« Et si c'était ça le bonheur, pas même un rêve, pas même une promesse, juste l'instant. »
(Delphine de Vigan, No et moi)
J'ai dormi pour la première fois chez Louis un vendredi soir. Il pleuvait dehors, et un orage était annoncé par toutes les chaînes météo de la ville, si bien que Gemma avait quasiment pleuré au téléphone en me faisant promettre de ne pas chercher à rentrer à la maison - ma soeur pouvait se montrer vraiment excessive parfois, mais là, il fallait avouer que ça m'arrangeait.
Jay avait été tout de suite d'accord et Louis... Et bien fidèle à lui même, il avait juste souri. Après le repas - où j'avais eu l'impression d'être un ogre comparé à eux d'eux qui picoraient plus qu'autre chose - Louis m'avait donné un t-shirt et un short propre, et expliqué le fonctionnement de la douche pour que " je n'en mette pas pleins partout vu que ce connard de jet adore n'en faire qu'à sa tête ". Dix minutes plus tard, je retournais dans la chambre de Louis, propre et sentant le gel douche à la fraise, pour le retrouver étendu de tout son long sur son lit.
•Lou ? Tu vas bien ?
•Hmhm... Qu'est ce que tu penses du monde Harry ?
J'ai levé un sourcil, pas trop sur de ce que je devais répondre. Je m'étais habitué aux question de Louis qui fusaient n'importe quoi et qui pouvaient sembler vraiment étrange parfois mais... Bon. Le monde ? C'était assez flou. Je me suis installé près de lui sur le lit, et je l'ai laissé poser ses mains à plat sur mon ventre. C'était devenu notre geste. Ses paumes sur ma peau.
•Je sais pas. C'est... Vaste. Le monde en lui même, je l'aime, c'est lui qui me permet d'être là... Mais le monde des hommes... C'est compliqué. Je ne peux pas le détester, puisque j'en fais parti, mais il y a des choses qui me le font haïr parfois.
•J'aime bien quand tu parles.
•Heu... Merci ?
•J'aime bien ta voix. Elle me rappelle celle de mon prof d'histoire en sixième.
•C'est à dire ?
•Calme. Grave. Un peu rauque sur certains mots. Articulée. Tu as une voix qui passerait très bien à la radio tu sais ?
•Non, on ne me l'avait jamais dit.
Louis a légèrement souri et ses doigts se sont mis à bouger, glissant le long de mon ventre. Ils étaient moins froids que la dernière fois, un peu moites à cause de l'orage qui rendait l'atmosphère humide.
•On aurait du. Qu'est ce que tu veux faire plus tard ?
•Ba... Présentateur radio !
Il a laissé échapper un petit rire. J'ai tourné la tête et il se mordait la lèvre, les joues un peu rouge. J'avais très envie de l'embrasser.
•Non. Vraiment, c'est une question sérieuse Harry.
•Hm. Je veux... Je voudrais être journaliste. Mais pas à la radio. Je veux écrire.
•Reporter ?
•Ouais.
Il y a eu un petit silence et Louis a fini par hocher la tête.
•Je pense que ça t'irais bien en effet. Tu es doué avec les gens. Tu pourrais faire parler... un mort.
J'ai éclaté de rire et Louis m'a regardé en souriant, avec ce petit éclat dans les yeux, celui que j'aimais tant. Il a retiré ses mains de mon t-shirt et comme l'orage commençait à faire trembler les murs dehors, nous nous sommes glissés dans son lit, serrés l'un contre l'autre. J'ai attrapé sa main et je me suis endormi, la tête contre son cou, respirant son odeur et sa chaleur pour la première fois.
Je me suis réveillé vers deux heures du matin. L'orage était terminé, mais la pluie battait toujours le carreau comme une baguette de tambour. Le bruit était assourdissant. A côté de moi, Louis ne dormait pas non plus. Il était appuyé contre l'oreiller, son calepin à dessin posé sur la couette et... Il dessinait. Je ne percevais pas tout à fait quoi, comme il faisait noir et que je n'étais pas forcément très réveillé mais il avait l'air plus que concentré. Je l'ai regardé faire en silence, admirant la vitesse avec laquelle son poignet glissait sur le papier, traçant des formes troubles qui ne m'inspiraient rien pour le moment. Et pourtant, au fond de moi, je devinais que Louis était en train d'esquisser ici une autre des scènes macabres qui avaient l'air d'encombrer son esprit, et qui me faisaient peur. Je ne voulais pas voir ça.
J'ai tourné la tête et je me suis rendormi, le front posé contre son bras. Froid.

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Hey Angel - Larry Stylinson
Fiksi Penggemar" Je me suis toujours dit que de toute façon, le monde était illogique et que contrairement à tout ce qu'on pouvait dire, non, il ne tournait pas rond. Qu'il y avait des choses totalement indicibles qui s'y déroulaient. Qu'on ne pouvait rien prévoir...