Epilogue

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Stéphane, allongé dans le canapé, était gagné par une irrépressible narcose.

Il vit, à travers un épais brouillard obscurcissant son regard, Branif donner une petite fiole à Tolie et l'entendit dire :

- C'est à vous de le faire, Tolie, vous savez ce que nous avons convenu...


Tolie s'approcha de Stéphane en souriant tristement, s'agenouilla devant le canapé et lui glissa le goulot de la minuscule bouteille entre les lèvres. Il aurait voulu résister mais c'était impossible, son corps ne réagissait plus.

Sans un mot elle versa le contenu du flacon dans sa bouche. Cela avait bon goût. Le liquide coula doucement dans sa gorge.


Il crut sentir comme un baiser appuyé qu'elle lui déposait sur le front puis le noir se fit.


- Voilà, dit Branif en reprenant la fiole vide à Tolie. C'est mieux ainsi. Avec ce que j'avais glissé dans son verre, il n'a pu opposer aucune résistance et ne s'est rendu compte de rien. Vous concéderez qu'il n'était de toute façon pas possible de le laisser derrière nous. La preuve :

En disant cela il fouilla les poches de Stéphane et en sortit le manuscrit que celui-ci avait rédigé la veille pour signaler leur présence.

Il montra les feuilles de papier aux deux femmes en secouant la tête de droite à gauche dans un signe qui se voulait réprobateur de la conduite de Stéphane.

Il jeta un regard en coin à Tolie qui baissa aussitôt les yeux.


Plaçant les trois feuilles de papier au dessus de l'évier, sans les lâcher il alluma le feu à l'un des coins. Il tint ce brûlot le plus longtemps possible et lorsque tout fut presque entièrement consummé, le laissa tomber.

Puis il ouvrit le robinet et l'eau entraîna les cendres qui disparurent par la bonde.


- Nous n'allons pas nous appesantir là-dessus, n'est-ce pas ? dit-il. L'incident est clos et sera sans conséquences.

- Et le spectacle était à la hauteur de nos espérances, dit Etrella en souriant.

Tolie aussi avait retrouvé le sourire.

- Il fait désormais grand jour, dit Eston Branif. Je vous propose que nous prenions un petit déjeuner rapide avant de nous mettre sans tarder à la préparation des bagages : départ cet après-midi directement depuis ici, deux jours de pause chez nous le temps de faire les préparatifs et en route pour Paris en 1889 !

- Ce sera aussi en automne ? demanda Tolie.

- Non, au printemps : nous arriverons juste pour l'ouverture de l'exposition universelle, le 6 mai, et resterons 15 jours complets.


Tolie regarda le corps de Stéphane qui semblait dormir dans le canapé.

- Tant mieux, dit-elle doucement. Je trouve l'automne triste.


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FIN



Les passagers de l'automneOù les histoires vivent. Découvrez maintenant