Chapitre 10

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Un goût acide me brûle la langue, je vais vomir. Je sens mon estomac se contracter et rejeter son contenu. Une douleur lancinante me traverse la tête. Je me lève puis me dirige vers la salle de bain en faisant attention où je mets les pieds. Je me contente de marcher sans réfléchir aux causes de cette flaque de vomi.

J'attrape un cachet de paracétamol et l'avale en même temps qu'une gorgée d'eau.

- T'es pas mort ?

- Tu parles trop fort.., commenté-je en posant deux doigts sur ma tempe, pourquoi je suis comme ça ?

- T'as trop bu hier, explique Adam en ricanant.

Ma migraine semble l'amuser, un large sourire creuse ses joues.

- J'ai fait quoi ?

- Je sais pas, moi ! Proteste-t-il.

***

Après avoir nettoyé le sol, je m'estime chanceux de ne pas en avoir remis une couche. L'odeur est écœurante et me colle à la peau. Je la recouvre de gel douche puis frotte à me l'arracher du corps.

Je prends un tee-shirt et un jean horriblement basique ; je ne veux pas que Lena me trouve extravagant dans tous les domaines. Mon regard converge avec la caméra.

Je prends cette dernière d'un geste las, je n'ai aucune envie de savoir ce qu'il y a dans la mémoire. Cependant, je presse le bouton "play".

C'est toujours le même homme, il a la même coupe de cheveux et toujours ce regard provoquant chargé d'ardeur. Il vacille lorsqu'il enchaîne plus de trois pas à la suite et il glousse souvent. Puis, il s'assoit devant la caméra et prends soin de régler le cadre en la haussant sur une pile de livres. Il sourit, fait signe en agitant ses doigts.

-  Je me jetais d'un pont..

- Jack ? T'es là ?

La tête de Lena apparaît dans le cadre de la porte. Je repose rapidement la caméra sur le tas de livres.

- Euh.. Oui, dis-je, ravalant ma salive.

Elle s'approche.

- Tu faisais quoi ?

- Rien, affirmé-je.

Je l'entraîne dans le salon pour tenter d'échapper à la mauvaise atmosphère qui pèse tout particulièrement sur mes épaules. Je m'aperçois que j'ai attendu sa visite sans m'y être vraiment préparé. Mon coeur palpite dans ma poitrine, mes oreilles deviennent brûlantes et je devine qu'une couleur rouge occupe mes joues. J'ai soif, la sensation de lèvres sèches et déshydratées me dérange. Mon regard suit sans cesse la direction que m'indique son décolleté. Elle est "canon" comme dirait un interne qui admirait un poster de fille dénudée dans son bureau. Mais j'ignore comment m'y prendre avec une fille "canon". Jusqu'à maintenant mon contact avec les filles était restreint à une blonde ennuyante.

- T'habites ici tout seul ?

Je la regarde. Elle vient de me sortir d'un coma profond, je suis perdu et elle attend une réponse. À quelle question déjà ?

- Désolé, je pensais à quelque chose. Tu disais quoi ?

Elle sourit, je m'en tire bien pour cette fois.

- Tu vis avec quelqu'un ?

- Ouais, avec Adam.

- Adam Scott ?

- Oui, c'est lui.

***

Quand elle me parle d'elle, la plupart de ses souvenirs remontent à moins d'un an. Je l'écoute médusé et enfoui dans le canapé. J'imagine sa vie, je l'imagine regrettant ses parents biologiques ou désirant bâtir une vie luxueuse avec, à ses côtés, des milliers de gens qui paieraient cher pour l'avoir en leur compagnie.

Une heure plus tard, je bois toujours ses mots qu'elle prononce avec un petit sourire lorsqu'Adam rentre.

- Je vais y aller, me lance Lena.

- Maintenant ?

- Oui. À bientôt.

Elle me fait signe puis la voilà partie aussi vite qu'un courant d'air.

Adam prend sa place.

- On peut en parler cinq minutes ?

- J'ai le choix ?

- Non, avoue-t-il, Jack, cette fille a un bloqueur.

- Et ?

- Traîne plus avec elle, c'est une Programmée.

- Elle me fera rien.., rajouté-je.

- On pense que Wam les utilisent pour traquer les désobéissances civiles.

- Arrête Adam, t'es même pas sûr de ce que tu dis.

- Et si j'avais raison, hein ! On fait quoi ? Réplique Adam.

- Ok, c'est bon. T'as fini ?

Je n'attends pas sa réponse, elle n'est pas importante. Quoi qu'il en dise, la conversation sur Lena est terminée. Le véritable mouchard, c'est Hatten. Les gens à craindre sont les terroristes, les membres du Gouvernement. Et moi.

Je m'adosse sur la porte close. Quelque chose glisse sur ma joue et ma vision devient flou. Ce sont des gouttes d'eau qui coulent de mes yeux. Je ne me sens pas triste pourtant. J'ai seulement peur. Il y a quelques semaines, tout me paraissait insignifiant quand j'observais le ciel changer de couleur dans ma chambre. Maintenant, je perçois les hélicoptères qui l'ornent. Je perçois le danger et je le ressens.

Je n'ai pas de camp pour qui combattre ni à battre. Mes nouveaux ennemis m'écraseraient trop facilement.
Tout le monde ment.

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