un morceau
de musique qu'il aimait, ou simplement une conversation qui l'éloignait un peu de ses pensées sombres. Mais la vérité, c'est qu'il m'apportait autant,
sinon plus. Il y avait cette connexion étrange,
ce lien formé à travers la souffrance, la perte,
mais aussi l'espoir même s'il ne voulait pas
toujours l'admettre.

Entre les études, les sorties et ma routine,
ces moments avec Chayil étaient devenus un équilibre. J'avais l'impression que chaque battement de ce cœur en moi résonnait un peu plus fort
quand j'étais près de lui, comme s'il nous unissait,
lui, Hugo et moi. Ce n'était pas facile,
mais c'était nécessaire.

Tout allait bien entre nous jusqu'à ce fameux jour.

Chayil- Alors, comment ça va à l'extérieur, dans le monde des vivants? Les études, les sorties avec ta meilleure amie, tout ça?

Moi- Oui, ça va... Les cours sont intenses,
mais je m'en sors. Et j'ai revu Kayna hier, on est allées au ciné. Ça m'a fait du bien de me changer
les idées, de rire un peu.

se retournant brusquement, les sourcils froncés

Chayil- Te changer les idées, hein? Rire? Pendant que moi, je suis coincé ici à... à attendre de mourir?

Moi- Chayil, je... je ne voulais pas dire ça comme ça.
Je sais que tu souffres, mais...

Il me coupe, la voix pleine de colère

Chayil- Non, tu ne sais pas, Imani ! Tu n'as aucune idée de ce que ça fait d'être piégé dans ce corps malade, de regarder ta vie te filer entre les doigts. Pendant que tu profites de ta liberté, moi, je me bats juste pour respirer. Et toi, tu viens ici, tu me parles
de tes petites sorties, comme si ça allait m'aider !

Moi- Je ne viens pas ici pour te narguer, Chayil !
Je viens parce que je tiens à toi, parce que je veux être là pour toi. Je pensais que tu serais content que
je te parle de ma vie, que ça te changerait les idées, mais visiblement, j'ai tout faux.

Chayil- Oui, tu as tout faux. Ta vie parfaite,
tes sorties, tes études, tout ça, c'est un rappel cruel
de ce que je ne pourrai jamais avoir.
Chaque fois que tu me racontes ce que tu fais dehors, c'est comme si tu me plantais un couteau
dans le cœur. Tu n'as pas à vivre ça, toi !
Tu as maudit le bon cœur, et moi, je reste ici,
à attendre que mon propre corps me lâche.

Moi- Ce n'est pas ma faute, Chayil !
Oui, j'ai eu cette chance, mais ce n'est pas comme si
je l'avais demandée. Je ne te parle pas de ma vie pour te blesser, je le fais parce que je pensais que ça te ferait du bien de savoir que la vie continue, même dans toute cette douleur.

Chayil- Tu n'as pas à t'excuser, Imani. Mais ne viens pas me parler de ta vie parfaite. Ça me rend juste plus conscient du fait que moi, je n'en ai plus.
Alors, fais-moi une faveur : arrête de me rappeler
ce que j'ai perdu.

Moi- chaque fois que je viens ici, chaque fois que
je te vois dans cet état, ça me déchire. Mais je ne vais pas m'excuser de vivre ! Est-ce que tu m'en veux vraiment pour ça ?

Chayil- Peut-être que oui, Imani.
Parce que franchement, je n'ai pas besoin d'une autre personne pour me rappeler tout ce que je ne pourrai plus jamais avoir.

Moi- Très bien. Si c'est ce que tu veux... Mais sache une chose je ne suis pas ton ennemie. Je reviendrai quand tu seras prêt à me parler, pas à me blâmer pour des choses qui échappent à notre contrôle.

Chayil- Peut-être que je ne le serai jamais...

