Chapitre 2 : L'Autre Côté

365 67 47
                                    


Lydia sentit son cœur manquer un battement. Rob laissait sa bouche ouverte, apparemment complètement paralysé par la stupeur. Cette fille s'avançait vers eux, comme si de rien n'était, et son aura d'une magnifique couleur d'or illuminait la rue entière tel un soleil. Elle semblait tellement intense que les deux camarades auraient juré voir le flux de lumière onduler autour d'elle, comme s'il était palpable.

"Celle-là...", bégaya Rob, "Celle-là est Eveillée, pas vrai ?".

Lydia déglutit avec difficulté.

"Je dois bien avouer que je serais surprise du contraire."

Que devaient-ils faire ? Un simple contact avec une aura comme celle-ci, et la leur serait sûrement balayée sur le champ. Néanmoins, cette fille ne semblait pas se préoccuper d'eux, aussi curieux que cela puisse paraître.

"Et c'est quoi...cette couleur ? C'est négatif, ça ?", demanda Rob, commençant à se préparer à fuir.

"Aucune idée. Jamais entendu parler d'une aura dorée. Mais si c'était positif, je suppose qu'on la connaîtrait déjà...", fit son amie, tandis que les pas de l'adolescente la rapprochait de plus en plus d'eux.

Ils devaient prendre une décision. Lydia remarqua soudain l'étrange fait que les auras neutres alentour n'étaient pas affectées par cette formidable source spirituelle. Elle le signala à son compagnon, en ajoutant :

"Peut être qu'elle n'est même pas Eveillée. Il faut qu'on sache ce qu'elle est.".

"Tu te fous de moi ?", protesta Rob immédiatement. "J'approche pas ça, moi !".

"Elle ne fait rien, même aux Gris, je te dis ! On l'approche, et si elle n'est pas Eveillée, on l'emmène de l'Autre Côté, d'accord ?", s'énerva Lydia.

"Toi d'abord.", insista t-il. "Je reste en retrait."

"Froussard !", pesta t-elle entre ses dents, avant de préciser : "Tâche d'être normal.".

Et Lydia avança résolument vers cette fille, l'appréhension lui dévorant les entrailles.

Dix mètres...Cinq mètres...Elle entrait quasiment dans le champ de son aura, espérant que rien de grave ne se passerait... Sa lueur émeraude se mêlait à celle d'un jaune éblouissant, et elle crut un instant qu'elle perdrait toute force psychique, emportée par le souffle d'une tempête.

Mais rien du tout ne se passa. Elle n'avait absolument aucune sensation, et son aura n'avait absolument rien de changé, si ce n'est que l'or étincelant cachait sa belle couleur verte.

Elle était tellement surprise que rien n'arrive qu'elle faillit laisser passer cette fille sans rien faire, mais se reprit au dernier moment :

"Excusez-moi, mademoiselle ?", l'interpella t-elle alors qu'elles venaient de se croiser.

"Hm ?", fit Aurore en se retournant.

Elle devait réfléchir très vite à une improvisation crédible. Elle demanda :

"Vous auriez l'heure s'il-vous-plaît ?"

Ce n'était pas terrible. Elle allait s'en aller l'instant d'après.

"Oui...Il est midi dix.", fit Aurore après un regard vers son poignet. "Mais...", hésita t-elle.

"Oui ?", encouragea Lydia, tendue.

"Ce n'est pas une montre, que vous avez au poignet ?", demanda la jeune fille avec une moue désabusée.

Finalement, ce n'était pas si mal. C'était même l'occasion rêvée. Réagissant au quart de tour, elle envoya rapidement un regard éloquent à Rob, qui se rapprocha.

"Oh, si, mais regardez : elle ne fonctionne plus. Je ne vous aurais pas dérangée pour rien...", minauda Lydia, jouant de son mieux pour gagner du temps, en lui tendant son poignet.

