Chrysalide - Take Flight

Chapitre 3 - Papillon de Nuit

Le réveil me tire du sommeil, et une minute plus tard, je suis debout devant cet uniforme ridicule. Jupe bleu marine, chaussettes hautes, cravate rouge. Sérieusement, qui a inventé un truc pareil ? Ça pourrait presque me rendre hystérique tellement c'est cliché. Je soupire en enfilant la jupe, lève les yeux au ciel devant les chaussures en cuir bien cirées que j'abandonne pour mes Converses noires, un vrai symbole de résistance.

À peine prête, ma mère klaxonne déjà devant la maison. Super, elle a un talent pour transformer chaque matin en course contre la montre. Je balance mes écouteurs dans mes oreilles, vieille habitude, et je cours jusqu'à la voiture en essayant d'oublier que je vais passer ma journée dans un lycée de bourgeois, l'uniforme en prime. Rien que d'y penser, j'ai presque envie de faire demi-tour.

Quand on arrive devant l'immense bâtiment blanc, je suis bouche bée. C'est une cathédrale pour les élites, avec un hall en marbre, de grandes fenêtres, et des élèves aussi bien peignés que des mannequins de magazine. Je sens mon estomac se nouer, la boule au ventre. Je tripote une mèche de mes cheveux, un vieux réflexe quand le stress me gagne. Ça y est, c'est réel, je suis dans ce foutu lycée.
Je pianote un message à Tom pour lui dire à quel point je déteste déjà l'endroit, mais avant que j'aie le temps d'appuyer sur envoyer, une voix m'interpelle avec un enthousiasme si éclatant qu'il me fait sursauter.

— Nessa ! C'est toi ?

Devant moi, une fille d'au moins dix centimètres de plus que moi me sourit à s'en décrocher la mâchoire, du genre de sourire qui pourrait presque être contagieux si j'étais d'humeur. Elle est sublime, la silhouette élancée, des cheveux blonds dorés qui encadrent un visage parfait, et ces yeux gris perçants. Le genre de beauté naturelle qu'on voit dans les magazines. Et moi, là, du haut de mon mètre soixante-cinq, avec mes longs cheveux bruns et mes yeux noisette, je me sens à peu près aussi brillante qu'une lampe d'appoint à côté d'un lustre.

— Oui, c'est moi, je...

Je n'ai pas le temps de finir ma phrase qu'elle me coupe déjà, pleine d'énergie.

— Suis-moi, je vais tout te montrer avant le premier cours. On a vingt minutes !

Les couloirs défilent sous mes pieds pendant qu'elle babille joyeusement, me montrant où sont les salles de classe, la bibliothèque, et d'autres endroits qui ont l'air aussi raffinés que tout le reste. J'essaie de mémoriser les lieux, mais c'est comme marcher dans un dédale de marbre et de bois poli. Finalement, elle s'arrête de me montrer les murs pour commencer à me raconter les histoires de couples ici, et là, je décroche un peu.

On arrive enfin devant notre salle de classe, et elle, toujours aussi souriante, semble prête à me lâcher. Dommage, les potins étaient presque intéressants.

Premier cours : Sciences Politiques.

Il me reste deux options pour cette dernière année, et autant dire qu'aucune ne m'emballe vraiment : sciences politiques ou philosophie. Mon objectif est simple, je veux juste décrocher mon Bac et repartir illico chez mon père, loin de cet univers de façades et de gens parfaits.

Eva, celle qui m'a servi de guide et que je suppose être ma nouvelle "copine" par défaut entre dans la classe comme si elle appartenait aux murs. Elle salue tout le monde, sourire éclatant, et je commence à comprendre que c'est le genre de fille populaire qui connaît chaque recoin de ce lycée et chaque personne dedans. Moi, je ne vise pas la popularité ; je m'installe à une place libre à côté de la fenêtre et m'assois en espérant me fondre dans le décor.
En glissant mon sac sur la table, je regarde par la fenêtre en espérant que personne ne fasse attention à moi.

La cloche sonne enfin la pause, et je file directement à mon casier. Mon téléphone dans la main, j'ai un besoin urgent de parler à Tom ou à n'importe qui d'autre de ce fichu lycée et de cet uniforme ridicule.