XI. UN ORDRE DU SUPRÊME
L'inverse de l'amour n'est pas la haine, mais le mépris. Son langage est le silence. Ecoutez, si vous n'entendez rien, c'est qu'on crache déjà à votre pied.
Citation attribuée à Ethiarque, Grand penseur de l'aire constructive.
Une nouvelle attaque dont on ne me dit rien. Un nouveau départ des Serviteurs, qui me contraint à m'entrainer avec les enfants. Une nouvelle matinée parfaite, sous un soleil doux, un ciel dégagé, une brise fraîche. Et aucune lettre de James ou d'Araphël.
Je n'ai pas eu de réponse à la dernière, où je décris à mon Rhéteur tout ce que je souhaite faire à sa joue pour n'avoir pas rebondi sur ma déclaration. Un silence de six interminables jours.
Quant au Degré, depuis mon intrusion visuelle d'avant-hier, je ne l'ai pas revu. Mais je me concentre sur l'évolution de mon Essence, et tente sagement ce matin, de me plier enfin aux conseils méditatifs du formateur des petits.
Parce que, je l'ai saisi en faisant ciller Slaetan, ma force véritable n'est ni dans la rage, ni dans la méchanceté. Je suis efficace lorsque je convoque la paix, et l'amour que mon oncle m'a assuré. Ma puissance vient de là.
James l'avait compris avant tous. Je me souviens de sa réflexion sur le chemin du Stikos de Beleveil : « l'amour est ton moteur ».
J'envisage que la méditation peut me guider pour réunir plus vite en moi les sentiments positifs. Chacun use de l'Essence en fonction de lui-même, c'est un des premières choses que mon sombre maître m'ait apprises. Il semblerait donc que je vienne de me rencontrer vraiment. Mon Essence est faite d'amour, de plénitude, d'assurance concrète que mes liens ne se briseront pas.
Voilà ma puissance.
Et voilà mon arme contre le Degré.
Ainsi, aux aurores, sur la plaine où les enfants développent leurs dons sereinement, je plie la jambe, et pose le plat de mon pied sur le côté de mon genou. Je place mes paumes l'une contre l'autre, les cale sur ma poitrine, et je ferme les yeux.
Le petit Atôm est à ma droite, nous nous sommes salués en nous touchant les doigts, il y a quelques minutes. Le voir m'a ramenée à mon rêve, mais j'ai rejeté Sa voix pour m'encrer dans « l'instant présent », comme c'est recommandé ce matin.
Le Serviteur plus âgé qui nous guide, -et me prend pour une presque sans-don-, déclare d'une voix profonde que nous devons laisser la pensée s'en aller. J'ai déjà essayé, c'était peu probant.
Mais cette fois, j'y applique une meilleure volonté.
Je me concentre sur les paroles de notre guide. « Entendez l'air, peut-être va-t-il chanter, peut-être murmurer, il caresse votre peau, il est simple. Il est là. Simplement là. Comme vous. »
Je suis simple.
Je suis là.
Je suis simplement là.
Bon sang de Passeur, c'est ridicule.
Je ne suis pas seulement là. Je suis courbaturée, ma jambe me tire, j'ai la tête groggy par une sale nuit, et pourquoi la sterne n'est toujours pas de retour ?
Ce n'est pas compliqué de répondre à une lettre ! Ils y arrivaient bien ces dernières semaines. Pourquoi me privent-ils de leurs mots, tout à coup ?
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La Troisième Rive, tome III
Roman d'amourTome III. Dernier volet de la trilogie de La Troisième Rive. Hélianne doit faire face à de nouveaux combats. L'Ile aux Essences s'avère bien plus mystérieuse et bien plus complexe qu'elle ne l'avait envisagé. Complots, secrets, guerres, dans ce de...