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Vincent étouffa un gémissement lorsque Claudine apparut encore une fois à sa porte. Cela devait être sa quatrième visite de la matinée. Il garda une expression poliment neutre.
- Claudine, que puis-je faire pour vous ?
Il soupira intérieurement alors qu'elle entrait lentement dans son bureau, roulant des hanches de manière suggestive. Ce n'était pas la première fois qu'il souhaitait être sorti en tant que gay à son travail. Au moins, il pourrait lui dire qu'elle faisait fausse route et qu'elle n'avait aucune chance et surtout ainsi, elle arrêterait de flirter avec lui. Cela avait commencé dès le premier jour de son arrivée et maintenant, près de deux semaines plus tard, cela commençait sérieusement à l'agacer.
- Désolée de vous déranger, Vincent, mais j'ai eu quelques appels de certains de nos auteurs qui posaient des questions à propos de leurs dates de sortie.
La voix de Claudine était rauque, et Vincent se demanda si elle pensait que c'était une intonation séduisante.
- J'ai noté leurs coordonnées.
Elle se pencha sur son bureau, posant ses coudes, sa poitrine généreuse menaçant de déborder de son haut en soie qui peinait à la contenir.
- Merci, Claudine, mais vous n'avez pas besoin de venir jusqu'à mon bureau pour me le dire. Vous auriez pu m'appeler ou m'envoyer un mémo pour me donner l'information.
Vincent s'arrangea pour que rien dans sa voix ni dans son expression ne puisse lui donner de fausse impression alors qu'il fixait son visage. Mais, mon Dieu, son envie de lui crier « hey, je suis gay, voudriez-vous juste éloigner vos énormes seins de mon visage ? » était écrasante. Il tendit la main pour récupérer les messages qu'elle avait amenés. Claudine les lui tendit avec une grimace d'extrême réticence.
- Merci, dit-il sincèrement. Je vais m'assurer de les transmettre à Damien. Elle fit la moue et quitta la pièce, donnant à ses hanches des mouvements exagérés en sortant. Lorsqu'il fut certain qu'elle n'était plus à portée de voix, il s'affaissa dans son fauteuil et poussa un profond soupir. Dieu merci, Lizziane  et Beth n'étaient en rien comme elle. En fait, c'était un vrai plaisir de travailler avec toute l'équipe. Vincent avait rapidement apprécié la façon calme de travailler et de parler de Lizziane, les apartés et les taquineries de Rick et les plaisanteries un peu lourdes d'Ed. Et quant à son patron... Vincent  avait vraiment l'impression que son travail occupait toute sa vie, il passait simplement d'un rendez-vous à un autre, occupant ainsi tout son temps et son espace avec son job.
- Elle est pénible, n'est-ce pas ?
Peter s'appuyait contre le chambranle, une tasse de café à la main, une lueur d'amusement distincte sur le visage. Vincent  céda finalement et libéra le gémissement qu'il retenait.
- Est-elle comme ça avec tout le monde ?
Peter se mit à rire.
-Désolé, Vincent , mais cela fait partie des avantages à travailler ici. Claudine court après tous les hommes à un moment ou à un autre.
Il étudia Vincent , par-dessus ses lunettes sans monture.
- Mais elle semble être plus tenace avec vous.
Cela ne contribua pas à le faire sourire.
- Et vous savez ce qui est le pire ? Je suis sûr qu'elle a un petit ami.
Vincent frémit. Assez parlé de Claudine .
- Que puis-je faire pour vous ?
Peter se redressa.
-est-ce que Damien  va bien ? demanda-t-il en plissant le front.
Vincent haussa les sourcils.
- Que voulez-vous dire ?
- Je l'ai aperçu en sortant de la cuisine et je pensais qu'il y avait quelque chose qui n'allait pas. Ce n'est probablement rien, mais...
Ses mots s'estompèrent.
Vincent  s'interrogea. Il n'avait pas parlé à Damien durant la dernière heure. En y repensant, le fait que la porte entre leurs bureaux soit fermée, n'était pas habituel.
- Je vais lui amener un café et voir si je peux en apprendre plus.
