La terreur sous forme d'image. Chapitre6:

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Lucas:

Je me rendais donc au lycée, malgré les marques toujours présentes sur mon visage. Au pire, mes amis me demanderai ce qu'il m'était arrivé, et je mentirai en disant avoir passé la nuit sur les réseaux sociaux. Ça passera.
J'arrivai donc le premier dans la salle de français. Le prof me regarda d'un regard de biais, se demandant ce que Lucas Wasrull faisait aussi tôt devant sa salle. Le ne le regardait même pas. Lorsque les premiers de ma classe arrivèrent, je me glissai vers le fond de la salle, posa mon sac sur une table quelconque. Tout était quelconque depuis hier.
J'entendis des pas arriver dans ma direction.
Je levai péniblement la tête, que j'avait mît un certain temps à caler dans les plis inconfortables de mon sac.
Ah... Stan.
Stan était le genre de personne à qui on pouvait dire les pire choses, qu'il savait toujours quoi répondre pour remonter le moral. En bref un type bizarre. Je dis bizarre parce que je trouve ça impensable d'être capable de se tirer de chaque mauvais pas, juste grâce à une phrase bien tournée, bien dite, avec la dose juste d'éloquence pour te faire piquer un fard, ou éclater de rire.
À cet instant, j'aurai pu lui dire tout; tout ce qui me tourmentait, qui me prenait la tête. Ce qui me faisait mal, comme si un diable enragé, et qui se régalait de mon malheur eut enfoncé un clou dans la chair de mon crâne. L'enfonçant un peux plus chaque minutes.
Mais le fait qu'il savait toujours quoi dire me stoppa. An quoi bon?
Une vois me revint en mémoire, comme chuchotée par quelqu'un:
"Lorsque vous avez déjà perdu quelqu'un à qui vous teniez, vos saurez ce que l'on ressent. Si tel n'est pas le cas; il ne sert même pas d'essayer."
Je lui balançais donc d'une voix somnolente:
-Hmmm... tu viens de me réveiller, crétin, ouvrant les bras et baillant ouvertement.
-Oups, rendors toi Lucas, le marchand de sable à un rencard.
-Très drôle, t'avance pas avec ton humour je me trompe?
-Non, pas trop.
-Mon pauvre, tu finira par t'en sortir un jour, t'en fais pas.
-Ah, ah, ah. Bon j'te laisse roupiller.
-Ça c'est une super idée.

La vérité fut que je m'endormis dans le brouhaha de la classe en ébullition. Je ne sais pas comment, mais je ne fus pas réveillé par un atroce cauchemar. Non. Juste par Mr Ballgus qui me chuchotait à l'oreille:
"Monsieur Wasrull? Réveillez vous, la porte vous attends gentiment."
Je grognai puis me leva et quitta la salle de français en direction de la vie scolaire. Quel idiot: première heure et déjà exclu.

"C'est pour quoi?"
Demanda la voix aiguë de la CPE.
Je ne sais pas pourquoi, mais je répondit non sans rage mais plus avec amusement.

"Un strip-poker, s'il vous plait."
Ce qu'elle n'apprécia guère.
Je partis en riant vers la salle de colle tandis qu'elle continuait à vociférer des menaces qui se répercutaient dans le vouloir, rebondissant de murs en murs.
Je ne m'en faisait pas trop: mes parents ne me disaient jamais rien.
Je les détestais. Des adultes. Ils se sentent grands, pourtant ils agissent comme des gamins: leur fille meurt, ils préfèrent se renfermer sur eux-mêmes.
Une voix revint me chuchoter à l'oreille; d'un ton provocant:

"C'est vous les monstres; ils ont essayé de vous dire. Mais vous ne les avez pas écoutés.
Personne n'écoute jamais les enfants."
Et c'était vrai. Je pris donc place au fond de la salle et me mît à chantonner:

"I... I wish u could swim.
like the daulphins.
like daulphins can swim.
no nothing, nothing
will keep us together.
oh we could be them
for ever and ever..."

Je ne savais pas quoi faire; partir, m'enfuir de la salle de colle, courir à perdre haleine, ou bien me morfondre ici...
La première solution se révéla être la plus tentante. Mais je finis par me dire que cette solution qui me venait le plus facilement à l'esprit était la plus lâche, et que je cédais à la tentation, par pure faiblesse à chaque fois. Pourtant; ça ne suffit pas à me raisonner.
Je sortis donc, furtivement de la salle de colle, puis du lycée. Je ne savais pas exactement où j'allais. Je suivais mes pas, ma marche certainement plus décidée que mes propres pensées.
Et ce n'est que lorsque je relevai la tête que je vis que j'étais devant une école primaire.
Son école primaire.
À Clara.

