Chapitre 6

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QG de l'Organisation, Janvier 2006, Edmonton.

La situation est critique, très critique. Il y a une semaine, un important chef de gang a été assassiné. Pour la sécurité et l'économie, c'est une bonne chose, mais pour l'image des forces de l'ordre, ce n'en est pas une. L'affaire n'a pas encore éclaté dans les journaux, mais ça ne saurait tarder.

Nous voyons déjà la scène, des révoltes et des gros titres dans les journaux, clamant l'incompétence de l'armée, alors il faut prévenir la tempête.

Les faits ont eu lieu dans la nuit du cinq au six janvier, selon les voisins interrogés, des bruits de bagarre puis des coups de feu ont été entendus vers une heure du matin. Sur les lieux, un seul homme a été abattu, à l'arrivée de la police, prévenue par une voisine. Il y avait plusieurs personnes présentes, majoritairement des dealers, mais également le tireur. Un homme dans la vingtaine, apparemment sans dossier. 

Les présidents de l'Organisation nous ont réunis ici, afin de trouver une solution. Cette situation s'est déjà produite, il y a quinze ans, et la solution qui en est ressortie n'a jamais été unanimement acceptée. Le malfaiteur a été engagé dans l'organisation. Le jour où Lewis m'a appris cela, je me suis sentie étrange. J'ai d'abord été indignée, comment un criminel pourrait avoir sa place dans nos rangs. Puis, je me suis rappelée de ma propre condition.

La réunion s'éternise, cela fait déjà deux heures que nous sommes ici, le ministre de la Défense tente de trouver une solution autre que celle proposée par le coprésident, mais aucune ne semble satisfaire la majorité.

— Ne pensez-vous vraiment pas que la prison soit une bonne idée ? tente-t-il à nouveau.

— Non, pour la troisième fois, cela renverrait une mauvaise image des forces de l'ordre et rien ne nous garantit que le coupable garde le secret une fois incarcéré.

— Et bien nous n'avons qu'à l'éliminer, comme tous les criminels le méritent !

— Comment osez-vous proférer de telles paroles ! C'est une honte ! s'exclame bruyamment mon supérieur

— Ne niez pas Général Milton ! Deux criminels éliminés, ce sont deux problèmes en moins sur le dos !

— Ce gamin n'est pas un criminel, vous ne connaissez même pas son nom ! Tentez de lui parler, de comprendre son geste, peut-être comprendriez-vous qu'il n'est pas comme le monstre qu'il a abattu !

— Alors vous proposez de le relâcher dans la nature ? Solution très efficace Monsieur Milton !

— Cessez votre sarcasme, la solution ne réside pas dans l'abattage de cet homme.

— Sauf votre respect, j'aimerais intervenir. je trouve le courage de prendre la parole pour la première fois en deux ans. Le coprésident Milton, oncle de mon supérieur, excédé par la situation, semble soulagé de ma prise de parole courtoise.

— Je vous en prie, Capitaine Winters.

— En y réfléchissant, je trouve que l'idée d'engager cet homme dans nos rangs est une bonne idée. Cet homme est jeune, nous pouvons encore lui permettre de devenir quelqu'un de droit. En lui offrant cette possibilité, nous perdons un criminel sans perdre un homme, nous gagnons un citoyen et peut-être même un soldat. Notre nation a des valeurs, comme l'intégrité, ou le respect de la démocratie et des personnes, nous ne sommes pas des tyrans. Notre rôle est, je ne vous l'apprends pas, de protéger nos citoyens et d'éliminer les menaces. Ce garçon n'en est pas une, il n'a probablement pas eu le choix de devenir ainsi.

— Votre plaidoirie est convaincante, Capitaine. Cependant, même si cela a déjà fonctionné, la façon dont nous avons dû présenter cela à la presse n'a pas fait du bien à notre organisation. La population a trouvé cela étrange que toutes les poursuites soient arrêtées sous couvert que le coupable était un agent infiltré. Les témoins ont décrédibilisé notre version.

AzuriteOù les histoires vivent. Découvrez maintenant