Au silence de ce petit matin de dimanche,
Mes yeux lourds boivent la lumière fraîche du jour qui danse.
Dans la solitude de ma chambre,
C'est encore toi qui occupes mon esprit;
Et voici qu'il est mémoire de toi, sang de mon sang,
Yeux de mes yeux, chair de ma chair,
Absent toujours vivant en moi.
Lors, j'ai souvenir de juillet et de la guerre,
J'ai souvenir de la douloureuse séparation,
Comme un cœur déchiré par un poignard soudain,
Souvenir des larmes et des cris
Et de la mort qui m'a hanté
Comme la nuit noire.
Père, je pense à toi et je me languis de ton absence,
depuis maintenant dix-sept ans
Et ton absence me brise le cœur.
Dis, tu serais bien fier de ton fils
Si tu étais encore en vie, n'est-ce pas?
Et on me dit que jadis, tu m'as bénis,
Lors même que j'étais enfant,
A l'innocence de l'âge
Et tout petit je jouais, insouciant.
Ah! me manque le sourire de l'absent,
La voix douce de sa sage bouche!
Te souviens-tu père, dis, te souviens-tu du méchant
Enfant que j'étais et que tu aimais tendrement?
Ton fils est devenu un homme
Et je sais que tu le vois et es fier de lui.
Et ta fille est une mère,
Ses enfants t'auraient appelé pépé...
Ah! Seigneur terrible à mon cœur!
Seigneur, Seigneur terrible à mon cœur!
Que ne rends-tu pas la vie
À celui qui fut, comme Lazare?
Pourquoi l'avoir arraché si tôt à notre amour?
Père, tu es parti dans la fleur de l'âge
Et tu nous as laissé inconsolables:
Ta femme, tes enfants...
Et voici je m'abandonne :
J'écris ces lignes et je pleure,
Je pleure, comme un enfant,
Je pleure à grandes larmes,
Et mon cœur saigne de nouveau,
Mais je reste fort.
Je ne dis pas chanter l'absent,
Je dis revoir son visage, le toucher, l'embrasser, lui parler et que
Ce ne soit pas un rêve...
Non! père, tu n'es pas cendre!
Non! père, tu n'es pas mort!
Car mon père c'est moi.