Jack. Chapitre8:

34 3 2
                                    

Lucas:
Je cours, loin de cette absurdité.
C'est impossible. Impossible.
Pourtant, c'était bien un réel: il y'avait bien sur cette terre, dans ce pays, au plus profond de cette ville un taré qui épiait ma sœur. Ma petite sœur. Clara. Ma Clara.
Qui qu'il soit, il m'avait reconnu; j'avais le teint châtain et les yeux foncés de Clara. Nous ne nous ressemblions pas seulement de caractère, mais aussi physiquement.
Je n'entendais qu'un bruit, un seul, couvrant le vacarme assourdissant de la ville: mon cœur.
Il battait fort, très fort.
J'avais ralenti l'allure, faute à mes douleurs au genoux; je ne faisait que courir depuis quelques temps...
Je m'enfonçais à présent dans une vaste fête foraine, où se mélangeait une odeur de brûlé et de barbe-à-papa. Il y'avait une grande roue, des stands plus stupides les uns que les autres, mais je me plaisait bien, ici, mélangé à toutes ces personnes, ces odeurs, ces cris de joies. Je me sentais en sécurité, et c'était la première fois depuis ce fameux jour.
Lorsque je rentrais chez moi, j'avais en tête que mes parents, encore aveuglés par leur chagrin et leur égoïsme, ne se souciaient toujours pas de moi, mais je me trompais; en quelque sorte j'avais finit par les intéresser, car lorsque j'ouvrais la porte doucement, ils étaient là, sur le seuil à m'attendre les bras croisés un sombre rictus appliqué sur leur lèvres serrées telles des portes de prison.
La soirée passa assez vite, c'est vrai, quoi, ils n'avaient rien de concret à me dire, mis à part le fait que je les décevais, que j'étais irresponsable et immature.
Je n'avais pas vraiment faim, alors je montai directement dans ma chambre en feignant de ne pas entendre les remarques de ma mère, portés à voix basses à l'intention de tous hormis la seule personne concernée, moi.
Et c'est avec une grande fatigue que je m'endormais, tenant d'échapper en vain à cette longue journée
«Lucas.»
«Lucas.»
«LUCAS!»
j'ouvre les yeux en sursaut, comme si j'avais reçu un violent coup au thorax, et je bondis sur mes pieds. Mais je manque le sol de peu et me râpe les tibias contre le sol. Je suis à genoux lorsque je vois de grosses bottes genre Boots noir face à mes genoux.
Cette vision m'envahit d'un sentiment horrible, puis je me lève d'un coup sec pour lui faire face.
Mais rien.
Je baisse les yeux à nouveaux et au lieu de voir les même Boots noir posées sur le sol, je vois un Polaroïd en noir et blanc avec de la poussière dessus. Je ne prends même pas la peine de le regarder et je me met à hurler.

«MONTRE TOI ENCULÉ!»

Je n'entends rien au début, puis d'un coup, montant de nul part, un rire sombre me monte à la tête. Il s'insinue en moi tel un poison, remplissant mon être d'une rage intense, celle qu'on traduit par l'expression "vert de rage".
Je retombe à genoux et mes joues se parsèment de larmes chaudes.
Des larmes de rage.
Puis, d'un coup je sens un coups de vent et une rumeur joyeuse, vive.
Des cris d'enfants. Ils jouent.
Je me vois dans une rue, face à une cour de recrée ouverte. Puis d'un coup, tous les cris cessent et je n'en entends qu'un seul, celui d'une petite fille appelant à l'aide, suppliant.
L'instant d'après je vois une allée sombre. Et d'un coup les cris cessent, laissant place au même rire sombre.
Un flash m'apparaît, et cette image reste fixée sur ma rétine.
Celle de mon agresseur.
de SON agresseur.

Lorsque je me réveille, je suis couvert de sueur et l'oreiller à en son centre un rond humide. J'ai pleuré...
Puis d'un coup, tout ça me semble futile, et dépourvu de sens en comparaison à la douleur que je ressent. Une douleur intense au ventre. Puis sans trop comprendre pourquoi, je me jette vers la fenêtre et me débat contre la poignée rouillée.
Merde...
Lorsqu'elle s'ouvre enfin, je m'arcboute contre le rebord et vomit.
Encore.
Au fond de moi, je sais que c'était la vue de ce personnage qui m'avait dégoûté et fait vomir.
Encore et toujours.
Et ce n'est pas près de changer.

