Chapitre 9

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***

Sebastian :

Je souris en pensant à la signification du prénom Stella : étoile. Je viens de croiser une étoile... filante. Et c'est comme si tout à coup, Petit Bouchon me murmurait à l'oreille :

Fais un vœu, grand frère !

OK ! Je veux la revoir et sortir de là.

Ça fait deux, Seb. Tu triches !

Je sais, Petit Bouchon, je sais... Mais tu connais un meilleur moyen pour obtenir les deux, toi ?

Comme dirait le coach : « Seul, on va plus vite. À deux, on va plus loin. »

Alors si j'accepte de ralentir, jusqu'où vais-je aller avec toi, Stella ?

***

À la cafétéria, au lieu de m'isoler comme à mon habitude pour la pause déjeuner et forte de mes nouvelles résolutions – et des quelques sourires « d'appel » lancés vers Jenny durant toute la matinée –, je m'approche de la table où celle-ci est installée avec sa bande. Je fais abstraction de la surprise qui envahit le visage de ses amis et demande gaiement s'ils accepteraient de me faire une petite place.

— Bien sûr ! répond-elle, souriante. J'avais peur que tu ne te décides jamais...

— J'ai dû vous paraître un peu fuyante, c'est ça ?

— Un peu... ? Quasiment invisible, tu veux dire ?! On pensait d'ailleurs te surnommer Fantômette, me coupe avec gentillesse Brian – je crois – grand gaillard blond, dont j'ai déjà remarqué, et apprécié, l'attitude calme et réservée en cours.

— Tu te souviens sûrement de moi ! Enfin, j'espère... intervient Mark avec un clin d'œil aguicheur. Je suis le rat de bibliothèque.

— Comment t'oublier !? répliqué-je sans pouvoir contenir un petit rire. J'espère que vous ne m'en voudrez pas trop d'avoir été si froide. Mes débuts ici ont été un peu difficiles, le changement entre Boston et Miami est vraiment radical.

— Oh ! Tu viens de Miami ?! J'étais en vacances à Fort Lauderdale pour Thanksgiving ! s'écrie Jenny tout excitée. J'adore la Floride ! Surtout ses plages...

— Mademoiselle aime rôtir au soleil comme une dinde, dit Mark avec malice, tout en lançant un affectueux baiser à Jenny. Elle nous est revenue juste à point, croustillante ! Et toi, Stella, comment as-tu passé les fêtes ?

Mon cerveau a depuis longtemps oublié le concept même du mot « vérité » et, bien qu'un peu gênée, je réponds du tac au tac :

— En famille, comme tout le monde... rien de bien original.

Une fugace pointe d'amertume me transperce. C'est en novembre justement que ma sortie de la clinique psychiatrique a été autorisée... mais je refuse de laisser mon esprit vagabonder sur cette voie, tous les souvenirs de cette période sont profondément enfouis dans ma mémoire, avec pour unique consigne d'y rester à jamais.

— Puisque tu viens juste d'arriver, je serais enchanté de te faire découvrir Boston, continue Mark sans percevoir mon trouble, avant de rajouter, l'air de rien : À moins que ça ne pose un problème avec ton copain ?

— C'est très gentil à toi, merci ! Je vais y réfléchir.

Je l'observe en catimini, restant volontairement vague sur la présence d'un éventuel petit ami dans ma vie. Il est plutôt beau garçon, avec un caractère enjoué qui fait pétiller ses fascinants yeux noisette, pailletés d'or. Sa stature élancée – aux muscles parfaitement dessinés sous sa chemise ajustée –, son maintien ferme et ses gestes retenus envoient des signaux à la danseuse que je suis. Ce gars-là, aussi blagueur soit-il, ne fait pas du hockey comme ses copains... Serait-il lui passionné par le même sport que moi ? C'est plutôt rare.

En tout cas, il est indéniablement charmant... et puis surtout, il est vrai – lui – palpable...

Et voilà ! Un sourire ravageur et des yeux couleur océan s'imposent immédiatement à moi, et un visage – SON visage – se substitue à celui de Mark. Pourquoi Sebastian parasite-t-il ainsi mes pensées ? Ce n'était qu'une hallucination !

Une hallucination, dont lavoix résonne pourtant encore en moi... tellement réelle.    

Voyage InterditOù les histoires vivent. Découvrez maintenant