La première apparition

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Le silence de la nuit enveloppait la chambre d'hôpital, seulement troublé par le bruit régulier des machines et la respiration profonde de Léna, endormie. La lumière de la lune filtrait à travers les rideaux, baignant la pièce d'une lueur pâle et fantomatique. Léna, épuisée par le poids de la douleur et des médicaments, s'était enfin endormie, fuyant la réalité dans ses rêves tourmentés.

Dans ce calme presque surnaturel, quelque chose changea.

Un léger frémissement, imperceptible au départ, ébranla l'air de la pièce. Comme un souffle venu d'ailleurs, une présence invisible mais palpable commençait à s'infiltrer, marquant la frontière entre le monde des vivants et un autre domaine. Lentement, une forme commença à se matérialiser au pied du lit de Léna, d'abord floue, comme une silhouette en train d'émerger de la brume.

C'était Hugo.

Il se tenait là, dans un état de confusion totale. Ses yeux parcouraient la pièce, comme s'il la voyait pour la première fois. Mais ce qui le déconcertait le plus, c'était lui-même. Il se sentait étrangement léger, comme s'il ne touchait pas réellement le sol, et pourtant, il était bien là, dans la chambre de Léna. Il baissa les yeux sur son corps... ou plutôt sur ce qu'il en restait. Son apparence était la même que dans ses souvenirs, mais il se sentait différent. Éthéré.

— Qu'est-ce qui se passe ? murmura-t-il, plus pour lui-même que pour quiconque d'autre.

Il avança d'un pas incertain vers le lit où Léna reposait, son cœur battant d'une manière étrange, comme un écho lointain. Il voulut tendre la main pour toucher son visage, la rassurer, lui dire qu'il était là, mais sa main traversa l'air, impalpable, comme une ombre.

— Léna ? Léna ! appela-t-il, sa voix tremblante, pleine d'une inquiétude mêlée d'incrédulité.

Aucune réaction. Elle ne bougea pas. Elle ne l'entendait pas. Hugo recula, le souffle court. Qu'est-ce qui se passait ?

Il tenta de crier plus fort, de lui hurler qu'il était là, mais sa voix, pourtant pleine de désespoir, semblait se dissiper dans l'air avant même de l'atteindre. Une vague de panique monta en lui. Il tourna la tête autour de lui, cherchant un indice, une réponse. Le reflet flou de sa silhouette dans une vitre lui confirma ce qu'il redoutait le plus : il n'était plus humain. Il n'était plus vivant.

Un flot de souvenirs déferla alors sur lui, comme une inondation brutale. L'accident. Le volant échappant à son contrôle, le bruit de la pluie battante, le hurlement des pneus, le choc métallique qui l'avait figé sur place. Puis... plus rien. Le noir total. Et maintenant, il se trouvait là, dans cette chambre, sous une forme qu'il ne comprenait pas.

Il recula encore, son dos éthéré traversant la porte sans résistance. Dans le couloir, tout semblait normal. Les infirmières passaient, des médecins discutaient à voix basse, des brancards roulaient silencieusement, et pourtant... personne ne semblait le voir. Il se sentait invisible, absent du monde qu'il connaissait, comme un spectateur silencieux d'une vie qui n'était plus la sienne.

Pourquoi suis-je encore ici ?

Hugo retourna auprès de Léna, impuissant. Il se pencha sur elle, observant son visage fatigué, marqué par les jours de chagrin et de souffrance. Son cœur se serra à la vue des larmes séchées sur ses joues, de la pâleur de sa peau. Il savait combien elle souffrait de sa perte. Il avait toujours su qu'elle était forte, mais cette épreuve la détruisait. Il se sentait coupable, coupable de ne pas pouvoir lui dire qu'il était là, qu'il veillait sur elle.

Il passa une main tremblante à quelques centimètres de son visage, sentant une vague de tristesse le submerger. S'il n'était plus vivant, pourquoi restait-il ici ? Pourquoi ne pouvait-il pas partir ?

Et c'est alors que la vérité le frappa, aussi glaciale qu'inattendue. Il n'était pas là par hasard. Il n'était pas simplement revenu pour dire adieu à Léna. Il avait quelque chose à accomplir. Un frisson parcourut son corps spectral. L'accident. Quelque chose dans cet accident ne collait pas. Il devait comprendre pourquoi. Pourquoi cette tragédie était arrivée, pourquoi lui était mort et pourquoi elle avait survécu.

C'était comme un puzzle que son esprit tentait de reconstituer, mais les pièces manquaient encore. Il savait qu'il ne pourrait pas partir tant qu'il n'aurait pas résolu ce mystère. Et tant qu'il ne l'aurait pas fait, Léna resterait dans cette douleur insupportable. Il ne pouvait pas la laisser ainsi.

Mais comment faire ? Comment découvrir la vérité lorsqu'il n'était plus qu'une ombre, invisible et muet pour ceux qu'il aimait ?

Un nouveau désespoir le prit. Il erra dans la chambre, traversant les objets comme s'ils n'étaient qu'illusion. Son monde se superposait au monde réel, et pourtant il en était exclu. Il essayait encore et encore de toucher, de parler, mais rien n'y faisait. C'était comme être emprisonné dans une cage invisible, avec seulement ses pensées comme compagnons.

Quelques jours passèrent ainsi, dans un tourbillon de frustration et de douleur. Chaque nuit, Hugo revenait auprès de Léna, la suivant dans ses déplacements dans l'hôpital, tentant désespérément de trouver un moyen de communiquer. Il la regardait souffrir en silence, serrant ses poings éthérés sans jamais pouvoir l'aider. Il la suivait même lorsqu'elle était seule dans sa chambre, parlant dans le vide, répétant sans cesse son nom, espérant qu'elle réagirait, qu'elle sentirait sa présence.

Mais rien.

Léna, de son côté, tentait de faire face à sa douleur. Elle parlait peu, seulement aux médecins ou à sa famille. Elle refusait de croire à la possibilité de continuer sans Hugo, son esprit emprisonné dans le passé, dans cet instant tragique où tout avait basculé. Chaque nuit, elle pleurait en silence, incapable de trouver le sommeil sans être assaillie par les souvenirs de leur vie ensemble, par l'absence insupportable de celui qu'elle aimait.

Hugo se tenait souvent près d'elle, la regardant avec une tristesse infinie, conscient qu'il ne pourrait jamais la consoler tant qu'il ne trouverait pas un moyen de lui parler. Et c'est à cet instant qu'il comprit.

Il ne pouvait pas simplement attendre.

Il devait trouver la vérité, comprendre ce qui s'était passé cette nuit-là. Il savait maintenant que la clé de son départ, de sa paix, résidait dans le mystère de cet accident. Pourquoi avait-il perdu le contrôle ? Pourquoi lui, et pas elle ? Était-ce vraiment un simple coup du sort, ou y avait-il quelque chose de plus sombre derrière cet événement tragique ?

La résolution prit forme en lui. Il n'avait peut-être pas toutes les réponses, mais il était prêt à les chercher, à enquêter depuis l'ombre, même si cela prendrait du temps. Il n'abandonnerait pas Léna. Pas tant qu'il n'aurait pas trouvé la vérité et accompli ce pour quoi il était revenu.

La première étape était claire : il devait découvrir ce qui s'était réellement passé cette nuit-là. Tant qu'il ne le ferait pas, il resterait prisonnier de cet entre-deux, incapable de rejoindre l'au-delà.

Échos d'un amour perdu Où les histoires vivent. Découvrez maintenant