Peter lui adressa un sourire de remerciement et s'éloigna ,promptement le laissant seul. Vincent se leva et se dirigea vers la cuisine pour chercher un café pour son patron avant de revenir à son bureau et de s'approcher de la porte commune, frappant doucement. Aucune réponse. Vincent ouvrit la porte et cligna des yeux de surprise. La pièce était sombre, les stores étaient tirés, obscurcissant complètement les fenêtres. Vincent se glissa dans la pièce. Damien  n'était pas à son bureau, il fit le tour de la pièce du regard. Son patron était étendu sur le canapé, les bras sur les yeux.
- Damien  ? demanda-t-il doucement, à peine plus fort qu'un murmure.
    Quelque chose ne tournait pas rond.
Damien  gémit doucement, manifestement de douleur.  Vincent  posa la tasse sur le bureau et s'approcha du canapé, se laissant tomber à genoux à côté de Damien.
- Quel est le problème ?
Il garda une voix aussi douce que possible.
Damien le regarda par en-dessous. Vincent eut le souffle coupé. Malgré l'obscurité de la pièce, il pouvait voir la pâleur de Damien . Ses yeux n'étaient plus que des fentes.
- Migraine.
Le mot était à peine audible.
« Oh, bordel ! ». Vincent  enleva doucement le bras de son patron de ses yeux.
-Bon, dites-moi. Avez-vous une migraine classique ou chronique ?
Lorsque les yeux de Damien  se refermèrent, il plissa le front. Vincent  tenta une approche différente.
- Avez-vous des troubles visuels, des éclairs lumineux, des nausées ou est-ce seulement de la douleur ?
Le front de Damien  se détendit un peu.
- De la douleur. Très forte, cependant.
Il grimaça comme si une nouvelle vague venait de le traverser.
« Bon, migraine classique ». Vincent pouvait gérer ce problématique.
— Avez-vous pris quelque chose pour vous soigner ?
— Je n'ai rien sur moi.
Vincent réfléchit rapidement.
— Très bien. Je vais vous donner quelques analgésiques et je vais vous aider à vous en débarrasser. Tout va bien ?
Damien  lui adressa un petit signe de tête, pratiquement imperceptible. Will se remit sur ses pieds et glissa hors de la pièce, revenant à son bureau, refermant doucement la porte derrière lui. Il prit son téléphone et composa en vitesse le numéro de Beth.
— Beth, auriez-vous encore l'un de ces comprimés que vous avez pris la semaine dernière ?
  La pauvre femme avait été pratiquement à l'agonie la semaine précédente avec un mal de dos et avait finalement été renvoyée chez elle. Vincent savait qu'elle avait dû prendre des analgésiques très puissants. Il croisa mentalement les doigts.
— Oui, Vincent , j'ai en ai deux de côté dans mon sac à main. Pourquoi ? Ça ne va pas ?
Vincent en aurait pleuré de soulagement.
— Je vais bien, c'est Damien qui a un problème. Puis-je les avoir ?
— J'arrive, dit-elle avant de raccrocher.
En quelques minutes, Beth était à sa porte, tenant les deux capsules et un verre d'eau.
— Est-ce une migraine ?
Vincent pouvait voir l'inquiétude dans ses yeux.
— Ça lui arrive de temps en temps, mais ça faisait un bon moment qu'il n'en avait pas souffert.
Vincent la remercia et après avoir pris le verre et les médicaments, et retourna auprès de Damien , dans son bureau. Il s'agenouilla une fois de plus sur le sol à côté de lui.
— Damien , j'ai besoin que vous vous mettiez assis, juste une seconde afin que vous puissiez avaler les comprimés. Êtes-vous allergique à quelque chose ?
Damien gémit faiblement.
—N... Non... J'ai... Juste mal.
Il lutta pour se s'asseoir. Vincent était de tout cœur avec lui. Il savait par ouï-dire que les migraines pouvaient être vraiment douloureuses, mais il n'en avait jamais eu personnellement. Il s'assit à côté de Damien et, après avoir coincé le verre entre ses cuisses, il passa un bras autour de ses épaules pour le soutenir. Il déposa les comprimés dans sa main, puis récupéra le verre, regardant Damien les porter à sa bouche avec lenteur. Après avoir bu un peu d'eau, il se rallongea une fois de plus, et Vincent prit un coussin pour le placer sous la tête de Damien.
—Je vais vous aider, mais vous allez devoir me faire confiance.
La seule réponse de son patron fut un petit gémissement, mais il déplaça lentement sa main pour l'enrouler autour de celle de Vincent et la serrer une fois. C'était suffisant.
— La douleur est-elle située dans une partie spécifique de votre tête ou se répand-elle partout ?
