Chapitre 11

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-Pourriez-vous me donner votre nom et prénom, s'il vous plaît ? me demande le médecin.

-Eva Duval, je murmure d'une voix tremblante en fixant mes pieds.

-Et vous ? interroge le médecin à l'attention de Lucas.

-Lucas Durant. Je ne suis pas un membre de sa famille.

Le médecin hoche de la tête et pianote quelques instants sur son clavier d'ordinateur. Lorsqu'il nous fait à nouveau face, il s'adresse à moi :

-Votre mère, Clémence Duval, va bien.

Je sursaute et relève la tête, les yeux pleins d'espoir mais aussi d'incompréhension. Quoi ? Ils ont réussi à la ranimer ? Le médecin, percevant probablement mon trouble, s'explique :

-La personne que vous venez de voir avait le même âge que votre mère mais ce n'était pas elle. Elle devait normalement être transférée en soin intensif mais l'hôpital étant petit et faute de place, nous avons été contraints de la placer temporairement dans une autre chambre. Je suis très sincèrement navré que vous ayez affronté ce spectacle. Et je m'en désole d'autant plus qu'on vous a visiblement mal renseignée quant à la nature de la présence de votre mère ici puisque vous l'avez confondue avec une autre personne. J'imagine que le choc émotionnel a dû être éprouvant d'autant plus que, si j'en crois le dossier de votre mère, vous n'avez plus de père. Encore une fois, je suis vraiment navré. Si cela peut vous rassurer, sachez que votre mère est loin d'être mourante.

J'écarquille de grands yeux. Ma... ma mère n'est pas morte ? J'ose à peine croire ce que je viens d'entendre. Cela me paraît trop beau pour être vrai.

-Mais... je bégaie. Mais alors... Qu'est-ce qu'il lui ait arrivé ?

-Eh bien... reprend le médecin. Il semblerait que votre mère souffre de surmenage. Elle a fait un malaise au moment où elle sortait de chez elle. Une chance car votre voisine l'a vue et a pu immédiatement prévenir les urgences. Elle se repose pour le moment en chambre 58 comme il vous l'a été indiqué à l'accueil.

Il marque une pause et, devant mon air ahuri, il s'explique :

-Les chambres comportent deux lits et peuvent accueillir jusqu'à deux patients. Votre mère était installée sur le lit du fond. J'imagine que votre attention a été portée sur le tragique évènement et que vous n'aviez tout simplement pas vu que votre mère était installée sur le lit du fond. Elle est peut-être encore inconsciente mais vous pourrez tout-de-même aller la voir dans quelques instants. Pour le moment, j'aimerais vous poser quelques questions au sujet de votre mère. Elle semble excessivement fatiguée et, si cela ne vous dérange pas, j'aurais besoin de savoir quelles sont ses activités, combien d'heures travaille-t-elle par jour,...

Je hoche doucement de la tête, peinant encore à me remettre de mes émotions. Lucas se propose de m'attendre au-dehors de la pièce mais je le retiens par le bras. Peut-être a-t-il peur que sa présence ne me gêne, peut-être pense-t-il que les questions que souhaite me poser le médecin ne le concernent pas, mais aujourd'hui il s'est passé bien trop de choses pour qu'il puisse d'avantage rester dans l'ignorance au sujet de ma mère. Aujourd'hui, Lucas a découvert le petit parc qui abrite mon enfance, il m'a emmenée jusqu'à l'hôpital quand j'ai appris que ma mère y était, il m'a accompagnée et m'a rassurée pendant que je me dirigeais jusqu'à la chambre 58, il était là lorsque cette femme est morte sous mes yeux, il était là lorsque j'ai fait une crise, il m'a calmée, consolée, et j'ai pleuré dans ses bras. Moi, la timide qui cache ses sentiments, je me suis involontairement ouverte à lui. Il a le droit d'en savoir d'avantage. Et puis... j'aime bien qu'il soit près de moi. Sa présence me rassure, me calme et me fait du bien. Mais qu'est-ce que je raconte ? Lucas est sympa mais rien de plus ! Je ne sors avec lui que pour un stupide défi. L'espace d'un instant, j'avais oublié ce détail. Il n'y aura jamais rien de réel entre nous deux.

Ne me juge pasOù les histoires vivent. Découvrez maintenant