Lorsque je me lève, j'ai la tête lourde, comme prise entre deux bras m'enserrant le crâne d'une force malfaisante. Je prends appui sur mes deux jambes et me lance dans un exploit intérieur: descendre prendre mon petit déjeuner.

Lorsque j'arrive à mi-chemin de l'escalier, j'entends la voix de ma mère disant
"Ah qu'est ce qu'il me déçois, venant de lui, je croyais que c'était un enfant sage pas comme tous les autres...
-Bonjour Maman.
-Ah, bonjour Lucas, bien dormi? Ton père et moi parlions de...
-Je sais très bien de qui vous parliez.
-Quoi? Tu étais au courant que Jack avait séché les cours et tu ne m'a rien dit?
-Que.. quoi? Bah non, il a fait ça?
-Il faudrait savoir, Lucas, dit-elle d'un ton las.
Mais je n'en ai que faire de son ton las, Jack avait séché les cours...
Cette phrase résonne dans ma tête lentement, d'une façon obsédante.
Quelque chose cloche. Jack n'aurait jamais fait ça en temps normal, quelque chose perdait de son sens, ici.
Mais je pense que je n'ai pas le temps pour ça.
"Rappelle toi, Lucas, t'as un taré au trousses."
Cette pensée n'a rien d'agréable j'en suis conscient, pourtant, ça me donne la force de sortir de chez moi, mon sac sur l'épaule.
"Tant pis pour le p'tit dej'..."

Jack:
Je me sentais bizarre, hier lorsque j'avais raccompagné Samm, quelque chose en moi restais eveillé, comme si le danger était permanent, mais je ne savais pas quel danger... Et ça, ça me terrifiait.
"Tu es sûre que tu n'auras pas d'ennuis? Je préfère pas, tu vois.
-Mais non, t'inquièt' mes parents s'en foutent, dit elle avec un large sourire qui découvrait le haut de des dents.
Menteuse.
-Sûre de sûre? Je préférais insister, on ne sait jamais, à force, certaines personnes finissaient par lâcher la vérité.
-Ouaip.
-Cool, alors dis-je en souriant et riant à la fois.
Mais dans ma tête, je ne souriais pas. Et je riais encore moins...
Je compris en partie que ce n'était pas un danger qui me menaçait moi, mais plutôt une ombre assez sombre et floue qui la traquait elle. Et c'est en voyant la tête de son père derrière le rideau du salon que tout s'assembla dans ma tête, façon puzzle, laissant au passage un sillons sombre et horrible.
Le danger ne se trouvait pas dehors, mais dedans.
Je m'arrêtais un instant, dévisageant le père de Samm, il me regarda d'un air froid, avec un éclat violent dans le regard, ce genre de regard qui signifie "baisse les yeux ou je te les baisse moi même, et crois moi tu pourra pas les relever après."
Mais je ne cillai pas, au contraire je soutint son regard et fronçai les sourcils.
Je vis les veines de son bras saillir sous sa peau matt, et je vis son poing s'ouvrir. Se fermer.
J'en avais trop vu, et j'étais impuissant. Ma seule réaction fut d'ouvrir mon sac,  d'y pêcher un stylo bic, de prendre le bras à Samm, lui retourner la paume vers le ciel.
"Jack, qu'est c'que tu...
-Tiens, mon numéro, au cas où tu voudrais m'appeler pour me parler.
Pour me dire si oui ou non, il t'as frappé ce soir, pensai-je.
-Ah, merci.
Lorsque j'eût finit, elle me regarda et se balançant d'une jambe sur l'autre elle me dit
"Merci, à demain, Jack."
-De rien, au re...
Mais son père avait déjà claqué la porte.
Je préférais partir maintenant, ne pas risquer d'entendre le moindre bruit suspect, j'étais impuissant et ça me suffisait.
Arrivé chez moi, j'avais eut affaire au même sermon que Lucas une heure avant, qu'elle chance.
Lucas ne vint pas manger ce soir là, ce qui rendit ma mère encore plus désagréable. Et le désagréable, c'était son domaine.
Je ne pu réprimer un faible sourire.

"ET ÇA T'AMUSE CE QUE JE TE DIS?!"

Oups, j'oubliais qu'elle était en train de refaire le monde à sa façon, comme chaque fois que quelque chose qui ne lui plait pas se passe.
Idiot.
"Non, bien sur que non maman."

Cette nuit, je reçu un appel à 00h27
Je décrochais.
"Allo?"
pas de réponse.

LE DIABLE HANTE MON CHEMINOù les histoires vivent. Découvrez maintenant