"Ce n'est pas grave !" lança Aurore, et elle s'apprêtait à se remettre en route, quand l'insistance dans le geste de cette femme lui sembla bizarre. Elle ne supportait pas de ne pas savoir. Elle voulait vérifier. Elle jeta un œil à la montre.

Midi dix.

"Mais..." commença t-elle sans comprendre.

Le poignet de Lydia disparut soudainement de son champ de vision. Aurore sentit son bras se faire accrocher violemment. Quelqu'un était passé derrière elle, et la poussait face contre le mur de la rue. Elle le heurta dans un choc douloureux, et voulut protester contre la femme qui l'agressait, et croisa le regard déterminé qu'elle adressait à la personne derrière elle.

Cet instant la troubla, et elle se retourna vivement, sa vision devint extrêmement floue. Elle vit le visage de l'homme qui l'attaquait, et il semblait sans pitié...Elle se faisait kidnapper !

"Hey !" protesta t-elle, "Lâchez-moi ! Au secours !", appela t-elle en criant, espérant s'offrir de l'aide. Mais il n'y avait plus personne autour d'elle, à part ses deux ravisseurs. Les rues de Paris avaient fait place à un genre de couloir en pierre s'étirant sans fin devant eux.

"Personne ne t'écoute ici.", affirma Rob, plantant un regard dur dans les yeux d'Aurore.

"Il va falloir répondre à nos questions. Qui t'envoie ?", interrogea t-il.

L'adolescente s'arrêta de crier un instant, troublée par le ton de l'homme qui l'invectivait. Elle fronça les sourcils, cherchant quoi répondre.

"Qui m'envoie ?...Mais vous êtes tarés, non ? Lâchez moi maintenant et peut-être que je ne porterais pas plainte."

Lydia soupira profondément, avant d'intervenir :

"Rob...Mets-y un peu de tact.", puis se tournant vers Aurore elle ajouta : "Vous êtes bien Éveillée ?"

Elle mit quelques instants à intégrer la question.

"J'ai l'air de dormir ?", fit-elle, sarcastique, "C'est quoi votre problème, à vous deux ?"

"Oh, c'est pas vrai...", se lamenta Rob.

Lydia se retint de placer un "je te l'avais bien dit", puis annonça :

"Bon, on va remédier à ça. On va essayer de comprendre ce qu'est votre Aura. Pour information, l'Eveil est justement l'état qui permet de voir les auras."

D'abord décontenancée, Aurore était maintenant franchement furieuse.

"Super. Vous êtes vraiment pas bien dans votre tête, tous les deux. Une aura, c'est ça ? Je vous préviens, si votre "éveil" a un rapport avec des substances illicites, ça ne m'intéresse pas du tout.".

"Génial, une sceptique, en plus !", se lamenta Rob.

"C'est un job pour les Bleus.", déclara Lydia.

"On ne l'emmène pas voir Blanche ?", suggéra son coéquipier.

"Trop dangereux.", rétorqua Lydia, "Elle pourrait toujours feindre de ne pas être Éveillée."

"Tu as raison...Allez ! On l'emmène.", fit-il alors.

"Non.", dit simplement Aurore. "Je ne vais nulle part. Vous me lâchez, et je m'en vais maintenant."

Rob se pencha alors à terre, et ramassa une sorte de grande plaque en pierre trouée de deux cercles. Lydia resserra son étreinte sur ses bras, et lui fit enfiler l'étrange objet, qui agit comme d'énorme menottes.

"C'est censé restreindre ton aura, cette pierre les absorbe.", expliqua Rob.

Aurore ne voulut rien entendre :

"Libérez-moi tout de suite ! Vous n'avez pas le droit de faire ça !", hurla t-elle tandis qu'ils l'emportaient le long du couloir gris et froid...

Mais Rob avait raison, personne ne l'entendrait, de l'Autre Côté. 

AuraOù les histoires vivent. Découvrez maintenant