Chapitre 41 : Amaury

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J'étais sortie de la salle de bain et avais couru le plus vite possible avec mes jambes frêles jusqu'à ma chambre. Je ne voulais voir personne. De plus, j'avais dû remettre mes vêtements sales, n'ayant pas encore eu le nécessaire pour se changer ici. Pour la première fois, cela m'était humiliant. J'espérais qu'on allait nous apporter des vêtements propres comme ceux des onze autres prisonniers.

Allongée sur mon lit, la fraîcheur de mes cheveux humides me faisait du bien, comparée à la chaleur constante que j'avais connu les mois auparavant. J'attendais. Je ne savais pas quoi, mais je demeurais perpétuellement immobile. Je ne voulais pas de cette mort. Et pourtant, chaque fois que mes yeux se portaient sur une partie de mon corps, la vérité me frappait. Pourquoi ne m'en étais-je pas rendue compte avant ? Pourquoi cela me marquait seulement aujourd'hui, d'une façon trop brutale à supporter ? Je fermais mes yeux. J'imaginais la mort loin de moi. Tout était noir. Tout.

J'ouvrais délicatement les paupières et mes yeux qui furent soudainement agressées par la lumière environnante. J'étirais mes membres endoloris, grimaçant de mes courbatures aux mollets qui ne me quittaient pas depuis mes six semaines de marche intensive. Le lit à côté du mien était occupé par ma charmante colocataire, qui dormait encore.

J'avais réussi à dormir pendant une nuit complète. Un exploit que je n'aurais jamais cru possible. Je devais être épuisée et devais en avoir vraiment besoin. Je me levais délicatement, n'ayant pas envie de m'attarder dans une pièce avec Karin, et sortis dehors. Je regardais de longues minutes toutes les couleurs autours de moi, ayant encore du mal à réaliser où j'étais, avant de poser mes yeux sur le bâtiment orange en face. Une énorme horloge ornait sa façade, au-dessus de la porte d'entrée. Il était huit heures trente-sept exactement. Si j'avais dormi depuis la veille après dîner, je devais aligner presque un tour de cadran de sommeil. Au camp en Arizona, dormir six heures d'un bon sommeil était un miracle. 

Encore un peu déboussolée par ma longue nuit, je ne savais plus trop où aller, alors mon estomac répondit avant mon cerveau. J'avais faim. Et je voulais grossir. J'entrais donc dans le bâtiment central et son réfectoire, pour commander sur un écran tactile. Je remarquai que la plupart de mes amis gardaient le rythme du camp et étaient levés depuis tôt ce matin. Je les rejoignais, heureuse de les retrouver.

Derek touillait son café, le regard perdu. Il n'était pas du matin, et tout allait bien tant qu'il n'ouvrait pas la bouche. Kai et Nolan se moquaient de lui, avant de reporter leur attention sur leurs tartelettes aux fruits, sans doute craignant que notre ours mal léché leur fasse une réflexion. Je buvais doucement mon café, profitant de l'amertume de ce dernier pour me réveiller un peu plus. C'était même la première fois de ma vie que j'en buvais. Ce n'était pas mauvais. Des biscuits aux céréales et une orange complétaient mon plateau repas. Excepté Derek, la bonne humeur se faisait ressentir dans chaque individu en matinée.

Regardant mes compères, je remarquais que pour l'ensemble, nos visages étaient plus rayonnants et nos mines reposées par rapport aux derniers jours que l'on avait passés. Cette nuit de sommeil dans de vrais lits avait été vraiment bénéfique pour nous tous.

— Tout le monde a l'air d'avoir si bien dormi, remarqua Kai comme s'il lisait dans mes pensées.

— Forcément, après avoir fait sept cent kilomètres pour tes plans fous, lui rétorqua Derek.

— Ouais, mais ça en valait le coup. Il fait frais dans nos chambres, on a des supers matelas et de l'eau courante ! s'exclama notre chef.

Mais on était encore prisonniers, dans l'attente d'être jugés, et d'être probablement renvoyés en prison par la suite. Mais ça, notre chef l'ignorait. Comme la veille, j'ingurgitais en une vitesse éclair mon repas, avant de filer vers les douches. Cependant, j'évitais soigneusement mon reflet, et profitais de l'eau fraîche et propre ainsi que du savon mousseux, heureuse face à ce petit confort qui devenait une des meilleures choses au monde.

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