La paperasse pour remplir ces dossiers semblait franchement épaisse. Parmi toutes ces feuilles, il fallait renseigner les informations personnelles, telles que le nom complet, la date de naissance, l'adresse où l'on vit, le numéro de téléphone, ainsi que son niveau d'études. Au niveau de la santé, il fallait donner pas mal d'informations, telles que les allergies, les éventuels problèmes respiratoires et cardiaques, si on a déjà dû aller à l'hôpital en état d'urgence – si oui, dire pourquoi –, notre groupe sanguin, et qui on doit contacter en cas d'urgence. On devait également préciser si on avait eu des activités professionnelles, durant un stage ou autre, et quelles étaient nos compétences techniques et autres. Ils demandaient également une photocopie d'une pièce d'identité valable.
Il y avait aussi une feuille réservée au suivi psychologique qu'on avait reçu : nom du psychologue, nombre de séances totales, combien par semaine, régularités ou absences aux rendez-vous... avec des notes écrites par le psychologue lui-même pour décrire la personne.
Quand l'homme à chemise m'en parla, je me demandai ce qu'avait bien pu écrire Mme Eirene. Mais cette question fut remplacée par une autre : cette fiche demandait un compte-rendu de suivi psychologique, mais il n'y avait pas de «si vous avez eu», ou une formule proche. Ça voulait dire que toutes les personnes dans ces dossiers avaient toutes eu un suivi psychologique, en principe.
J'arrêtai de me poser des questions, et je regardai la fiche de renseignement que me tendait l'homme. Dessus, il y avait tout un tas de questions étranges sur notre personnalité et notre comportement. Les feuilles précédentes avaient toutes été remplies par mon père – ou par Mme Eirene, pour le suivi psychologique –, et je devais simplement regarder si j'étais d'accord avec toutes les informations renseignées, ou si je voyais une erreur quelque part. L'administration, c'est franchement chiant et long, je trouve.
Pour cette feuille, on demandait à ce que ce soit moi qui la remplisse. C'était apparemment une fiche de renseignement qui servirait à «adapter le traitement», qu'il avait dit. Je regardai la feuille : recto verso, écrit en petit, avec une quarantaine de questions, à réponse libre ou avec QCM. Bon, ça va être long ça aussi, je le sens...
*
Première question : «Comment décririez-vous votre personnalité en trois mots ?»
Ça commence avec une question énervante, super. Trois mots... Je me rappelle qu'un jour, avec Mme Eirene, on avait fait des exercices pour évaluer ma personnalité. Elle avait conclu que j'avais une légère paranoïa, que j'étais assez renfermé, à cause de ma peur du jugement. J'avais cependant une assez bonne résistance au stress, sauf dans certains cas particuliers, avait-elle ajouté. Donc en trois mots : «paranoïaque, renfermé, calme». Ça fait bien, non ?
«Quelle est votre plus grande force et pourquoi ?». Pour cette question, je pense à la fois où Mme Eirene m'a parlé de la rage dont je faisais preuve face aux saloperies de mes cauchemars - bien qu'elle ne l'ait pas totalement formulé de cette façon - quand j'avais de quoi me battre. J'écris alors : «Je peux faire preuve d'une grande détermination dès que je sais que j'en ai les moyens, même si ce n'est pas assuré». J'ai repris une formule qu'elle avait dite ce jour-là.
«Parlez d'un moment où vous avez dû travailler en équipe. Quel rôle avez-vous joué ?». Là, j'hésitai à répondre. Je cherchai dans ma mémoire, mais je ne trouvai pas de moment où j'avais eu un travail d'équipe, mis à part lors de quelques activités en cours, où l'on devait travailler en binôme ou plus. Généralement, il n'y avait pas d'organisation. Une question, on balançait tous nos idées et on écrivait quelque chose à partir de ça. Je marquai alors : «Je ne suis pas quelqu'un qui s'affiche dans un travail de groupe. Je participe mais sans plus.»

VOUS LISEZ
In a nightmare
AdventureLes cauchemars nous hantent la nuit. Dans nos pires cauchemars, on est poursuivit par des monstres, on se trouve dans des endroits terrifiants, on fuit des choses abominables. Imaginez si, un jour, ces cauchemars deviennent si intenses... qu'ils en...