Voyage Interdit

Chapitre 10

***

Sebastian :

Elle va revenir. Elle va revenir. Elle va...

Il faut qu'elle revienne ! Je n'ose plus sortir de l'appart de peur de la louper...

Jamais je n'ai autant espéré... attendu ! la visite d'une fille, même pas quand j'ai réussi à dégoter ce fameux rendez-vous avec Lauren, LA bombe du lycée !

J'en connais certains qui se bidonneraient de me voir dans cet état. L'avantage de cette situation désespérante, c'est que justement personne ne me voit... à part toi, Stella.

Stella... Reviens, Stella !

***

Au cours de la conversation, Jenny s'aperçoit que nous habitons dans le même quartier et propose aussitôt qu'on s'attende en fin d'après-midi pour prendre le bus ensemble. Tandis que la sonnerie retentit et que nous nous dirigeons vers nos classes respectives dans un joyeux brouhaha, je note avec surprise que ce moment avec eux a été... agréable. Premier pas vers une certaine forme d'insouciance, depuis bien trop longtemps bannie de mon univers.

Dès la fin de mon cours de mandarin, je rejoins ma nouvelle amie dans l'allée qui borde le lycée, sans passer par la case bibliothèque.

— Ça fait un bail que je ne m'étais plus habillée avec autant de couches de vêtements, dis-je en enfonçant profondément mon bonnet sur mes oreilles gelées.

— Tu vas t'y faire ! Mais tu arrives à la plus mauvaise période, reconnaît Jenny, en extirpant de la poche de son jean boy-friend son portable qui sonne. Aujourd'hui, il fait quand même un solide - 25 degrés. Excuse-moi, faut vraiment que je réponde... C'est très important, s'excuse-t-elle après avoir consulté le numéro de l'appelant.

— Vas-y, bien sûr ! Je suis persuadée que le mercure est toujours dans le rouge à Miami, ronchonné-je en regrettant soudain la chaleur accablante de la Floride.

Pendant qu'elle papote au téléphone, je cherche une entrée en matière crédible pour aborder le sujet délicat de Sebastian. L'envie irrépressible d'en apprendre davantage sur lui ne m'a pas quittée de la journée. Mais comment y parvenir sans attirer sa suspicion ?

Je suis tirée de mes réflexions par ses cris de surprises :

— Tu es certain ? Oh, mais c'est super !! Oui, j'y vais tout de suite... Salut.

Au moment même où Jenny raccroche, apparemment ravie de sa conversation, Alexandra – ma chère et acariâtre bimbo – arrive à notre hauteur, cheveux au vent, chaussée de bottes montantes aux talons vertigineux et portant une simple veste de cuir noire cintrée à la taille... Je me demande quel est son truc pour ne pas geler sur place.

La méchanceté et la bêtise tiendraient-elles chaud de nos jours ? ne puis-je m'empêcher de penser en ricanant intérieurement.

Le regard dédaigneux qu'elle me lance au passage me fait regretter ma bonne éducation et me donne envie de lui faire bouffer mon écharpe à pompons.

— J'ai appris que tu organisais une petite fête pour Seb, lance-t-elle de but en blanc en se tournant vers Jenny. Si tu veux de l'aide, surtout n'hésite pas.

— Je vois que les nouvelles vont vite ! Mais je m'en sors très bi...

— Avec les relations de mon père, je pourrais certainement t'éviter bien des tracas, l'interrompt la pimbêche. Et puis... tu sais combien Sebastian compte pour moi !