Mais qu'est ce que qui ne va pas avec ce mec ?
Je prends de mon temps je passe le voir et j'essaie de lui changer les idées du mieux que je peux j'exige pas de merci ni même une putain de reconnaissance.
J'exige juste de la gentillesse de passe un bon moment de pouvoir discuté avec lui et rire mais visiblement même ça il est pas capable il crache des horreurs à la figure mais je ne suis pas responsable de ce qu'il vie et de ce qu'il endure mais j'ai l'impression qu'il m'accuse et qu'il me tiens pour responsable de son État sans savoir qu'un jour moi aussi j'étais comme lui et que moi aussi j'ai vu énormément de moment de ma vie m'échapper.

Coupable d'avoir un nouveau cœur ?
Coupable de m'en sortir ?

Je n'en sais rien et puis il y a des risques que tout s'arrête on est jamais sûr de rien avec un cœur transplanté mais ça peut-être qu'il ne le sait pas.

Je suis rentrée chez moi ou m'attendais Kayna

Kayna- Alors, qu'est-ce qui se passe avec Chayil?
T'as l'air vraiment bouleversée depuis que t'es arrivé

Moi- soupire profondément, jouant nerveusement avec sa tasse* On s'est disputés... et je ne sais même pas si je devrais retourner le voir.

Kayna- Quoi? Pourquoi? Qu'est-ce qui s'est passé?

Moi-Il m'en veut. Il m'en veut de vivre ma vie normalement pendant qu'il est coincé à l'hôpital,
à souffrir. Il dit que chaque fois que je parle de ce que je fais dehors, c'est comme si je lui rappelais
ce qu'il ne pourra jamais avoir.

Kayna- Attends, il te reproche ça? Mais... c'est n'importe quoi ! Tu n'as rien fait de mal, Imani. Tu essaies juste d'être là pour lui, de le soutenir.

Moi- Je sais. Mais je peux aussi comprendre d'où vient sa colère. Il est tellement en colère contre sa situation, contre sa maladie. Et c'est moi qui prends tout, parce que je suis là. J'ai l'impression qu'il ne sait même plus comment parler sans attaquer.

Kayna- ce n'est pas une raison pour te traiter
comme ça. Tu n'es pas responsable de ce qui lui arrive. Il ne peut pas te reprocher d'avoir un cœur qui fonctionne, d'avoir... une vie à vivre.
Tu n'as pas à porter tout ça

Moi- Je sais, mais... c'est compliqué. C'est comme si chaque battement de mon cœur me rappelait que j'ai une partie de Hugo en moi, et que Chayil a perdu deux personnes, son meilleur ami et maintenant peut-être même... moi. Il m'a dit de ne plus revenir s'il devait continuer à entendre parler de ma vie. Je sais qu'il souffre, mais ça m'a vraiment fait mal.

Kayna- Tu ne peux pas te blâmer pour ça.
Il a le droit d'être en colère, bien sûr, mais tu n'es pas là pour être son punching-ball émotionnel.
S'il ne peut pas accepter que tu essaies de l'aider à ta manière, c'est lui qui a un problème, pas toi.

Moi- Tu as peut-être raison, mais ça me fait toujours mal. J'ai l'impression de lui faire du mal en étant simplement moi. Je veux vraiment être là pour lui, mais je ne sais plus comment.

Kayna- Parfois, être là pour quelqu'un, ça veut dire
lui laisser de l'espace. Peut-être qu'il a besoin de temps pour digérer tout ça. Tu ne peux pas le sauver, Imani. Mais tu peux être prête à l'écouter quand il sera prêt, sans te laisser démolir par sa colère.

Moi- Tu crois que je devrais attendre un peu avant
de retourner le voir?

Kayna- Je crois que tu devrais te protéger aussi. Donne-lui du temps. S'il tient vraiment à toi, il finira par comprendre que tu n'es pas responsable de tout ça, et que tu es là parce que tu le veux, pas parce que tu te sens obligée.

Moi- t'as raison. Je vais attendre, voir si les choses
se calment.

Kayna- Tu as le droit de vivre ta vie aussi
ne l'oublie pas

Le cœur d'un autre Où les histoires vivent. Découvrez maintenant