Dáinn dans la forêt

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Les otages s'enfuyaient, les gardes se jetaient sur eux et moi, on m'avait oublié. Je couru à perdre haleine, droit sur la sortie, H sur les talons vociférant des ordres. A côté de la porte, le corps encore ensanglanté de ce pauvre homme.

La confusion était mon alliée. Le battant claqua violemment dans mon dos sans que quiconque n'ait le temps de le franchir après moi, et mes jambes me portèrent jusqu'au bout du couloir.

Cours. Cours plus vite.

J'entendis des cris loin derrière moi, prouvant une avance remarquable. Je tournais au hasard, mes doigts crochetant les murs pour prendre les angles sans glisser et sans ralentir ma course effrénée. Tout se ressemblait, je ne reconnaissais rien.

Au fond d'un couloir, une porte. Par miracle, elle s'ouvrit d'une simple pression. J'avalai les marches de l'escalier se trouvant derrière, descendait à toute allure, volée après volée et glissai, trébuchai, jurai. Ce froid mordant, d'où provenait-il ?

Le son d'une porte éclatant contre un mur m'apprit qu'ils venaient eux aussi d'atteindre l'escalier. Devant moi s'ouvrait à présent un corridor incurvé. Je fonçai. Le froid brûlait mes poumons, engourdissait mes muscles mais je tirai toujours plus sur mes jambes. Face à moi, une porte ronde, comme celle d'un coffre-fort. Un monstre d'acier, imprenable.

Je me jetai dessus, empoignant l'épaisse poignée et tentai de la faire tourner. Le mécanisme était congelé, impossible à dégager dans le temps qui m'était imparti. Je m'évertuai à pousser, agrippant et tirant de tout mon poids.

Leur cavalcade me parvenait déjà aux oreilles, un ordre était crié ; sûrement celui de ne pas laisser de survivant.

Je gémis sous l'effort, m'arc-boutais contre le mécanisme, les muscles pétrifiés et craquant sous la tension pulsante. Il fallait qu'il s'ouvre, je devais réussir. Sauver ma vie.

La glace s'effrita, le mécanisme tourna et un vent arctique s'engouffra dans le couloir. Je m'engouffrai dans l'ouverture, poussai la porte derrière moi avant de faire volteface.

J'étais dehors.

Plus de couloirs lisses, plus de mercenaires, plus de vertiges.

De la neige recouvrait le sol et en m'avançant, mes jambes s'enfoncèrent sur une dizaine de centimètres. La morsure de la glace me prit par surprise. Un blizzard glacé balayait le paysage et quelques flocons immaculés tombaient sur mes vêtements noirs. Des sapins immenses s'élevaient, les branches alourdies de neige. Le ciel était d'une étrange couleur grise pure, sans nuage. Il semblait étonnamment bas.

Puis, me rappelant l'urgence mortelle de la situation, je claudiquai jusqu'au bosquet le plus proche. Plus j'avançai, plus la neige s'épaississait et plus la progression s'avérait difficile.

C'était un pari de fou : je ne survivrai pas plus d'une heure dans cette atmosphère glaciale vêtue de la sorte. Dans quelques minutes, je n'allais plus avoir l'usage de mes membres. Le corps agité de soubresauts, je m'enfonçai entre les arbres.

Chose étrange, nul n'avait encore ouvert la porte.

En agrippant une branche, une violente douleur à la main m'arracha un cri : de grosses gouttes rouges vinrent échouer sur la neige. Mes paumes étaient à vif, leur moiteur due à l'angoisse les avait collées à la poignée gelée. Des lambeaux de chair étaient arrachés, le froid avait joué le rôle d'anesthésiant. Je n'avais pas le temps de m'en occuper. Je devais marcher, marcher pour ne pas geler. Les aiguilles de pins m'égratignaient le visage comme pour m'empêcher d'aller plus loin. Aucune route en vue, aucun signe de vie.

L'Institut FitzgeraldOù les histoires vivent. Découvrez maintenant