— Partout, fut la réponse feutrée.
Vincent s'en doutait. Il enfonça ses doigts dans la chevelure de Damien , faisant de petits massages en rond, ne restant pas trop longtemps au même endroit. Au début  Damien s'était raidi, puis Vincent le sentit se détendre dans le canapé.
Il se concentra sur sa tâche, appliquant de légères pressions, sachant qu'elles allaient commencer à soulager la douleur. Il perdit toute notion du temps. Damien était reposé, la tête appuyée contre le coussin, sa respiration devenant plus profonde. Vincent arrêta son massage du cuir chevelu, caressant maintenant ses cheveux, d'un mouvement presque tendre. De temps en temps, il frottait son bras ou son dos, lui faisant sentir qu'il n'était pas seul. Vincent n'avait aucune idée de combien de temps il resta assis ainsi, mais finalement, Damien commença à s'agiter, roulant doucement sur le dos et le regardant avec surprise.
— Salut.
Vincent sourit.
— Salut vous-même.
Il garda une voix basse.
— Comment va la tête ?
Damien fronça les sourcils, comme s'il faisait une évaluation de son état.
— Mieux.
Le sourire de Vincent s'élargit.
— Je suis content. Maintenant, restez là tranquillement. Laissez le temps aux analgésiques d'agir. Puis j'irai vous chercher quelque chose à manger. Cela vous aidera également. Damien cligna plusieurs fois des yeux et ouvrit la bouche, voulant protester, mais Vincent mit un doigt sur ses lèvres.
— Aucune protestation.
Damien ferma les yeux pendant une seconde, puis les rouvrit, lui adressa un lent clin d'œil et un petit hochement de tête.
— Merci.
Il ferma de nouveau les yeux. Vincent resta assis dans la salle obscure, content de sentir la chaleur de Damien contre lui de nouveau. Des souvenirs revinrent à sa mémoire. L'époque où il avait tenu Richard comme ça, qui lui adressait le même regard plein de gratitude lorsque la douleur le quittait. Des larmes lui montèrent aux yeux. Il aurait aimé que Richard puisse le voir aujourd'hui. Il aurait été si fier de Vincent. Il ferma les yeux et adressa une prière silencieuse de remerciements à l'homme qui avait changé sa vie. Peut-être qu'un jour, il trouverait le courage de partager cette partie de celle-ci avec Damien . Peut-être.
***
Damien gémit. Il n'allait jamais pouvoir terminer. Il regarda son écran avec exaspération, les mots ne s'enregistrant plus. Comment diable avait-il pu accumuler un tel retard ?
— Faites une pause. S'il vous plaît.
Damien releva brusquement la tête. Vincent était dans l'entrebâillement de leur porte, les bras chargés de dossiers, les yeux fixés sur lui.
Il renifla.
— Je n'ai pas le temps de faire une pause. Ces manuscrits sont arrivés il y a déjà huit semaines.
Chaque écrivain qui en envoyait un s'attendait à recevoir une réponse concernant son travail, pour savoir s'il était retenu. Pour des raisons sur lesquelles il ne voulait pas trop s'appesantir, Damien avait du retard et maintenant, il y avait huit auteurs qui avaient dépassé la date limite. Il regarda sa montre. Il était dix-sept heures trente. Le bureau fermait officiellement à seize heures, mais il était rarement à la maison avant dix-neuf heures. Il poussa un profond soupir. Il n'y pouvait rien. Il devait rester et faire son travail.
Il grogna.
— Oh, merde, j'étais censé dîner avec Melissa ce soir également.
Il ne pouvait pas manquer le sourire sardonique de Vincent . Il se souvint de la première fois où elle s'était présentée à son bureau après que le jeune homme ait commencé à travailler. Melissa s'était présentée elle-même comme étant la petite amie de Damien et Vincent avait été momentanément trop abasourdi pour répondre. Une fois
qu'elle était partie, cependant, les questions avaient commencées. Vincent avait trouvé cela très amusant, le salaud.
— Je vais l'appeler pour annuler. Vous devez rentrer chez vous, dit-il à Vincent. Je vais rester et finir tout ça.
Vincent fronça les sourcils.
— Combien vous en reste-t-il ?
Damien lui répondit.
— Puis-je vous aider ?
Damien soupira.
— C'est une offre très gentille, mais vous savez que je ne délègue pas cette partie de mon travail.
Vincent persista.
