L'aube baignait le palais d'une lumière dorée, mais Layla ne remarquait pas la beauté de ce moment. Elle se tenait près de la fenêtre de ses appartements, ses mains crispées sur le rebord, observant la cour où s'affairait une armée de serviteurs. Des tapis somptueux étaient déroulés avec soin, des urnes remplies de fleurs rares étaient disposées, et l'encens s'élevait en volutes légères dans l'air frais du matin. Malgré ce tableau grandiose, une sensation d'irréalité pesait sur elle, comme si tout cela se déroulait dans une vie qui n'était pas la sienne.
Elle passa une main tremblante sur la robe qu'on lui avait imposée. C'était une œuvre d'art, en soie ivoire et broderies d'or, les manches amples bordées de perles étincelantes. Mais pour elle, cette tenue n'était qu'un symbole de sa soumission à un destin qu'elle n'avait pas choisi. Elle inspira profondément, tentant de calmer son cœur affolé, mais l'angoisse persistait.
Le bruit d'une porte qui s'ouvrait derrière elle la fit se retourner brusquement. Son père entra, vêtu de manière impeccable, l'air grave mais satisfait.
— Il est temps, Layla, dit-il simplement.
Elle le fixa, incapable de répondre. Comment aurait-elle pu expliquer ce tourbillon d'émotions en elle ? La colère, la peur, et quelque part, une pointe de résignation glacée. Elle détourna les yeux vers la cour une dernière fois avant de se redresser.
— Très bien, père, répondit-elle d'une voix qu'elle voulait ferme mais qui trahissait un léger tremblement.
Il lui offrit un bref sourire, plus soulagé qu'affectueux, et lui tendit son bras. Elle hésita une fraction de seconde avant de le prendre. Ensemble, ils quittèrent la pièce, traversant les vastes couloirs ornés de mosaïques complexes et de colonnes sculptées.
En s'approchant de la grande salle du trône, Layla sentit la tension monter. Elle percevait les murmures des invités avant même d'entrer. Les regards, les jugements non exprimés, allaient bientôt s'abattre sur elle, comme autant de lames invisibles.
Quand les portes massives s'ouvrirent, la lumière éclatante de la salle l'aveugla un instant. Puis elle vit.
Le faste était oppressant. Les murs scintillaient sous les reflets des mosaïques d'or et d'émeraude, et le sol de marbre semblait s'étendre à l'infini. Au centre, sur une estrade surélevée, Khalid se tenait debout, immobile. Il portait un manteau noir orné de fils d'or, et une ceinture sertie de pierres précieuses qui captaient chaque rayon de lumière. Son visage était impassible, un masque de contrôle parfait.
Layla serra les poings pour dissimuler le tremblement de ses mains et avança aux côtés de son père. La salle était pleine, des conseillers en robes riches, des nobles vêtus de leurs plus beaux atours. Mais ce n'était pas eux qui la faisaient vaciller. C'étaient les murmures, à peine audibles, mais suffisamment clairs pour lui parvenir.
— Une femme sans sang noble.
— Belle, certes, mais est-ce suffisant pour être sultane ?
— Elle n'égalera jamais Samira.Ces derniers mots la firent chanceler intérieurement, mais elle ne le montra pas. Elle marcha droit, le menton légèrement relevé, jusqu'à ce qu'elle atteigne l'estrade.
Quand Khalid posa les yeux sur elle, elle sentit comme un coup de poignard invisible. Ses prunelles sombres semblaient percer son âme, chercher quelque chose qu'elle-même ignorait. Elle soutint son regard, refusant de détourner les yeux.
Le grand vizir s'avança alors, tenant entre ses mains un rouleau de parchemin magnifiquement orné. La cérémonie allait commencer.
Les mots récités par le vizir résonnaient comme des chants vides pour Layla. Elle ne retenait que la monotonie des phrases et le poids de son rôle qui s'ancrait en elle à chaque instant.

VOUS LISEZ
Le serment du désert
RomanceDans un royaume ancien où la tradition et les alliances familiales priment, le Sultan Khalid Al-Salim est un homme redouté et respecté. Fort, autoritaire et d'une intelligence stratégique inégalée, il règne d'une main de fer. En raison d'une vieille...