Chapitre 14

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Le soleil illumine la vallée de ses rayons rasant. La mousse se met à scintiller donnant l'impression que le camp flotte à la surface d'un lac. Les toulghariens se réveillent doucement. Après quelques séances d'étirements, chacun prend sa position, prêt à se mettre en marche vers la montagne noire. La nuit a été calme, y compris dans la base de l'IMU où les hommes sont épuisés après une nuit blanche. Ils savent pourtant que si rien ne s'est passé, ça n'est que partie remise. Marquant le coup, les soldats regagnent leur dortoir l'air déçu, afin de récupérer un peu. Le colonel Savage arpente le long couloir qui mène à sa chambre, le casque sous le bras, d'un pas lourd et dépité. Comme les autres de son équipe, il aurait tant aimé entrer dans l'autre monde. Il sait qu'à cet instant, d'autres enfants viennent de se faire enlever et ne peut s'empêcher de penser à sa fille. D'une main tremblante, il pénètre dans la chambre, pose son casque sur le bureau puis plonge sa main gauche dans la poche de sa veste et en sort la photo de Julie. De mauvaises pensées viennent encombrer sa tête. Aussitôt, il prend son téléphone portable et compose le numéro de son ex-femme. Mais personne ne décroche, au lieu de ça, il tombe sur le répondeur. Le décalage horaire avec la France étant de plus de six heures, il devrait être environ 01 h 00 et tout le monde devrait dormir. D'un pas décidé, il actionne l'interrupteur d'un interphone se situant près de la porte.

— Vous avez demandé quelqu'un mon Colonel ?

— Oui, je voudrais m'entretenir avec le Général, c'est urgent.

— je transmets.

Quelques minutes plus tard, le général O'Brian entre dans la chambre.

Le colonel Savage salue son supérieur.

— Vous m'avez demandé Colonel. Qu'y a-t-il ?

— C'est au sujet de ma fille et mon ex-femme, je n'arrive pas à les joindre. S'il s'est passé quelque chose, dites-le-moi.

L'air jovial le général tente de cacher la vérité, mais il est un piètre comédien. Ses sourcils tremblants et son regard fuyant le trompent. Le colonel n'est pas dupe, il fixe longuement le général comme s'il voulait plonger son regard au fond de son âme. Il sait alors que le pire vient de se passer.

—Ça fait combien de temps, mon général ?

-Je n'ai pas le droit de vous en parler, il en va de la sécurité de la mission, désolé.

Puis il tourne ses talons et quitte la pièce. Face à tant d'incompassion, la colère monte. Son poing se lève brusquement et frappe la porte en métal. La main ensanglantée laisse derrière elle une large emprunte, marquant avec quelle force le colonel vient de vider ses nerfs. Prenant la photo laissée sur le bureau, il l'approche près de sa bouche et embrasse l'image de sa fille, puis l'a dépose sous le filet de son casque lui donnant l'impression qu'elle veillera sur lui tel un ange au-dessus de sa tête. Une longue journée l'attend avant de reprendre sa mission qui à présent, a le gout de la vengeance.

Les milliers de toulghariens se mettent en marche en direction de la montagne noire. Les enfants, grimpés sur leur garou fixe l'horizon qui se dévoile peu à peu. La montagne n'est plus qu'à quelques heures de marche, ils y seront aux premières heures de l'après-midi. Profitant de ce répit, les femmes Alfats distribuent de la nourriture à leur peuple et au reste du groupe. À mesure qu'ils avancent, ils découvrent avec stupéfaction l'immensité de cet endroit maléfique. La végétation se raréfie, ce qui était il y a encore une heure, de la mousse couverte de fleurs, n'est plus qu'un amas de roches volcaniques. Rien ne pousse, une odeur de soufre flotte dans l'air accentuant un peu plus l'impression d'approcher de l'enfer. De temps à autre, les regards des deux jeunes couples s'échangent, voulant simplement dire qu'ils ne veulent pas se quitter. Les garous l'ont bien senti, ils se rapprochent de leurs congénères afin que les adolescents puissent entrer en contact. Peter attrape la main de Linn, la serrant fermement dans la sienne pour ne plus la lâcher. Sven copie son frère, les deux couples se retrouvent, ce qui rend le voyage plus agréable. Lisbeth est restée en tête du groupe concentrée sur son objectif, elle sait qu'elle devra affronter Feulkhan et montrer le plus grand courage. Une dizaine de dragons survolent l'armée toulgharienne avec grâce et volupté. Ils permettent également de signaler un danger longtemps à l'avance. Soudain, ils piquent à quelques centaines de mètres plus loin, tournoyant dans les airs pour indiquer un point, puis reviennent vers Nolhan qui est de par son grand âge et sa stature au sein du groupe, pris comme un leader. Un Elfus les rejoint pour effectuer une traduction. L'un des dragons bat des ailes, ralentissant sa course et se pose en douceur. Des grognements caverneux sortent de sa gueule. L'Elfus situé à proximité de l'oreille du patriarche lui traduit.

Les enfants de Toulghar, tome 1Où les histoires vivent. Découvrez maintenant