—Alors, vous lisez les résumés des histoires, décidez si cela vous semble viable et si c'est le cas, vous lisez le manuscrit ?
Damien acquiesça.
— Et si ce n'est pas le cas, ils rejoignent la pile des « non, merci » ?
Damien sourit.
— Inexact, mais ouais, vous avez à peu près saisi l'idée générale.
— Et ça ne peut pas attendre jusqu'à demain ?
Damien secoua la tête.
— Nous avons déjà dépassé la date limite. Et certains auteurs nous ont déjà adressé des e-mails pour venir aux renseignements.
Il regarda d'un air maussade le fichier sur son écran. Vincent n'avait pas bougé et soudain, Damien céda. « Juste pour cette fois-ci » se dit-il.
— En fait, commença-t-il lentement, vous pourriez m'aider.
— Dites-moi.
— Voulez-vous lire les résumés ? Dites-moi si vous pensez que c'est une histoire que nous pourrions publier ? Ainsi, je ne lirai que ceux que vous pensez convenir.
Quelque chose passa sur le visage de Vincent . Damien se maudit intérieurement. Bien sûr, Vincent devait avoir un client à satisfaire ce soir. Depuis deux mois qu'il avait rejoint la société, Damien n'avait jamais soulevé la question une seule fois. Pour des raisons qu'il ne voulait pas analyser trop profondément, Damien se sentait mal à l'aise avec l'idée que Vincent soit quelque part à se faire baiser. Il lui avait lui-même dit que ce n'était pas ses affaires, tant que son travail n'en était pas affecté. Et à ce sujet, il n'avait que des éloges à lui adresser. Vincent était un véritable trésor. Ils travaillaient bien ensemble, Vincent anticipant souvent ses exigences avant même qu'il n'ait eu la chance de prononcer un seul mot. Mais cela n'arrêta pas la pensée qui se glissa dans le cerveau de Damien avec une régularité inquiétante. « Pourquoi ne pas passer une autre nuit avec lui ? Tu sais que tu le veux. » Le vouloir  était une chose. Le faire en était une autre, complètement différente. Damien repoussa l'idée de côté. Mieux valait garder les choses sur un terrain strictement professionnel, même si son ouverture se serra à l'idée que Vincent le prenne à nouveau.
Et maintenant, il avait clairement mis Vincent dans une position inconfortable.
— Écoutez si cela va être un problème, pas de soucis. Rentrez chez vous.
Vincent serra ses lèvres.
— Nan, c'est bon. J'ai juste un coup de fil à passer en premier et ça ira.
Damien hocha la tête bien que sa poitrine soit comprimée. « Ouais, Vincent était supposé « travailler » ce soir. Tu sais pourtant que je ne veux pas du tout être au courant de tout ça ».
— Très bien, merci. Passez votre coup de fil et je vais aller nous chercher un peu de café. Vous avez l'air d'en avoir bien besoin.
Vincent lui adressa un bref hochement de tête et sortit du bureau. Damien regarda son écran, son esprit focalisé non pas sur les informations devant lui, mais sur Vincent. Intérieurement, il se réprimanda. « Et merde, pourquoi cela a-t-il de l'importance pour toi de savoir s'il allait baiser un gars quelconque ce soir ? ». Damien ne pouvait pas se l'expliquer. Sa nuit passée avec Vincent s'attardait encore dans sa mémoire. Peut-être qu'il était temps qu'il fasse de nouveau appel aux services proposés par Jenny. « J'ai besoin de m'envoyer en l'air. Après tout, cela fait deux mois depuis que... ». Ouais. Depuis Vincent. Damien fronça les sourcils. Il semblait que son esprit ait un défaut en ce moment. Chaque pensée semblait le ramener à son magnifique assistant personnel.
Travailler avec Vincent était facile. Ils étaient parfaitement connectés. Mais cela ne l'empêchait pas de le regarder à chaque fois qu'il en avait l'occasion, généralement lorsqu'il était sûr que Vincent était absorbé par une tâche quelconque. Deux mois n'avaient pas diminué l'impact de cette première rencontre. Damien aimait la façon dont il se mordillait la lèvre inférieure lorsqu'il était plongé dans ses pensées. Et ces yeux couleur chocolat au lait, il serait s'y facile de s'y noyer. Il se secoua. Assez !
***
— Une pizza était excellente idée !
