Et si tu te souvenais ?

Chapitre 15 : Un restaurant.

"Amy Fields ...

Je ravalai ma salive et me préparai à sortir une excuse inventée à la seconde, totalement bête et inconcevable, tout en espérant ne pas paraître trop bête devant Pierre

... Je te remercie d'être allée jusqu'au lycée Mole et d'avoir récupéré leurs bacs blancs, dit-il, en regardant le paquet que j'avais dans les bras. Tu as plutôt été rapide d'ailleurs, continua-t-il en regardant sa montre."

Pierre me fixa avec un regard qui voulait tout dire, et je me retins du mieux que je le pouvais pour ne pas me jeter dans ses bras. Franchement, je n'aurais jamais imaginé une seconde qu'il irait faire ça pour moi, surtout que je savais que le directeur me voyait désormais d'un mauvais œil à cause de tous mes retards. Je pris donc ma place à côté d'Esther, qui avait l'air d'avoir gobé le mensonge de Pierre, mais qui ne pouvait s'empêcher de me regarder d'un mauvais œil. Pendant tout le cours, j'essayai tant bien que mal de faciliter la tâche à Pierre, bien que j'avais l'impression d'être totalement inutile, je me surprenais même à le dévisager, toujours en admiration devant sa manière d'être, son charisme inégalé, et sa manière de s'adosser conte le tableau, défiant toute la classe d'un regard absolument glacial. Ces dans ces moments là que je me demandais comment est-ce qu'il pouvait à la fois être si froid lorsqu'il était sérieux, et aussi attentionné lorsqu'il était avec moi. 

"Bon, vous me finirez donc l'exercice pour demain. Je ne vous verrais pas avant la semaine prochaine, ce sont mes deux assistantes qui vous feront cours demain. Tachez de suivre leur cours avec autant d'attention que le mien. Vous pouvez y aller, dit-il."

Tous les élèves se levèrent, rangèrent leurs affaires en un clin d'œil pour se précipiter à la cantine, tous plus pressés les uns que les autres, si bien qu'on aurait dit une véritable course-contre-la montre. 

J'étais un peu secoué par ce que Pierre venait d'annoncer. Esther et moi ? Faire un cours ensemble ? Il n'y avait pas besoin de voir l'avenir pour savoir que ça allait se terminer en véritable hécatombe, j'étais donc plutôt sceptique vis-à-vis de cette idée.

Au bout de quelques minutes, tous les élèves étaient sortis de la salle et Esther s'était levée pour aller parler à Pierre qui était en train de ranger ses affaires. Elle se recoiffa légèrement, pris une expression qui se voulait séduisante et l'aborda :

"Pieeerre. Comme nous avons trois heures pour déjeuner aujourd'hui, pourquoi ne pas manger ensemble en tête-à-tête, sans cette rabat-joie ? demanda-t-elle en me regardant de travers

J'aurais aimé que Pierre prenne ma défense, mais je savais que cela était absolument impossible. Je serrai le poing mais n'intervint pas, je savais qu'il avait déjà beaucoup de responsabilités pour que je l'embête plus avec mes sentiments.

- Désolé Esther. J'ai un déjeuner important ce midi. Une autre fois peut-être.

- Ah, euh, aucun problème ! De toute façon je viens de me rappeler que j'avais aussi un déjeuner important ce midi. Je ..."

Esther arrêta de parler quand elle se rendit compte que Pierre était parti. Elle ne se retourna même pas pour me parler ou même pour me toiser comme je l'aurais imaginé et se contenta de quitter la salle, visiblement déçue.

Je ne savais pas vraiment quoi penser. Pierre ne m'avait même pas attendue pour au moins me parler, bien qu'il m'avait grandement aidé avec mon retard. En sortant de la salle, je tombais nez-à-nez avec deux lycéens en train de s'embrasser à pleine bouche, ce qui me provoqua une drôle de sensation, no pas d'embarras mais plutôt de jalousie. J'avais en quelque sorte "raté" ces moments d'insouciance en restant accroché à Pierre durant ses cinq  années, si bien que je n'avais eu de copain depuis la 3 ème, ce qui commençait à remonter.