Les cœurs Serpentard - Tome 1

Chapitre 22 : Des étoiles et des cendres

Point de vue : Alex Berkshire

La nuit était tombée sur Poudlard, enveloppant le château dans un voile sombre et silencieux. La Tour d'Astronomie était mon refuge ce soir, un lieu éloigné des regards curieux, des rumeurs incessantes, et surtout, de mes propres pensées. J'avais toujours aimé cet endroit, haut perché, où l'on pouvait presque toucher les étoiles. Mais ce soir, même leur éclat me semblait lointain, inaccessible.

Je m'étais installée près du bord de la balustrade, une bouteille d'alcool volée dans la réserve de l'un des professeurs à la main, et un petit paquet de cigarettes enchantées à mes côtés. Je savais que ce n'était pas une solution, que l'alcool et la drogue ne faisaient que masquer temporairement la douleur. Mais ce soir, c'était tout ce que je voulais. Ne plus penser. Ne plus ressentir.

Le goût brûlant de l'alcool me réchauffait la gorge à chaque gorgée, me faisant presque oublier la tempête qui faisait rage à l'intérieur de moi. Tout semblait si confus. Théo, Matheo, les rumeurs que Pansy et Daphné avaient laissées derrière elles comme un poison, s'infiltrant dans mes pensées, me faisant douter de tout. D'eux, de moi.

Je portai une cigarette à mes lèvres, l'allumant d'un geste tremblant. La fumée épaisse emplit mes poumons, et pendant un instant, cela me calma. Mais ce calme était fragile, comme un château de cartes prêt à s'effondrer à la moindre brise.

— Tu sais que ce n'est pas toi, ça.

La voix, grave et familière, brisa le silence. Je sursautai légèrement, tournant la tête pour voir Matheo, adossé contre la porte de la tour, ses bras croisés. Il me fixait, son regard perçant, mais sans jugement. Juste une inquiétude que je ne voulais pas affronter.

Je soupirai, détournant les yeux vers le ciel, essayant d'ignorer le battement sourd dans ma poitrine.

— Qu'est-ce que tu fais ici, Matheo ? demandai-je, ma voix plus rauque que je ne l'aurais voulu.

Il s'approcha lentement, avec cette manière de se mouvoir, calculée mais nonchalante. C'était ce que j'avais toujours admiré chez lui : sa capacité à tout contrôler, même ses émotions. Mais ce soir, il n'était pas là pour jouer ce rôle. Ce soir, il était là pour moi. Et cela me dérangeait autant que cela me rassurait.

— Je te cherchais, répondit-il simplement, s'asseyant à côté de moi sur la balustrade. On m'a dit que tu avais pris un peu trop de distance avec la réalité, ajouta-t-il en désignant la bouteille d'alcool d'un mouvement de tête.

Je me contentai de hausser les épaules, portant une autre gorgée à mes lèvres.

— La réalité est trop... compliquée, murmurai-je.

Matheo ne répondit pas tout de suite. Il resta silencieux, me laissant le temps de m'effondrer à mon propre rythme. C'était une des raisons pour lesquelles nous étions si proches. Il ne me forçait jamais à parler. Il attendait. Patient. Comme s'il savait que tôt ou tard, je finirais par tout déballer.

Et il avait raison. Après quelques minutes de silence, je lâchai enfin un rire amer.

— Elles ont tout gâché, tu sais. Pansy et Daphné. Elles ont tout fait pour que je doute de Théo, pour que je doute de moi-même. Je ne sais plus quoi croire, Matheo. Et ça me tue.

Il hocha lentement la tête, sans surprise. Je savais qu'il comprenait exactement de quoi je parlais.

— J'ai entendu ce qu'elles ont fait, Alex, dit-il doucement. Ce qu'elles t'ont dit à propos de Théo... c'était un mensonge. Tout. Elles voulaient te blesser, te séparer de lui.

Je clignai des yeux, essayant d'assimiler ce qu'il venait de dire. Un mensonge. Je savais que Daphné et Pansy étaient capables de cruauté, mais une part de moi avait commencé à croire en leurs mensonges. Parce qu'il était plus facile de croire qu'on avait été trahi que de se confronter à ses propres peurs.

— Alors Théo... n'a jamais joué avec moi ? demandai-je, ma voix tremblante.

Matheo secoua la tête, me regardant droit dans les yeux.

— Non, Alex. Il tient vraiment à toi. Ce n'était pas un pari, ni un jeu. C'était réel. Il t'aime, et tout ce qu'elles t'ont raconté, c'était pour te briser. Parce qu'elles ne supportaient pas de te voir heureuse avec lui.

Je sentis une vague d'émotion monter en moi, mais je la repoussai, la noyant sous une nouvelle gorgée d'alcool. Je ne voulais pas pleurer, pas maintenant. Pas devant Matheo. Il avait déjà vu bien assez de mes faiblesses.

— Pourquoi moi ? murmurai-je, mes yeux fixés sur l'horizon. Pourquoi suis-je toujours celle qui se fait manipuler ? Qui tombe dans leurs pièges ?

Matheo se tourna vers moi, posant une main réconfortante sur mon épaule.

— Parce que tu es meilleure qu'eux, Alex. Ils voient ta lumière, et ça les rend jaloux. Ils ne savent pas comment gérer quelqu'un qui ne joue pas aux mêmes jeux qu'eux, alors ils te tirent vers le bas. Mais tu es plus forte que ça.

Je sentis mes yeux s'embuer à ses paroles, mais cette fois, je ne les repoussai pas. J'avais été forte si longtemps, ou du moins, j'avais essayé. Mais à cet instant, sous le ciel nocturne, avec Matheo à mes côtés, je me laissai aller. Les larmes coulèrent lentement, silencieusement, tandis que je réalisais à quel point j'avais été brisée par ces mensonges.

Matheo ne bougea pas, il ne dit rien de plus. Il resta là, à mes côtés, comme il l'avait toujours fait. Il n'avait pas besoin de parler pour me montrer qu'il serait toujours là pour moi. Peu importe les jeux, les manipulations, les trahisons. Il restait mon ami, mon meilleur ami, et ce lien était plus fort que tout.

— Tu ne dois pas tout affronter seule, continua-t-il doucement. Je suis là, et Théo est là aussi. Tu dois lui parler. Tu dois savoir la vérité, et je te promets que tu ne seras pas déçue.

Je hochai la tête, essuyant mes larmes d'un revers de main.

— Merci, Matheo, murmurais-je, reconnaissante de sa présence constante dans ma vie.

Il sourit légèrement, un sourire sincère, rare chez lui.

— C'est ce que font les amis, non ? répondit-il simplement.

Nous restâmes là, en silence, regardant les étoiles briller au-dessus de nous. La nuit était encore longue, et j'avais encore beaucoup de choses à régler. Mais à cet instant, je n'étais pas seule, et cela suffisait.

Je savais que demain serait différent. Demain, je confronterais Théo, je découvrirais la vérité. Mais ce soir, sous les étoiles, je pouvais enfin respirer.

Et je savais que, peu importe ce qui arriverait, Matheo serait toujours là pour moi.