Damien ne pouvait être que d'accord. Lorsque leurs deux estomacs avaient commencé à gronder, il avait pris son téléphone et passé une commande. La pizza à la viande, telle qu'il l'aimait, avait définitivement comblé leur faim et les deux hommes étaient rassasiés, revenant à leurs tâches. Damien devait l'admettre, avoir Vincent pour l'aider était une véritable aubaine. Il avait déjà déposé le manuscrit de trois auteurs sur la pile des rejets. Et celui qu'il tenait entre les mains était un qu'il devait absolument lire ? Merde, c'était agréable. Non pas que Damien le ferait régulièrement, mais les manuscrits lui permettait de rester en contact avec les choses.
Vincent se leva et s'étira, ses longs bras s'élevant loin au-dessus de sa tête. Damien regarda son ventre musclé alors que sa chemise s'était échappée de son pantalon, révélant un aperçu de peau pâle. À la hâte, il détourna ses yeux avant que Vincent ne le remarque.
— Je crois que nous en avons terminé pour ce soir.
Il referma son ordinateur avec un petit soupir. Cinq contrats suivraient le lendemain matin. Et trois d'entre eux concernaient de nouveaux auteurs.
— Je crois qu'ils vont être excellents.
Vincent rentra sa chemise dans son pantalon. Damien regarda sa montre. Bon sang, il était près de vingt-deux heures. Mais au moins, ils avaient tout terminé.
— Mon Dieu, j'ai mal aux épaules.
Il se frotta l'épaule droite, essayant maladroitement de masser son muscle.
— Là, permettez-moi de le faire.
Vincent s'approcha, se tenant derrière son fauteuil et se mit à lui pétrir l'épaule, ses doigts s'enfonçant dans les muscles d'une manière si agréable que Damien se mit à gémir.
— Merde, vous êtes bon à ça.
Vincent eut un petit rire.
— Nous sommes là pour vous satisfaire.
Il travailla les muscles tendus avec ses pouces et Damien laissa tomber sa tête en avant, fermant les yeux, laissant échapper de petits gémissements tandis que les doigts de Vincent opéraient leur magie.
— Vous vous sentez mieux ?
Damien gémit doucement.
— C'est le paradis.
Vincent interrompit sa tâche, puis Damien eut un hoquet de surprise, comme il faisait le tour, se mettant devant lui et glissant sa main sous sa chemise. Il caressa son torse, frottant ses doigts sur le mamelon de Damien.
— Oh, merde ! chuchota Damien. Seigneur, oui !
Vincent déboutonna sa chemise de ses deux mains, puis les glissa de nouveau sur la poitrine de Damien, dans une caresse chaude et sensuelle. Il pouvait sentir la respiration de Vincent contre son oreille.
— Et comme ça ?
Damien frissonna comme Vincent taquinait ses mamelons qui durcirent.
— Oh, oh, mon Dieu, c'est si bon.
Lorsque Vincent recula, il laissa échapper un grognement, jusqu'à ce que le jeune homme le mette sur ses pieds et le propulse vers le canapé, le poussant au bas de son dos. Vincent tomba à genoux à côté de lui et il le dévisagea, les yeux étincelants. Il caressa la poitrine nue de Damien d'une main.
— Je veux t'embrasser.
La voix de Vincent était rauque d'excitation.
Le cœur de Damien fit une embardée.
— Fais-le. Embrasse-moi.
Il tendit la main et saisit la tête de Vincent , le tirant à lui jusqu'à ce que leurs lèvres se rencontrent dans un baiser qui lui coupa le souffle. Il gémit contre la bouche de Vincent, hoquetant lorsqu'il aspira sa langue. Le jeune homme glissa sa main plus bas, jusqu'à ce qu'elle atteigne le pantalon de Damien qui se mit à haleter alors que la fermeture éclair était abaissée et le bouton ouvert. Ne cessant jamais de l'embrasser, glissant sa langue agile profondément dans la bouche de Damien, Vincent enveloppa sa main autour de son membre et le serra.
Damien gémit et Vincent rompit le baiser, continuant sa caresse de sa main le long de son sexe.
— Oui ! siffla Damien lorsque sa queue fut engloutie dans une bouche chaude et humide.
Il durcit instantanément et Vincent commença à le sucer profondément alors qu'il tirait impatiemment sur le pantalon de Damien, le descendant sur ses hanches. Puis il reprit sa tâche sensuelle en saisissant les boules de Damien.
— Oh merde, Vincent! Je ne vais pas durer.
