Je m'éloignais rapidement de la maison, encore muette face à la réaction de mon père. L'odeur de l'épurge émanait de mon sac, me rappelant les jours ensoleillés à regarder ma mère s'occuper de ses plantes. Je m'arrêtais à la sortie du rang et me laissais tomber sur le sol. J'avais besoin de reprendre mes esprits. Mes joues étaient encore humides, je ne comprenais pas comment des larmes pouvaient couler alors que je ne ressentais pratiquement rien. Simple humain, ce ne sont que de simple humain. Je pressais mes mains sur ma tête et j'essayais de chasser ces idées qui n'étaient pas les miennes. L'effet de l'élixir se dissipait plus rapidement que je ne l'aurais espéré. Il ne s'était pas manifesté aussi ouvertement depuis une très longue période. J'appuyais ma tête sur mes genoux et je prenais de grandes respirations.
« Zinnaora? » Je sursautais. « Désolé, tu ne m'as pas entendue arriver? » Je secouais la tête et je me relevais et je reculais de quelques pas.
« Ce n'est pas le moment Ezikiel, je n'ai pas vraiment le contrôle en ce moment. » Il fronçait les sourcils, embêté. Je soupirais et passait ma main sur mon visage. Encore un simple humain. Je n'avais pas vu mon frère depuis plusieurs années, il était maintenant plus grand que moi. Ses traits enfantins étaient disparus pour laisser place à un visage plus mature.
« Comment fais-tu pour avoir le contrôle? » Je l'observais, incertaine de ce que je pouvais lui dire.
« À cause de Liraura. » L'incompréhension traversait son visage. « Recule, Ezik, s'il te plaît. » Il fronçait les sourcils et exécutait un mouvement complètement à l'inverse de ce que je lui avais demandé. Il s'approchait rapidement de moi et il entourait ma main de la sienne. La douleur s'étendait le long de mon bras et dans le sien. Il reculait, finalement, de plusieurs pas.
« Pourquoi...? » Il se frottait les mains; une contre l'autre, pendant que je relevais les miennes devant moi en signe d'excuse. Cet affront avait réveillé le Delockdoh. J'inspirais profondément et je me dirigeais vers mon sac rapidement. Je l'échappais sur le sol répandant le contenu à mes pieds.
« C'est hors de mon contrôle, tout le monde qui me touche ressente la même douleur, et moi aussi. » Il se débattait de plus en plus à l'intérieur de moi. Je fermais les yeux et je me concentrais sur ma respiration.
« Zinnaora? » L'incertitude était palpable dans sa voix. Je me penchais pour fouiller dans les objets pour trouver la flasque. « Tes cheveux ont changé de couleur! » Il était trop tard.
« Simple humain! » Je relevais la tête vers lui, j'avais envie de le faire payer. Je me redressais. La peur que je voyais dans ses yeux m'encourageait. Je penchais la tête sur le côté et je relevais la main pour en faire sortir une boule d'éclairs. Ezikiel reculait un peu plus.
« ZINNAORA! » Je tournais la tête rapidement vers la provenance de la voix. Cette interruption était suffisante pour faire perdre le contrôle au Delockdoh. Je me penchais à nouveau pour retrouver la flasque et en buvais quelques gorgées. J'appuyais mes coudes sur mes genoux, pendant que mon regard était rivé sur le sol. « Zinnaora, redresse-toi! » Elle ne m'avait jamais parlé ainsi lorsque j'étais enfant; jamais. Je me redressais, doucement, le regard toujours sur mes pieds. « Qu'est-ce qui te prend de traité ton frère ainsi? »
« Mère... » Elle ne le laissait pas terminer.
« Ne la défends pas! » J'osais, finalement, relever la tête, et observer la personne qui se trouvait devant moi. J'attendais que l'impact de son visage rempli de haine m'affecte, mais je ne ressentais pratiquement rien. Pas de douleur, pas de peine, pas de haine, pas d'envie et encore moins d'ennui.
« Vous croyez que je contrôle tout ça? Que je décide de blesser les gens autour de moi, que je ressens du plaisir à voir les autres souffrir? Que je détruis les gens que j'aime volontairement? » J'avais utilisé ce mot en pensant à Vincent et Leakan, mais j'avais l'impression qu'ici il était vide de sens et qu'il ne voulait rien dire. J'avais seulement un souvenir de la sensation que ça pouvait apporter, comme un mirage, comme un rêve. Je n'étais, moi-même, pas du tout convaincue par mes propres paroles. J'avalais difficilement ma salive, avant de poursuivre. « J'ai déjà accompli beaucoup pour en être ou j'en suis. Mais vous ne savez rien de moi. »
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Zinnaora
FantasiaElle provient d'un monde différent. Même avec son peuple elle est très différente. Là-bas, elle ne ressent pas les émotions et n'agit pas du tout comme ceux qui l'entourent. D'où elle vient, il y a des gens qui partagent leur corps avec des envahis...