Quelque part dans le pays...
« Au secours ! A l'aide ! Quelqu'un... ! »
La jeune femme déboula en trombe dans le petit bureau de presse où elle travaillait, à bout de souffle.
« Hé bien Juliette, que se passe-t-il? Te voilà bien matinale pour une fois. »
L'interpelée, les yeux remplis d'effroi, l'entendit à peine.
« Marlina! Le feu ! »
Le directeur du journal, habitué aux réactions surdimensionnées de son employée pour un oui ou un non, tira calmement une chaise et l'invita à s'assoir.
« Allons, allons, d'abord calme toi, ensuite recommence du début et dans l'ordre. »
Juliette avala le verre d'eau que lui avait gentiment apporté un collègue.
« Marlina. » souffla-t-elle entre deux gorgées.
-Oui, Marlina, tu l'as mentionné tout à l'heure; eh bien, qu'est-ce qu'il y a?
-Vous savez qui c'est, n'est-ce pas? »
L'ensemble du bureau poussa de grands cris.
« Bien sûr! Qui ne la connaît pas! » s'exclama un premier. « C'est la plus grande fée du millénaire!
-Aussi belle que gentille, » renchérit une deuxième, « et aussi humble que puissante.
-Une femme parfaite. » conclu un troisième.
« Oui, bon, on a compris, » s'énerva le chef, « laissez la finir enfin! Continue, Juliette.
-Vous savez que je passe devant sa maison en venant au boulot; et comme tous les matins je voulais juste lancer un petit coup d'œil par la fenêtre pour la voir. Elle est tellement incroyable et belle et-
-Juliette, on sait qu'elle te passionne au point de l'obsession mais tu dévies du sujet.
-Oui excusez-moi! Je disais donc, ce matin en passant devant le jardin, la fenêtre du salon était ouverte, alors tout naturellement j'ai regardé au travers, et là... et là... »
Juliette ne put retenir un sanglot terrifié et des larmes coulèrent sur ses joues.
Ses collègues échangèrent un regard. Ils avaient l'habitude des excentricités de la jeune femme qui mettaient un peu de vie dans la routine de tous les jours, mais c'était la première fois qu'ils la voyaient dans un état pareil. Martin, le directeur, s'agenouilla près d'elle.
« Juliette, regarde-moi s'il te plaît. » dit-il doucement.
La jeune femme secoua la tête, les poings plaqués contre le visage, de terribles images lui parcourant visiblement l'esprit.
« Juliette. » Son ton était ferme mais gardait sa douceur, comme pour parler à un chaton apeuré. « Regarde-moi. »
Lentement, la jeune femme ouvrit les yeux, les larmes ruisselants sans bruit.
"Du sang..." murmura-t-elle, "Du sang... partout... sur les murs... au plafond... dans le tapis, et sur-" un nouveau sanglot l'interrompit.
« Juju, tout va bien, tu es avec nous, en sécurité; il ne peut rien t'arriver ici. » la rassura Hélène, une de ses amies.
Juliette tremblait. Comment pouvait-elle décrire l'horreur de la scène? Comment pouvait-elle dire que l'idole du pays avait été sauvagement lacérée à l'arme blanche pour finir par s'écrouler au milieu du salon, son sang rouge pulsant par ses blessures? Comment pouvait-elle expliquer que l'homme qui l'avait ainsi attaquée n'était pas un simple cambrioleur, mais son propre mari, et qu'après avoir achevé son acte, il avait éclaté d'un rire strident, fou, baragouinant quelque chose d'incompréhensible, pour enfin enfoncer le couteau dans son propre cœur? Comment pouvait-elle envisager de mentionner que la petite fille du couple s'était contentée de rester assise par terre, dans l'encadrement de la porte, tandis que son père assassinait sauvagement sa mère avant de se suicider, sans bouger le petit doigt, pas même lorsque des éclaboussures de sang lui étaient tombées sur la figure? Comment expliquer qu'au moment où le corps du père heurtait le sol, le salon explosait en flammes?
Lorsque Juliette reprit ses esprits elle était dans le fauteuil du patron. Elle avait dû s'évanouir. Hélène lui dit qu'elle avait parlé dans son délire, et qu'ils avaient fini par comprendre ce qui s'était passé. La police et les pompiers étaient déjà sur les lieux et la route était complètement bloquée. La seule survivante était la fillette, retrouvée dans le salon, étreignant de toutes ses forces les corps inertes de ses parents. Le feu avait rapidement été mis sous contrôle, notamment grâce à l'aide d'un vieux mage ami des parents, le père Liron. Ce dernier avait pris la petite fille de six ans sous son aile, alors que de nombreuses rumeurs bourgeonnaient déjà tout autour du pays à propos de « La vérité sur la mort de Marlina ».
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Kiara: le glacier
FantasyUne jeune fille qui voit ses parents mourir devant ses yeux, abhorant la magie, en vient à faire un choix qui devrait boulverser l'équilibre des puissances en guerre dans l'ombre. Mais à quel point? Et à quel prix? --- Désolée que le résumé soit aus...