Irrésistible

Vingt- Septième

Blink 182- After Midnight

3 jours. 3 jours que Tyler campe dans la chambre de sa soeur, qu'un miracle a permis de laisser parmis nous. Il fixe intensément le moniteur, par peur que la ligne redevienne droite, et ce pour toujours.

Il est tel un zombie, une âme perdue et je le supplie tacitement de me laisser entendre sa voix.

"Roxanne. Tu dois partir" me chuchote Max pour la huitième fois. Cette fois-ci, je consent à l'écouter. Mon dos craque lorsque je me lève et je pose une main qui se veut réconfortante sur l'épaule tendue de Tyler. Sans réaction.

Je ferme la porte derrière moi et retire mon masque.

"Il n'a toujours rien dit?" Demande Elsa, les sourcils froncés.

"Rien du tout." Je soupire. "Il faut lui laisser du temps."

"En même temps, on ne peut pas le blâmer d'être dans cet état là" poursuit-elle. "Hoffman t'a donné la cause de son arrêt?"

"Il lui faut une greffe d'urgence. Je n'ai pas réussi à en apprendre plus. Je vais essayer de faire le test, pour voir si je suis compatible."

"Tyler ne te laissera jamais faire."

"Tyler est occupé à autre chose, Elsa."

"Comme tu voudras." Elle balaye le sujet d'un revers de main. "Au fait, ne me confie plus jamais ton téléphone. Il vibre toute les 30 secondes, j'ai l'impression de vivre dans une ruche." Elle me le tend et je regarde l'écran avec précaution, comme s'il risquait de m'éclater à la figure.

Constat?

39 messages d'Alexandre.

Il faudrait que je demande une injonction d'éloignement contre lui.

Ou que je change de numéro.

Je les lis tous un par un, jusqu'à ce que je tombe sur le dernier qui me fige sur place.

[ Roxanne, je passe à l'hopital à 12h précises, tu as interet à me fournir une explication. A ]

Un bref regard vers l'horloge m'indique qu'il ne me reste qu'une dizaine de minutes avant son arrivée.

Une dizaine de minutes pour trouver un plan pour me tailler au plus vite.

Ou prendre tes responsabilités.

"Je prends ma pause déjeuner. À tout à l'heure." Dis-je à Elsa et Max en courant vers les vestiaires.

Je les entends vaguement me crier quelque chose mais je n'y fais pas attention.

Je finis par attendre à l'entrée de l'hopital. Il fait chaud mais pourtant je tremble de tous mes membres. À côté de moi, une femme d'une trentaine d'années allume une cigarette, bien qu'elle vienne d'en finir une. Je la regarde quelques instants, la tête en arrière, soufflant la fumée comme si elle pouvait apporter une solution à ses problèmes.

"Excusez moi" je demande sans trop savoir pourquoi "est-ce que je pourrais avoir une cigarette s'il vous plait?"

La femme se retire de sa contemplation et tourne la tête vers moi. Elle m'etudie à son tour et sort son paquet. "Tenez, vous avez l'air à cran"

Elle me tend ce mélange de tabac et de nicotine et je le saisie entre mon pouce et mon majeur, comme si elle allait exploser. Avant même que je lui demande, la femme me tend un briquet. Un joli briquet doré avec des initiales gravées dessus.

S.B

Je l'allume et tire dessus. J'essaye de dissimuler mes toussements mais "S.B" se retourne vers moi, un petit sourire aux lèvres.

"J'imagine que vous n'avez jamais fumé avant" aucun jugement dans sa voix, uniquement une constatation. Je secoue la tête, un peu honteuse, et n'essayant pas de retenter l'expérience. "Ca vient tout seul. Imaginez que vous aspirez vos problemes, que vous les jettiez dans votre gorges et que vous fassiez le tri dans vos poumons." J'essaye, mais je manque de m'etouffer une nouvelle fois. Elle a un petit rire mais poursuit "je ne devrais probablement pas vous apprendre à fumer. Ma fille est un peu plus jeune que vous, et je ne voudrais pas que quelqu'un lui dispense ce genre de leçon."

"Vous avez de la famille ici? Je veux dire, à l'hôpital?"

"Mon plus jeune fils. Une appendicite, rien de trop grave mais je n'aime pas les hôpitaux. Et vous?" Répond S.B

"Je suis stagiaire."

"Donc vous connaissez les dangers de ce que vous tenez entre vos mains. Une rébellion?"

"Plutôt le stress." Dis-je un petit sourire aux lèvres.

"Je vois." Elle souris à son tour et s'apprête à partir.

"Comment vous appelez vous?" Je demande finalement.

"Sally. Sally Bender. Et vous?"

"Roxanne Carmichael." Elle acquiesce en plissant les yeux en me détaillant.

"Les mêmes yeux que son père" murmure-t-elle.

"Pardon?"

Mais elle a déjà franchi les portes de l'hôpital.

Qu'est-ce que c'est que ça ?

Les même yeux que son père.

Je chasse cette phrase de mon esprit et me dit que cette femme est probablement très fatiguée et qu'elle doit me confondre avec quelqu'un d'autre. Après tout, Carmichael est un nom assez courant.

Je continue de fumer en dissimulant mes toussements et je vois enfin la silhouette élancée d'Alexandre courir vers moi.

"Tu fumes maintenant?" Demande-t-il, essoufflé.

"Qu'est-ce que tu veux?"

"Je veux juste avoir des réponses, Roxanne. Juste savoir pourquoi tu m'as fait ça."

"Je te rappelle l'épisode où tu me trompes avec ma meilleure amie? Celui où tu essayes de me violer? Je n'ai rien n'à te dire, Alexandre, parce que tu ne mérites absolument pas qu'on te prenne en concideration."

"J'ai déconné, je sais. J'étais soul et je ne savais pas ce que je faisais. Je peux te promettre que si tu me laisses une chance, une infime petite chance, tu verras que je peux te rendre heureuse."

"Le truc con, Alex, le truc vraiment con, c'est que je suis heureuse. Tyler m'apporte quelque chose que tu ne pourras jamais me donner. De la sincérité. Il m'aime, et je l'aime. Au revoir Alexandre." Je lui tourne le dos lorsqu'il m'attrape par le bras.

"Tyler Stevens? Le bareman?"

"Oui, tu le connais?"

Alexandre acquiesce et éclate d'un rire acerbe. "Crois moi, éloigne toi de ce type avant qu'il ne te foute en l'air aussi."

Il passe une main dans ses cheveux et m'envoie un sourire Colgate en pleine face. Il se détourne, non sans m'envoyer un autre de ses regards brûlants, puis s'en va.

Lorsqu'il disparait de ma vue, je me sens vide.

Comme s'il avait aspiré avec lui le seul sentiment de bonheur que je pouvais contenir.

*

*

*

Voilà pour le chapitre 27, l'avant dernier ! J'ai hate de vous poster le final de ce premier tome et de vous faire découvrir le second.

Ily,
E.