- Gold Sunset -

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     JE N'AI JAMAIS CRU AUX MIRACLES ni en aucune forme de magie. Je ne crois pas non plus en l'amour au premier regard. Ces choses-là n'arrivent que dans les romans à l'eau de rose et dans les films dont les scénaristes sont des désespérés de la vie. Ou bien, il ne leur est jamais arrivé une quelconque forme de malheur. Ils essaient en vain de vendre du rêve, de nous faire croire que les étoiles ont prévu à nous tous, une fin heureuse. Mais c'est faux, certains d'entre nous vagabondent jusqu'à la fin des temps à attendre que l'univers daigne enfin leur accorder un regard et que leur galaxie se mette à briller de mille feux. Seulement, ça n'arrive pas. J'ignore pourquoi, mais le fait est que ça n'arrive tout simplement pas. Alors plus tôt, vous acceptez d'arrêter d'attendre, et mieux c'est.

Je sais tout cela. Je m'y suis même habituée. Ne plus rien espérer. Ne plus rien attendre. « Trop d'espoirs, trop de déceptions ; plus d'attentes, plus de déceptions. » Cette phrase je la connais par cœur, j'ai noirci des feuilles, des murs, mes mains pour la graver à jamais dans ma chair. Je l'ai répétée mentalement, jusqu'à ce qu'elle tourne en rond d'elle-même dans ma tête, telle une prière silencieuse. Elle a transformé la peine en rancœur. Et la rancœur a fini par devenir néant. Pourtant, ça ne m'a pas empêchée de m'attacher. D'espérer à nouveau, que quelque chose de bien puisse arriver. Je ne m'en veux pas vraiment. J'en veux à cette partie faible de moi, d'avoir manigancé dans mon dos sans que je m'en rende compte. Si je pouvais me débarrasser d'une partie de moi, je m'amputerais de cette innocence stupide. Cette enfant qui s'entête à croire que des choses biens arrivent aux gens bien.

Je ne suis pas née pessimiste, mais j'imagine que j'étais appelée à le devenir. Fiona Loadway a donné naissance à sa deuxième fille, June, un vendredi 13. Il était écrit quelque part dans ce foutu ciel, qu'en grandissant, elle finirait par avoir une vision en noir et blanc du monde qui l'entoure. À vrai dire, je ne me rappelle pas de l'élément déclencheur, ça s'est fait petit à petit. Je ne me rappelle pas non plus précisément quand j'ai réalisé à quel point j'avais encore merdé, me laissant sombrer à nouveau dans une dépendance de laquelle je n'allais pas me remettre en un seul morceau.

Cette fois-ci il n'y avait pas de larmes à sécher. Pas de photos à déchirer. Pas de mots à barrer à l'indélébile. Rien à brûler. Rien à regarder à partir en fumée, ni de cendres à éparpiller dans le vent. Il n'y a pas eu de cris, ni de lambeaux d'âme écorchée à vif. En fait, tout ce qu'il y a eu, c'est un chemin qui s'est séparée en deux, et une fille et un garçon qui sont parti dans deux directions opposées. C'est de cette façon que ça s'est terminé.

Après avoir longuement non-pensé à ce qu'il me restait à faire, j'ai pris ma non-décision. J'ai effacé les mots sur mon miroir, croisant me regard vide qui trahissait mes pensées. J'ai enfilé ma veste pour me protéger du froid en cette période de l'année – j'ai toujours été une grande frileuse – et j'ai quitté discrètement ma maison, emportant avec moi le peu de certitude qu'il me restait. Il y avait cette fille qui voulait encore continuer de croire que tout n'était pas perdu. Et puis il y avait cette fille qui ne voulait plus croire que tout n'était pas perdu. Je ne savais plus à laquelle des deux je devais me fier, à laquelle des deux je devais faire confiance. J'ai tenté de faire le vide en respirant l'air frais de ce début de soirée. Sans m'en rendre compte, j'ai rejoint Bridge Park, là où il m'avait embrassée pour la première fois. Je pouvais encore le voir m'attirer contre lui et venir déposer ses lèvres sur les miennes. Je voudrais remonter le temps, l'empêcher de le faire et m'enfuir en courant. Je l'ai regardé faire, mais je n'ai pas agis. J'aurais dû lui crier « MENTEUR ! MENTEUR ! TAIES-TOI !!! », mais je ne l'ai pas fait. Je me suis regardée à nouveau, me faire voler le cœur, par un lâche. Je voudrais être plus forte, mais je suis faible. Et ma faiblesse m'a à nouveau, emmenée dans le gouffre. Alors je suis restée là, dans la nuit à me demander si un jour j'arrêterai de me piéger moi-même. J'ai allumé une cigarette. Recrachant la fumée, j'ai porté mon regard au ciel étoilé. Et lorsque j'ai baissé à nouveau les yeux, j'ai vu ce garçon au loin qui fixait lui aussi le ciel. Il avait l'air de chercher désespérément des réponses là-haut. J'ai ris intérieurement, parce que tous les secrets de l'univers étaient découverts et il ne restait plus rien à trouver ni à comprendre. Puis, il a baissé les yeux à son tour et nos regards se sont croisés intensément. Il a alors continué son chemin et s'est éloigné en direction d'Allen Street.

On m'a dit un jour qu'on ne pouvait retrouver l'amour à l'endroit où on l'a perdu. Et que dit-on à propos de retrouver l'amour à l'endroit où on croyait l'avoir trouvé ? Je crois que cette nuit-là, j'avais déjà ma réponse à cette foutu question.

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Hello mes lecteurs ! Voilà enfin, la suite tant attendue (enfin j'espère) d'Inexplicable Anatomie. Je n'ai plus écrit depuis un bon bout de temps, car trop occupée avec les cours, les amours, la vie tout court. Mais ces derniers temps, je me suis sentie inspirée et j'ai eu envie de mettre quelques idées par papier. Et puis finalement, j'ai écrit ce mini chapitre qui je l'espère vous plaira !

Kiss Kiss. M. E.





Inexplicable AnatomieOù les histoires vivent. Découvrez maintenant