Le jeune homme se mit à rire malgré le sexe qu'il avait dans la bouche « et se mit à fredonner, les vibrations rendant tout beaucoup plus excitant.
Bien trop tôt, Damien sentit qu'il était sur le point de jouir. Il cria et Vincent continua à caresser sa queue avec sa main, ses lèvres serrées autour de la tige, sa tête s'agitant rapidement sur l'aine de Damien.
— J'y suis presque, balbutia Damien, puis il sentit qu'il explosait dans la bouche de Vincent.
Le jeune homme avala tout ce qu'il envoyait, le suçant jusqu'à la dernière goutte, avec de petits gémissements, montrant son plaisir. Damien frissonnait encore lorsqu'il le nettoya avec sa langue, avant de revenir l'embrasser, partageant le goût de son sperme.
Ils s'embrassèrent, cette fois plus langoureusement, les doigts de Damien se déplaçant doucement dans les cheveux courts de Vincent , leurs lèvres pressées les unes contre les autres. Damien se demanda quelle image il devait présenter : torse dénudé, pantalon retroussé jusqu'à mi-cuisse, sa verge couchée mollement contre sa cuisse. Vincent libéra sa bouche dans un soupir.
— Tu as si bon goût.
Damien sentit une rougeur monter de sa poitrine, se répandant dans son cou pour finalement atteindre ses joues.
— Et toi, tu es diabolique.
Vincent eut un petit rire.
— Je ne t'ai pas entendu te plaindre, si ?
Damien renifla.
— Quel homme aurait le bon sens de se plaindre après avoir eu une bonne pipe ?
Vincent afficha un air ravi.
— Heureux de savoir que mes compétences orales sont appréciées.
Il se releva et tendit la main à Damien qui se redressa et referma sa chemise.
— Je te remercie, d'ailleurs, dit-il sincèrement.
Vincent releva les sourcils.
— D'être resté, je veux dire. J'ai vraiment apprécié. Et surtout pour ce qui vient de se passer.
Ses joues rougirent à nouveau.
— Je suis sûr que tu avais un client de prévu pour ce soir, donc je vais te rembourser ce que tu aurais dû toucher. Je ne voudrais pas que tu en sois de ta poche.
Vincent se figea. Il plissa les yeux. L'expression glaciale de son visage fit tambouriner le cœur de Damien dans sa poitrine.
— Vincent ? Qu'est-ce que j'ai dit ?
Vincent verrouilla ses yeux sur les siens. Il regarda son patron en silence, pendant un long moment, si longtemps que Damien commença à s'inquiéter.
—Merci beaucoup. Tu viens tout juste de t'arranger pour que j'aie le sentiment d'être une pute.
Les mots furent lancés d'un ton laconique, mais Damien le vit déglutir, et un frisson le traverser.
Sa mâchoire chuta, ses yeux s'écarquillant.
— Quoi ?
Il ne comprenait pas.
La mâchoire de Vincent se serra.
— Tu n'as pas la moindre putain d'idée de ce que j'avais prévu pour ce soir et en disant ça, tu as fait comme si c'était tout ce que j'étais capable de faire. Baiser des gars.
Il martela ses mots.
— Eh bien, va te faire foutre.
Vincent se releva du canapé et se dirigea vers son bureau, claquant la porte derrière lui.
Damien pâlit. Il se releva et se précipita vers la porte. Lorsqu'il l'ouvrit, Vincent finissait d'enfiler sa veste de costume et ramassait ses clefs.
— Oh, Seigneur, Vincent , je ne voulais pas dire... Je suis désolé...
Vincent l'ignora. Il se tenait là, tremblant, attendant que son ordinateur s'éteigne. Damien s'approcha lentement de lui.
— Vincent , s'il te plaît, ne pars pas. S'il te plaît, je suis tellement désolé.
Son cœur battait la chamade.
«  Oh, Seigneur, dis-moi que je n'ai pas tout foutu en l'air ».
Il regarda Vincent qui restait impassible. De longues secondes s'écoulèrent.
Finalement, le jeune homme le regarda dans les yeux.
— Juste pour que vous le sachiez – non pas que cela soit vos affaires – ce soir, j'étais censé me rendre au centre GLBT pour jeunes de Charing Cross. J'y vais une fois pas semaine pour passer du temps avec les enfants. Nous allons à la piscine, regardons la télévision, discutons la plupart du temps.
