Ce récit participe au concours #DG Contest
Il pénétra dans la grotte. Dehors s'étalait un ciel d'incendie. Noir et incandescent. Dense et épais comme du charbon. Chaud et brûlant comme les Enfers. Un ciel chargé de braises et de cendres.
Une profonde capuche lui protégeait et lui masquait le visage. Elle se prolongeait par une longue cape qui le couvrait jusqu'à mi-mollet. Les larges pans de tissu s'ouvrirent dans un accès de toux et dévoilèrent son lourd fardeau : une femme qu'il serrait contre lui.
Elle se remit à tousser. Tout son corps était secoué par l'effort. Ses frissons se répétèrent encore et encore. Il tenta de l'allonger, mais elle lui résista. Brûlante de fièvre, elle ne voulait pas se perdre dans la solitude et la froideur de son seul corps. Elle gémit donc en se sentant extirpée de la chaleur et de la vie de celui qui l'avait portée.
Il finit pourtant par l'installer à terre. Il récupéra les armes et les pierres incantatoires de la jeune femme, puis fouilla ses affaires contenues dans la petite sacoche à sa ceinture. Enfin, il entreprit de défaire le plastron de l'armure de l'agonisante dont la résistance faiblissait à chaque nouvelle seconde.
Ses mains étaient couvertes de sang. Le leur et celui de leurs ennemis. Le liquide écarlate sourdait de chacune des blessures de la guerrière. Le poison de son âme devait rapidement être extirpé hors de son corps.
Il écarta les pans de la chemise qu'elle portait sous son harnachement d'acier, et dévoila le bas de sa gorge. Dans un sursaut, elle tenta de l'empêcher d'agir, mais l'implacable gantelet de la silhouette qui la dominait la maintint fermement au sol. De sa main libre, il tendit un cristal. Au cœur de la petite pierre octogonale, les teintes se mélangèrent en un maelström où un gris acier s'imposa soudain en note dominatrice.
Elle hurla. Elle se débattit.
D'un mot de pouvoir jaillissant de ses lèvres cyanosées, elle amorça un puissant sortilège de vent, mais elle ne put l'achever, frappée par l'emprise de la pierre d'incantation. Violemment, tous ses muscles se relâchèrent. Elle s'endormit instantanément.
Il caressa son beau visage, tentant de lisser la souffrance qui pouvait encore se refléter dans son sommeil artificiel. Puis, il déboucha le flacon qu'il venait de sortir d'une poche de sa cape. Il extirpa de ses mains gantées la fleur épineuse et rabougrie que la fiole contenait.
Sans hésitation, il en appliqua la tige contre la peau nue de la guerrière blessée. La plante réagit tout de suite. Les pétales noirs frémirent. Aussitôt, de nouvelles racines acérées se développèrent et transpercèrent la poitrine découverte.
Elle marqua un violent sursaut dans son sommeil. Dans son cauchemar...
Ses paupières s'ouvrirent.
Ses mains se refermèrent convulsivement sur la fleur carnivore qui plongeait dans son cœur. Puis, privés de force, ses doigts se détendirent légèrement.
Il déboucha un autre récipient. Il en souffla le contenu vers la jeune femme endormie. Une poudre lilas la recouvrit. D'un nouveau cristal, jaillit un sort de glace. Il fit soudain un froid hivernal dans toute la grotte. Il s'éloigna d'un pas de la guerrière.
Du givre couvrait déjà sa peau, ses cils, ses habits, son armure. Rapidement, elle gît dans un cercueil de gel.
L'homme revint s'agenouiller à son côté. Il prononça un mot de pouvoir et d'un index de feu incandescent, il écrivit dans la glace. Celle-ci grésilla sous l'attaque des lettres de braise et dessina les entrelacs et arabesques complexes de deux courtes phrases en Haute Langue. Les gouttelettes d'eau glacée suintèrent sous l'écriture de flammes, dévalèrent les flancs lisses du cercueil et tombèrent à ses pieds avec cette régularité implacable du temps que rien n'arrête, ni ne rattrape.
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Perfume of Time (VF)
FantasyJe m'appelle Leen. Leen Ylvolv. J'ai vingt ans, à moins que j'en compte plutôt deux cents. J'ai été extirpée de mon cercueil de glace par un jeune chevalier du Feu fasciné par mon mystère et par mon charme. J'ai donc rouvert les yeux dans un monde...