CHAPITRE II

111 19 4
                                    


AYEZ UNE FLEUR VOLCANIQUE DANS VOTRE VIE

Cher journal,
Peut-on ressentir deux émotions opposées au même moment sans que notre cerveau explose? Je pense bien que oui. Un peu comme l'euphorie de plonger sa cuillère dans un gâteau au chocolat, bien moelleux et fondant, après une journée horrible... une euphorie qui, soudain, se heurterait de plein fouet à la culpabilité des calories qui l'accompagnent.
Ou pire encore, comme la joie de retrouver un vieux pull confortable qui serait teintée d'une certaine irritation quand il commencerait à gratter au niveau du cou.
Eh bien, aujourd'hui, c'est comme si la vie m'avait servi sur un plateau à la fois la part de gâteau et le pull qui gratte. Un mélange sucré-salé d'allégresse et d'agacement.

{•••}

— Qu'est-ce qu'il a fait ? hurle l'animal féroce qui me sert de meilleure amie, complètement survoltée.

— Tu m'as possiblement détruit le tympan, Tia, je réplique en massant mon oreille.

Tia, de son prénom complet Tiare, est sans aucun doute la Maorie la plus volcanique que je connaisse. Un titre facile à décrocher, je l'avoue, étant donné qu'elle est la seule Maorie que j'aie jamais rencontrée, sa famille entière vivant en Nouvelle-Zélande. Cette boule de lave en fusion, prête à cracher du feu sur tout ce qui ose me blesser, enflamme mon existence depuis près de dix ans maintenant. Celle dont le prénom signifie « fleur » n'a en réalité absolument rien d'une fleur délicate, bien au contraire. Elle tient plus de la belladone que de la pivoine pour être honnête. Et aujourd'hui, il semblerait que ma petite fleur volcanique ait décidé de cracher son feu contre mon ex-patron.

— Mais quel connard ! s'enflamme-t-elle.

Je lui souris et lève mon verre pour le faire tinter contre le sien qui est figé à mi-chemin de sa bouche. Je n'aurais pas mieux dit ! Je peine toujours à réaliser que je viens de perdre mon premier emploi. Pire encore, que j'ai été congédiée par un homme qui n'a montré aucun remords ! Comme si licencier des gens était aussi banal que de distribuer des petits pains pour lui.

— Je trouverais bien autre chose, je soupire.

— Allie, on parle de Voluptas Events ! s'indigne-t-elle.

— Non, vraiment ? j'ironise.

Son poing s'écrase brutalement sur mon épaule, me déséquilibrant presque sur mon tabouret de bar. Cette femme finira par me déboîter quelque chose un jour.

— Sérieusement, tu devrais envisager une thérapie de gestion de la colère, je grogne en frottant mon bras.

— C'est ton De Luca qui devrait en suivre une, crache-t-elle en claquant son verre contre la table. Qui peut bien virer les gens comme ça ?

— Hum, je ne sais pas, je fais mine de réfléchir. Peut-être... les patrons d'entreprise ?

— N'importe quoi ! Les patrons virent les employés qui nuisent à leur productivité, pas ceux dont la tronche ne leur revient pas.

— Outch. Est-ce que tu insinues que je me suis fait virer parce qu'il ne peut pas supporter ma tronche ?

— Avoue que tu y as pensé aussi. Entre les souvenirs de fac et l'incident de la braguette, c'était peut-être trop pour lui.

— Impossible. Pour la millième fois, je suis certaine qu'il ne se souvient pas de moi. Ce sont les deux seules fois de ma scolarité où je l'ai croisé et je ne connaissais même pas son identité avant de travailler pour lui.

SUR UN FILOù les histoires vivent. Découvrez maintenant