Chapitre 39 : Résignation

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J'étais face à la paroi de l'hovercraft, le front posé sur la surface lisse de cette dernière que toutes les larmes sortaient de mon corps. Était-ce trop demander d'être libre et de se voir promettre un avenir ? A force de beugler dans l'hovercraft depuis plusieurs minutes, Derek s'arrêta enfin à bout de souffle quand il m'eut trouvée. De toute façon, l'engin n'était pas bien grand, donc je ne pouvais pas énormément me cacher pour être en paix.

Il avait fallu quatre hovercrafts pour tous nous déplacer. Je n'avais pas été dans le même que Kai et Nolan, mais sur le coup, je n'y avais aucunement prêté une quelconque attention. J'avais juste repéré Derek, et plusieurs de mes compagnons, donc je n'étais pas perdue. Mais là, tout de suite, je rêvais de trouver les bras de Kai, tout en sachant que je ne pourrais pas.

— Léane, arrête de pleurer !

Je lui lançai un regard noir. Merci pour cet ordre, Derek ! Oui, j'estimais avoir quand même le droit d'être déçue et de pleurer ! Car j'en avais bavé, j'avais éprouvé toutes sortes de maux et combattu pendant des mois, des longs mois. Et quand j'avais cru que tout serait terminé, les éléments recommençaient, comme une boucle infinie et infernale. J'avais survécu pour rien, je m'étais accrochée aveuglement à l'espoir alors que je n'aurais pas dû, j'avais marché des centaines de kilomètres pour de nouveau revenir à mon point de départ ! C'était pire que frustrant.

— Oh, écoute-moi ! cria Derek en me secouant les épaules.

Je me retournais violemment face à lui, et je ne savais pas ce qui m'avait empêché de le gifler ce jour-là. Sans doute le fait que je le respectais énormément. Sans que je ne m'y attende, il m'attira vers lui et me serra contre son corps imposant. Par ce geste, je me rappelai que je n'étais pas seule dans cette détresse. Peu à peu, l'homme face à moi semblait prendre une partie de ma tristesse. Et dire que sa silhouette impressionnante m'avait effrayé le premier jour...

— Écoute-moi bien, murmura-t-il en encadrant mon visage par ses mains immenses. Marcello a raison. On ne peut pas arriver comme des fleurs alors que nous sommes des criminels. Parce ce que c'est ce que nous sommes, des criminels. Mais peu importe ce que nous sommes, être là-bas, c'est toujours mieux que d'être bombardés dans les États-Unis par les Russes. Mais n'oublie pas le plus important. L'Amérique du Sud, c'est différent de tout ce que tu as connu. Les pays de l'UNASUR sont des pays développés, comme il en existait avant, avec une justice moderne. On aura probablement droit à des avocats et on sera défendus. Les prisons seront différentes, les peines bien différentes de tout ce que l'on a connu jusque-là.

— Tu mens...

Je sentais ses mains se poser derrière mon crâne, tandis que je continuai à pleurer contre son épaule. Je ne voulais pas y croire. Pourquoi donneraient-ils des avocats à des prisonniers qui s'étaient échappés et qui venaient les emmerder sur leur pays ?

— Il n'y a pas de peine de mort dans l'UNASUR. Marcello m'a dit que là-bas, les prisonniers sont amenés à Porto Rico, c'est l'île qui sert de prison centrale à tous leurs États. Les prisonniers coulent leurs peines en travaillant, dans les champs, des usines, des entreprises de service. Crois-moi, il y a beaucoup plus malheureux. Mais on ne sera pas tous condamnés là-bas, plusieurs seront graciés car leurs actes ne sont pas des motifs sévères ou auraient déjà purgé l'équivalent de leurs peines.

Il voulait me rassurer, je le savais. Il espérait sans doute que je ne reconnaisse pas ce que cela impliquait. Oui, il avait une justice, visiblement plus douce que celle de la dictature du Nouvel Empire Russe. Certains ayant commis des délits mineurs seraient graciés, car ils ne seraient pas condamnés à la prison s'ils avaient vécu dans l'UNASUR. Mais je comprenais ce que cela signifiait complètement, et cela me donna encore plus envie d'éclater en sanglots et d'extérioriser ma rage. Derek l'avait compris quand je le sentis me défaire de son emprise et quand sa main vint essuyer les larmes sur mes joues.

ArizonaOù les histoires vivent. Découvrez maintenant