Voyage Interdit

Chapitre 11

***

Sebastian :

Cette voix... OMG ! YES !! C'est sa voix ! Elle est revenue ! Non, mais que c'est bon de l'entendre à nouveau. J'ai le cœur qui va exploser.

Faut que je me calme ! Un, deux, trois... Ressssspire, Seb, respire !

Oui, voilà... surtout, me calmer ! J'ai pas envie qu'elle disparaisse comme hier soir. Cette fois, je vais la jouer cool et me tenir à carreaux... Surtout ne pas la toucher.

INTERDICTION DE LA TOUCHER !

Dans le salon ! Elle est dans le salon ! Allez, Seb, bouge-toi ! On ne fait pas attendre une d...

Oh merde... qu'est-ce qu'elle est canon ! Comment tu veux que je la touche pas. C'est un appel au crime, une nana pareille...

OK, je préférais clairement la tenue d'hier qui en montrait bien plus, mais même en jean / basket, elle me fait grave craquer !

***

Il arrive tellement rapidement – dérapant dans le couloir dans un horrible couinement de caoutchouc – qu'un sentiment étrange, mais très agréable, me transperce à l'idée qu'il m'attendait sûrement.

Enfin, c'est une possibilité parmi tant d'autres...

— Salut ! s'exclame-t-il, hors d'haleine mais visiblement soulagé. J'avais tellement peur que tu ne reviennes pas ! Tu sais, je comprends toujours pas comment tu peux me voir... T'es la seule, bordel ! La seule personne qui me parle depuis des jours !

— C'est quoi ce délire ?! Tu sais faire des VA, toi aussi ? Comment peux-tu me voir ? Et où est ton corps, d'abord ?! m'écrié-je en même temps que lui, sans même l'écouter ni répondre à son salut – Au diable, ma belle éducation !

— Okaaaay... ! Ce serait sympa de prendre le temps de répondre, chacun à notre tour, aux questions que l'on se pose, non ? intervient-il avec un autre de ses sourires à tomber.

— Tu as raison, dis-je en souriant moi aussi. Qui commence ?

— Eh bien, si nous poursuivions déjà les présentations ? Il me semble t'avoir entendu grogner un très joli prénom lors de ta dernière visite, mais tu n'as pas confirmé... Stella... ?

— Stella, c'est bien ça, oui ! Tu le hurlais à travers tout l'appartement quand je suis repartie. Et si tu veux que tout se passe bien entre nous, souviens-toi d'une chose primordiale... JE NE GROGNE PAS !

À partir de cette seconde, le temps file...

Qui de nous deux est le plus surpris... ou le plus fou ? Lui, quand je lui explique ma façon plutôt inattendue de voyager la nuit ? Ou moi, quand il me raconte qu'il est plongé dans le coma depuis deux semaines ? Peu nous importe, en fait ! Notre folie, nous la vivons à deux maintenant. Terminée l'insupportable solitude, nos cœurs battent à nouveau pour ces instants magiques... Pas question de s'éterniser sur nos passés respectifs, notre accord tacite est d'avancer, dès aujourd'hui !

— Viens, faut que je te montre... murmure-t-il soudain en saisissant ma main.

À nouveau, ces gerbes d'étincelles ! À nouveau, cette envie, ce besoin... qu'il ne me lâche plus jamais. Et cette fois-ci, il ne le fait pas... Peu à peu les éclats s'apaisent, et finalement, seule persiste la plénitude de ne plus me sentir seule.

Dans un immense éclat de rire, il m'entraîne alors dans une cavalcade démentielle, hors de toute notion d'espace ou de temps. Main dans la main, nous traversons les murs en béton armé de son immeuble, puis les dévalons en hurlant, perpendiculaires au sol, comme si aucune des lois de la gravité ne pouvait nous atteindre. Arrivé au rez-de-chaussée, il m'entraîne dans un bond prodigieux, et nous voilà sur le parking privé de sa résidence de standing. Les rues défilent sans que je puisse me repérer. Il court, je cours à ses côtés... rien d'autre ne compte. Le vent glacial fouette mon visage mais sa main chaude qui tient la mienne semble tout compenser. Je n'ai pas froid, je suis vivante !