Un flash rapide s'insinua dans mon crâne; semant la terreur, la peur, tout. Une odeur de sang, une odeur d'herbe tondue. Un tapis vert avec en son centre un enfant qui dormait paisiblement. Trop paisiblement.
Je revis ses membres coincé dans des angles totalement impossible. J'entendis même le son qu'elle fut lorsqu'elle atterrit au sol. L'affaissement de l'herbe sous son poids. Du sang. Partout. Des cris.
Je secouai la tête hardiment, me prenant le front de mes deux mains, les phalanges appuyées contre mes temps qui battaient la mesure de cette horreur qui était tellement forte que le contrôle m'échappe totalement.
Je finis par me calmer, ignorant mon cœur qui avait doublé de vitesse, faisant circuler le sang trop rapidement dans mon corps.
Pourtant, mon regard se posa sur un homme de taille moyenne, guère plus grand que lui, habillé de noir scrutant la cour de l'école, en surveillant exagérément sa montre, à chaque minute.
Je continuai de le fixer lorsqu'il parti.
Je ne savais pas pourquoi, mais je finit par le suivre, discrètement dans la rue.
Il y'avait quelque chose chez cet homme qui me...chiffonnait...
Il marchait comme s'il était pressé, mais aussi il avait le teint légèrement cramoisi d'une personne énervée.
"Comme l'inspecteur avec Jack."
Cette pensée me fit rire intérieurement.
Je le suivis de cette manière prenant abris derrière des véhicules garés sur le trottoir pendant je ne sais combien de temps.
Nous finîmes par arriver face à un squat, délabré du sous sol au dernier étage. Ma gorge se serra: je m'imaginait bloqué au dernier étage, poursuivit par une personne, je me vit au bord de la fenêtre, hurlant à pleins poumons, cherchant toute l'aide qui se trouvait à proximité. À proximité?
Il n'y avait pas d'habitation aux alentours, seulement des bâtiments dans le même genre, certains même pires. Je ne voulait pas m'imaginer qui vivait ici.

L'Homme en noir, je finit par l'appeler ainsi, entra dans le bâtiment, laissant la portière entrouverte, puis commença à défouler sa colère sur le peux de mobilier qu'il possédait; hurlant de rage:

"Pourquoi?! Pourquoi?!"
Mes pensées étaient mélangées, désordonnées: une voix me disait de courir loin, de m'enfuir loin de ce taré, de sauver ma peau.
L'autre au contraire me disait, à voix de basse, de tout faire pour comprendre.
Comprendre quoi?
Oh, je verrais bien.
J'attendis que l'homme se soit enfoncé un peu plus profond dans le bâtiment pour me faufiler à l'intérieur.
Je l'entendis pester, crachant des injures aux murs. Je me dis à un moment que je comprenais sa fustration: j'avais moi même tout plaqué, m'était enfuit, le jour de la mort de Clara. Mais ce n'était pas de la simple frustation; je percevais de l'amertume, ainsi que de la haine. De la haine profonde. Une haine horriblement perverse.
Au bout d'un moment, lorsqu'il eut la voix cassée, il sortit. Fermant la porte à clef.
J'étais seul. Seul chez un fou. Enfermé.
J'arpentais la pièce principale, frôlant les murs de mes doigts. Les façades portaient les marques des violences de l'Homme en noir. Un frisson se balada le long de ma échine me faisant trembler faiblement.
Il y'avait ici quelque chose de terrifiant. Mais aussi quelque chose qui ne demandait qu'à être révélé...
Lorsque j'arrivai dans la chambre à coucher de l'Homme, je vis sur le mur en face du lit tout une ribambelle de Polaroïds.
Et ce que je vit sur les photos me figea sur place. C'était une enfant, mais pas n'importe laquelle. Elle jouait tantôt à la corde à sauter, tantôt elle courait dans la cour de l'école primaire. Sur une autre on la voyait écrivant sur son cahier, à côté de la fenêtre.
Cet Homme possédait une trentaine de photo d'une enfant. De ma petite sœur. De Clara.

Et j'étais enfermé chez cet homme.
Puis j'entendis le déclic du verrou dans la porte d'entrée.

L'Homme en noir était revenu...

LE DIABLE HANTE MON CHEMINOù les histoires vivent. Découvrez maintenant