Il fixait résolument Damien.
— Vous ne me connaissez pas, Monsieur Campbell.
Damien n'allait pas s'arrêter, pas maintenant que Vincent lui parlait enfin.
— Alors, reviens sur le canapé, assieds-toi et parle-moi. Raconte-moi.
La mâchoire de Vincent était toujours crispée.
— S'il te plaît, Vincent.
Il aurait pu pleurer de soulagement lorsqu'il le vit hocher la tête et les deux hommes retournèrent sur le sofa, dans le bureau de Damien. Vincent s'affala contre les coussins, Damien s'asseyant à côté de lui. Pendant un long moment, ni l'un, ni l'autre ne parla. Le jeune homme regarda le plafond avant de finalement se lancer.
—Tu ne connais pas toute l'histoire, commença-t-il. Alors, peut-être que je devrais expliquer quelque chose qui pourrait rendre tout cela plus facile.
Il se secoua.
— Seigneur, je jure que je ne voulais rien te dire de tout cela, mais... Lorsque j'ai accepté ce job chez J's, c'était en tant qu'escort. J'ai accompagné de nombreuses femmes lors d'évènements, de bals, des choses dans ce genre. Elles se sentaient plus en sécurité en sachant qu'elles étaient avec un gay et qui ne risquait pas de les attaquer ou de les violer à la fin de la soirée.
— Je peux comprendre ça.
Damien ne pouvait détacher ses yeux de Vincent. L'homme avait un regard hanté qui lui mangeait le visage. Il frotta sa main contre sa joue.
— Et puis, il y a environ un mois, avant que toi et moi... grinça-t-il, puis il se racla la gorge. Un mois avant ton anniversaire, Jenny m'a demandé si je voulais faire un peu plus que juste escorter des femmes. Il ne m'a pas fallu bien longtemps pour comprendre que « travailler » signifiait avoir des relations sexuelles. Pour des raisons que je ne vais pas te dévoiler pour l'instant, je n'étais pas très enthousiaste à cette idée, pas même un petit peu, jusqu'à ce qu'elle mentionne ce que je pouvais gagner. Disons simplement que c'était largement plus.
Ses yeux rencontrèrent ceux de Damien pour la première fois depuis le début de cette confession manifestement douloureuse.
— J'ai dit oui.
Les mots étaient chuchotés. Damien tendit le bras et attrapa sa main, la tenant fermement. Il lui adressa un regard reconnaissant avant de poursuivre son histoire, d'une voix de plus en plus ferme.
— Eh bien, quelques semaines se sont écoulées et j'ai continué d'escorter des femmes. J'ai essayé de ne pas penser à ce que j'avais accepté de faire. Jusqu'au jour où Jenny m'a appelé et m'a demandé si j'acceptais d'avoir des relations sexuelles avec un homme vraiment sympathique du nom de Damien.
Damien le regarda.
— J'étais ton premier client ?
Vincent acquiesça.
— Waouh. Et moi qui pensais que tu devais faire cela depuis un certain temps, tu étais si confiant, si assuré. Je ne l'aurais jamais deviné.
Plutôt que de trouver du plaisir dans les paroles de Damien, Vincent semblait très malheureux. Il libéra sa main et se releva, ramassant sa veste de l'endroit où il l'avait abandonnée sur le canapé.
—Je crois que je vais rentrer à la maison maintenant. Je te revois demain.
Vincent avait la gorge serrée.
Damien le regarda avec consternation alors qu'il quittait le bureau, sans jeter un seul coup d'œil en arrière. Pas une seule fois. Damien était perdu. Il resta assis là en repensant à l'histoire de Vincent. Il y avait beaucoup plus au sujet de son assistant qu'il ne l'avait pensé et il soupçonnait qu'il y avait encore plus à venir.
« Ça, c'est s'il revient travailler pour toi que tu le découvriras ». Il ne pouvait pas se retirer cette idée de la tête. Vu l'humeur de Vincent en partant, Damien ne serait pas surpris de trouver sa lettre de démission demain matin sur son bureau. Damien se sentir rougir de honte pour lui avoir donné l'impression qu'il ne valait rien. Le jeune homme n'était pas une pute, c'était plus qu'évident. Damien décida de le faire comprendre à Vincent coûte que coûte – à condition qu'il lui laisse une chance.

Je suis tomber amoureux de mon assistantOù les histoires vivent. Découvrez maintenant