Histoire F

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 by Kafka Tamura

Bonne lecture !

La première fois qu'il l'avait remarqué, il y avait plus d'un mois que le lycée avait commencé. Il faut dire que, jusqu'à présent, Aomine ne s'était intéressé, dans sa classe, qu'à Sakurai, et ce, pour deux raisons précises : il était du même club de basket, mais, surtout, il avait toujours des bentos absolument délicieux. Le reste, soyons francs, il s'en foutait.

Donc, c'était plus d'un mois après la rentrée, et il était sans doute le seul à ne pas l'avoir remarqué, même s'il était assis à ses côtés. C'était un jour où il s'ennuyait à mourir – comme tous les jours où il faisait l'effort monstrueux de venir en cours. Il en était à se demander s'il devait sortir l'une de ses nombreuses revues d'idoles lorsque son regard, sans crier gare, se posa à sa droite.

Aomine était placé dans le coin arrière, et, à sa gauche, c'était la grande fenêtre par laquelle il passait la plupart de son temps à regarder. Il fixait alors un point au loin et tombait dans une sorte de transe peuplée, bien souvent, par ses idoles chéries. Au pupitre devant lui, il y avait Sakurai, à qui il portait une attention minime – c'est-à-dire uniquement quand il y avait de la nourriture en jeu.

Ryo, de son prénom, semblait se sentir responsable de lui, et il essayait toujours de le trainer à l'entrainement de basket. Aomine, la plupart du temps, l'ignorait. Il n'irait pas à l'entrainement quand il savait qu'il allait seulement devenir meilleur – il était déjà trop bon à son gout.

Il appréciait donc Sakurai tant et aussi longtemps qu'il n'insistait pas trop. Il l'appelait par son prénom parce que c'était moins de trouble et ne l'approchait que quand ça lui convenait. Le reste du temps, il aurait très bien pu ne pas exister.

C'était ainsi qu'il avait passé ce premier mois depuis la rentrée, à laisser trainer son regard à l'extérieur et, une fois de temps en temps, sur l'adolescent assis devant lui. Par paresse ou par manque d'intérêt, il n'avait jamais vraiment daigné poser son regard sur sa droite.

Ce jour-là, pourtant, était un jour banal. Il n'y avait rien d'anormal, rien de nouveau, mais, malgré tout, Aomine laissa pour la première fois son regard parcourir d'abord la classe, et se dire à quel point il y avait des filles pas jolies pour deux sous et des mecs aussi peu classes que Sakurai. Puis, tout naturellement, ses pupilles tombèrent sur celui qui occupait le pupitre à ses côtés.

Son nom, comme celui de la plupart des gens, lui échappait. Sur le moment, il ne s'en soucia pas tellement non plus – il était habitué à ne pas reconnaitre les gens de toute façon, c'était trop de trouble. Ses yeux fainéants avaient détaillé la silhouette du garçon. Il avait des lunettes et une allure sérieuse. Jusque là, Aomine s'était dit que c'était l'élève modèle de leur classe, et il aurait sans doute arrêté son semblant d'investigation si quelque chose ne l'avait pas titillé.

En effet, après un regard plus approfondi – quoique toujours désintéressé, évidemment –, il avait réalisé qu'il ne prenait pas de notes du professeur. Il avait bien un livre ouvert devant lui, mais il ne s'agissait pas de leur manuel de cours. Aomine plissa les yeux en un effort surhumain, mais il ne put comprendre ce qui s'y trouvait. Tout ce qu'il pouvait reconnaitre, c'était des chiffres et des signes de mathématiques.

Puisque le manuel ne l'intéressait pas, il reporta son observation sur le garçon. Il se tenait droit, le livre bien ouvert sur son pupitre. Ses yeux allaient de la gauche à la droite à une vitesse impressionnante : pour tout dire, il ne s'arrêtait jamais. Aomine remarqua que, chaque fois qu'il tournait une page, il prenait la peine de replacer ses lunettes. Il faisait alors glisser son majeur sur l'arcane de son nez, jusqu'à atteindre efficacement le milieu de ses lunettes qu'il remontait. Aomine remarqua la futilité du geste, car à peine les avait-il replacées qu'elle descendait de nouveau.

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