Chapitre IX - La danse des regards

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Le cœur d'Elizabeth battait si fort qu'elle pouvait presque le sentir vibrer contre sa cage thoracique, menaçant de rompre à tout moment. Là, immobile devant cette porte en bois vernie, elle avait l'impression d'être face à un précipice. Chaque battement résonnait dans ses oreilles comme un tambour de guerre, couvrant presque tous les autres sons qui emplissaient le couloir. Le bourdonnement sourd devenait assourdissant, amplifiant encore davantage le désordre intérieur qui l'agitait. Elle ferma un instant les yeux, ses cils papillonnant contre ses joues rougies par la nervosité. L'air autour d'elle semblait plus épais, presque tangible. Elle inspira profondément, tentant de remplir ses poumons d'oxygène, mais chaque respiration était laborieuse, comme si un poids invisible pressait sur sa poitrine.

— "C'est juste une loge", se murmura-t-elle, tentant désespérément de se convaincre que ce n'était rien d'autre qu'une simple formalité.

Pourtant, une pensée l'obsédait. Chris, avec son sourire espiègle, lui avait glissé plus tôt dans la journée : "Tu verras, tu vas adorer ton colocataire." Elle avait tenté de lui tirer les vers du nez pour en savoir plus, mais il s'était contenté de hausser les épaules avant de disparaître dans le dédale du plateau. Cette petite phrase énigmatique n'avait cessé de tourner en boucle dans sa tête depuis. Mais qui allait-elle découvrir derrière cette porte ?

Une multitude de scénarios se bousculaient dans son esprit. Elle se mit à imaginer différents visages. Et si c'était Robert Downey Jr., avec son charisme imposant et sa tendance à être toujours au centre de l'attention ? Ou alors, était-ce Mark Ruffalo, toujours si calme et bienveillant ? Peut-être que sa présence la mettrait à l'aise, mais elle craignait aussi de paraître maladroite face à son professionnalisme. Ses pensées dérivèrent vers Scarlett Johansson. Un frisson involontaire parcourut son échine à cette idée.

— "Non, impossible...", se dit-elle en secouant légèrement la tête comme pour chasser cette image.

L'idée s'infiltra à nouveau dans son esprit, comme une vague qu'elle tentait désespérément de repousser. Et si c'était elle ? Le cœur d'Elizabeth accéléra encore davantage à cette pensée, au point de lui donner l'impression que son torse allait se fendre. Partager une loge avec Scarlett, ce serait à la fois un rêve et son cauchemar le plus terrifiant. Depuis ce moment, où Scarlett avait échangé ce sourire taquin avec elle, Elizabeth ne parvenait pas à se défaire de cette sensation étrange qui l'habitait. Une attirance, purement physique, mais incontrôlable. Comment pourrait-elle se concentrer avec elle à ses côtés en permanence ?

— "Non, c'est ridicule", tenta-t-elle de se rassurer. Scarlett devait sûrement avoir sa propre loge, bien plus luxueuse que celle qu'on lui avait attribuée. Pourquoi partagerait-elle un espace avec une nouvelle venue comme elle ? Mais l'incertitude continuait de grignoter ses pensées, creusant encore plus profondément le fossé entre son désir de réussir et la peur d'être submergée par ses émotions. Elle passa une main tremblante sur son front, essuyant les perles de sueur qui commençaient à s'y former.

— "Pourquoi suis-je aussi nerveuse ?" se demanda-t-elle, ses sourcils se fronçant dans une expression de frustration. Elle avait passé des semaines à rêver de ce moment. Pourtant, maintenant qu'il était là, elle sentait ses genoux fléchir, son estomac se tordre d'appréhension, heureusement qu'elle avait sauté le petit déjeuner sinon tout aurait finit sur le sol. Ce n'était pas une simple loge. Non, elle le savait bien. Quand elle ouvrira la porte, ce sera l'officialisation du début du tournage pour elle.

Plus sa main s'approchait de la poignée, plus le couloir semblait s'allonger devant elle, comme s'il devenait un tunnel interminable, chaque pas d'assistant, chaque bruit de porte qui claquait résonnant avec une intensité décuplée. Des silhouettes passaient à toute allure autour d'elle, floues, comme dans un rêve. Leurs conversations à demi-mot n'étaient que des murmures indistincts qui s'insinuaient dans son esprit, ajoutant à sa confusion. Elle avait l'impression d'être une étrangère dans ce monde, une spectatrice qui n'avait pas encore gagné sa place sur la scène. Les murs autour d'elle, étaient tapissés de photos des précédents films Marvel, des images des héros en pleine action, figés dans des postures héroïques. Thor, Iron Man, Black Widow... Tous ces visages familiers qui incarnaient des légendes du grand écran, qui inspiraient les plus jeunes. Et maintenant, c'était à son tour. Elle aussi devait prouver qu'elle avait sa place parmi eux. Mais elle se sentait petite, insignifiante, comme une note dissonante dans une symphonie parfaitement orchestrée. "Tu es ici parce que tu le mérites", lui avait répété Aubrey toute la soirée, mais la petite voix dans sa tête continuait de murmurer : "Et si ce n'était pas vrai ? Et si tu échouais ?"

Le cœur pleinOù les histoires vivent. Découvrez maintenant