Les premiers nuages

3 2 0
                                    

Léna et Hugo continuaient de se voir presque tous les jours, et chaque moment passé ensemble semblait renforcer leur lien. Pourtant, malgré cette harmonie apparente, quelque chose d'insidieux commençait à germer dans leur relation. Léna ne savait pas vraiment d'où venait cette sensation étrange qui la taraudait. Peut-être était-ce la rapidité avec laquelle leur histoire s'était développée. Peut-être qu'elle commençait à redouter les choses qu'ils évitaient de dire à haute voix.

Ce matin-là, ils s'étaient retrouvés dans leur café habituel. Hugo, silencieux, faisait défiler les photos sur son appareil, tandis que Léna fixait sa tasse de thé, perdue dans ses pensées. Depuis quelques jours, elle sentait Hugo plus distant. Rien de flagrant, mais des petits signes. Moins de messages spontanés, moins d'enthousiasme dans leurs conversations sur leurs projets de voyage. Léna se posait des questions.

— À quoi tu penses ? demanda-t-elle doucement, essayant de briser la glace.

Hugo leva les yeux, son expression était un peu fermée, comme s'il réfléchissait encore à quelque chose.

— Rien de spécial, répondit-il en haussant les épaules, un sourire forcé aux lèvres. J'ai juste un peu la tête ailleurs en ce moment.

Elle ne répondit pas tout de suite, mais son cœur se serra légèrement. Ce n'était pas la première fois qu'il lui faisait cette réponse évasive. Depuis quelques semaines, elle avait remarqué qu'il se renfermait parfois, devenait plus distant sans véritable raison apparente. Au début, elle n'y avait pas prêté attention, mais maintenant, cela la troublait.

— Hugo... Tu me dis toujours ça, mais tu as changé. Je veux dire... ces derniers temps, tu n'es plus vraiment le même. Est-ce que tout va bien ? demanda-t-elle finalement, essayant de paraître détachée alors qu'elle était tout sauf tranquille.

Il baissa la tête un instant avant de lui répondre, comme s'il cherchait ses mots.

— Oui, tout va bien, Léna. C'est juste... J'ai pas mal de trucs en tête avec mes photos et mes projets... C'est un peu stressant parfois.

Léna fronça les sourcils. Elle sentait qu'il ne lui disait pas tout. Il y avait quelque chose d'autre, quelque chose qu'il n'osait pas aborder.

— Tu sais que tu peux me parler, non ? Si quelque chose te tracasse, je suis là, dit-elle, sa voix douce, mais teintée d'inquiétude.

Hugo la regarda et hocha la tête, mais il ne répondit pas vraiment à son invitation. Un silence pesant s'installa entre eux, un silence inhabituel qui n'avait jamais eu sa place dans leur relation jusque-là.

Les jours passèrent, et cette distance imperceptible entre eux commença à se creuser davantage. Léna ne pouvait plus l'ignorer. Elle sentait son cœur lourd à chaque fois qu'ils se retrouvaient. Elle savait que tout n'était pas aussi parfait qu'avant, mais elle n'arrivait pas à comprendre pourquoi. Et puis, il y avait cette question qui revenait sans cesse dans son esprit : l'engagement.

Un soir, alors qu'ils dînaient chez elle, Léna décida de mettre les choses à plat. Elle avait besoin de réponses, de clarté. Ils parlaient de tout et de rien, comme ils avaient l'habitude de le faire, quand elle se lança.

— Hugo, est-ce qu'on peut parler de quelque chose d'important ? demanda-t-elle en posant doucement sa fourchette.

Il releva les yeux vers elle, surpris par le sérieux dans sa voix.

— Bien sûr, qu'est-ce qu'il y a ? répondit-il, un peu méfiant.

— Je me demandais... où on en est, nous deux. Je veux dire, ça fait quelques mois maintenant qu'on est ensemble, et... tu sais, on parle de voyager, de faire des choses ensemble, mais... qu'en est-il de nous, dans le futur ?

Hugo sembla pris de court par cette question. Il resta silencieux un moment, regardant son assiette avant de se frotter les mains nerveusement.

— Léna, je... Je ne sais pas, avoua-t-il finalement. Je ne pense pas autant à l'avenir que toi. Je vis un peu au jour le jour, tu le sais. Je t'aime, mais... je ne suis pas encore prêt à parler de tout ça. C'est encore trop tôt pour moi.

Les mots frappèrent Léna en plein cœur. Elle se mordit la lèvre, essayant de contenir sa déception. Elle s'attendait à une réponse plus rassurante, à une vision partagée de leur futur.

— Trop tôt ? répéta-t-elle, incrédule. Mais on parle de tout, Hugo. On parle de voyager ensemble, de nos rêves, et maintenant... tu me dis que c'est trop tôt pour penser à nous ? Comment ça peut être trop tôt après tout ce qu'on vit ?

Hugo se redressa, sentant la tension monter. Il n'aimait pas ce genre de conversation, et cela se voyait dans son regard.

— Je ne dis pas que je ne veux pas être avec toi, Léna, dit-il en se passant la main dans les cheveux. Je dis juste que je ne veux pas tout planifier maintenant. Tu vas trop vite, et ça me fait un peu peur.

Ces mots la frappèrent comme une gifle. Elle sentit la colère monter, une colère qu'elle ne s'attendait pas à ressentir. Elle ne comprenait pas pourquoi Hugo réagissait ainsi, pourquoi il semblait soudainement effrayé par l'idée de s'engager, alors qu'ils avaient déjà tant partagé.

— Alors je vais trop vite ? C'est ça que tu penses ? Que je te mets trop de pression ? lança-t-elle, la voix tremblante d'émotion.

— Léna, ce n'est pas ce que j'ai dit, soupira Hugo, visiblement exaspéré. Mais tu me demandes des choses que je ne suis pas encore prêt à envisager.

— Et moi, je suis censée faire quoi ? Attendre indéfiniment que tu sois prêt ? demanda-t-elle, la voix teintée de frustration. J'ai besoin de savoir où on va, Hugo. J'ai besoin de sentir que ce qu'on construit a un sens, que ce n'est pas juste une belle histoire qui va s'effondrer dès que tu te sentiras étouffé.

Hugo ne répondit pas tout de suite. Il se leva de table, se rapprochant de la fenêtre pour essayer de reprendre son calme. Léna, quant à elle, sentait les larmes monter. Elle ne voulait pas en arriver là, mais elle ne pouvait pas ignorer ce qu'elle ressentait.

— Je t'aime, Léna, dit Hugo d'une voix plus calme. Mais j'ai besoin de temps pour moi, pour comprendre où je vais, pour m'assurer que je ne me perds pas dans tout ça. C'est tout ce que je demande.

Léna baissa les yeux, le cœur lourd. Elle savait que Hugo n'était pas du genre à se précipiter, mais elle avait espéré qu'il serait plus certain de leurs projets. Elle avait besoin de cette sécurité, de cette assurance qu'ils allaient dans la même direction.

Un silence s'installa dans la pièce, chargé d'émotions. Puis, Hugo s'approcha doucement d'elle, posant sa main sur la sienne.

— Ne me quitte pas, murmura-t-il. Je ne veux pas te perdre à cause de ça. Je veux qu'on prenne notre temps, qu'on avance à notre rythme. Tu es tout pour moi, mais je veux qu'on soit sûrs de nous.

Léna leva les yeux vers lui, son regard plein de larmes. Elle savait que Hugo ne disait pas ça pour la blesser, mais parce qu'il était sincère. Et même si elle avait encore des doutes, elle sentait au fond d'elle qu'il l'aimait profondément.

Elle hocha doucement la tête, essayant de calmer son cœur battant.

— D'accord, souffla-t-elle. On prendra notre temps.

Hugo la prit dans ses bras, et elle se laissa aller contre lui, sentant la chaleur rassurante de son étreinte. Malgré les tensions, ils se réconciliaient toujours. Leur amour était réel, mais il allait falloir apprendre à naviguer à travers ces premiers nuages.

Échos d'un amour perdu Où les histoires vivent. Découvrez maintenant