La troisième rencontre.

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Outre la chaleur écrasante et les maillots de bain, dans l'ensemble j'avais apprécié mes vacances dans les Landes. Partir un mois m'avait fait du bien et plus encore, j'avais réussi à moins me soucier de mon apparence.

Derrière ces vacances, penser à lui me paraissait moins évident. Je doutais de moi. Assurément, je doutais de nous. Je ne me sentais pas plus amoureuse que ça. Nous nous parlions moins souvent et commencions à épuiser nos sujets de conversation. Je ne savais plus quoi lui dire. Quelques je t'aime par ci par là, quelques compliments et des compte-rendu de mes journées. Je ne l'appelais pas, j'avais horreur de ça.

Il ne me faisait pas remarquer cette distance qui s'installait. Il m'aimait. Il avait besoin de moi. Enfin, c'est ce que je croyais. 《Quand est-ce qu'on se revoit?》 《Quand pourrais-je enfin te reprendre dans mes bras ?》Oui, il devait avoir besoin de moi.

Une lassitude s'instaurait et l'éventualité de se séparer m'apparaissait. Évidemment, je ne lui en ai jamais touché mot. Il m'aimait. Il avait besoin de moi. Comment aurais-je pu lui faire ça ?

Je n'éprouvais plus ce manque. L'absence de messages ne m'inquiétait plus. Je me disais que s'il se lassait, ce n'était pas si grave. Que ça ne me ferait rien.

Si j'avais su.

Je voulais retrouver mon indépendance, ce sentiment de liberté. Etais-je égoïste ? Certes, quelque peu. Mais j'espérais qu'il ne me le reproche pas.

Le 13 août nous convions d'un nouveau rendez-vous (le troisième) pour se voir juste une dernière fois avant de me décider.
Nous voulions changer d'environnement. Paris, lui montrer la chambre dans laquelle j'allais vivre dès la rentrée me semblait être une bonne idée. Il me demanda de venir le chercher directement à sa gare. Malheureusement, ce jour-là, les problèmes de train ne jouèrent pas en notre faveur. J'arrivai avec presque 40 minutes de retard. Quand je le vis, mon cœur ne fit qu'un tour. Je l'embrassai puis il me suivit, toujours aussi silencieux. Une fois sur le quai, je lui demandai comment il se portait pour briser cet instant solennel « Ça va » me répondit-il. « Alors, tu pars en vacances ? » « Oui, je crois » Puis silence complet, de nouveau.
Nous rentrâmes dans le wagon et nous installâmes. Il me contemplait. J'avais le regard qui fuyait. Nous mîmes presque 1 heure pour arriver - entre autre la seule anecdote durant ce trajet fut qu'il me rattrapa à un moment.
Une fois arrivés à bon port, à l'heure du midi, nous partîmes nous acheter un sandwich puis nous rendîmes à ma chambre. Monter les sept étages me parut une éternité.
Une fois sur place, il s'étonna du lieu si rudimentaire, nous avions d'ailleurs du mal à y tenir à deux. Nous nous sommes assis sur mon lit et avons entamé notre repas. Qu'il ne dise rien me déstabilisait. J'avais peur de le regarder, mon corps tout entier s'affolait. J'avais l'impression de manger bizarrement. Une fois terminée, nos regards se croisèrent et il me sauta dessus, littéralement. Il avait envie de moi. Je le lisais dans ses yeux et à la vue de son sourire en coin. Je me laissai faire, bien que je sentais déjà mon corps trembler. J'avais peur, affreusement peur de ne pas lui plaire. Il ne semblait pas hésiter, il savait ce qu'il faisait. Nos corps dénudés, je me sentais de plus en plus mal à l'aise, finalement je n'étais pas prête. Il recula en voyant la panique m'envahir, l'air déçu. Ça y est, je me trouvais bête. Je lui avais fait croire que nous allions le faire et au finale, je venais de tout gâcher. « Une autre fois. » avais-je dis. Il n'avait fait que hocher la tête. Nous nous étions rhabillé et avions quitté la chambre au bout de 2 heures. Sur le trajet du retour, je tentai de lui montrer mon affection pour ne pas qu'il se lasse. Je lui fis quelques baisers et restai la tête posée sur son épaule. Il était ailleurs.
Sur le quai du RER E, il me demanda de le laisser, il était assez tard. J'avais attendu avec lui l'arrivee du train et avais attendu qu'il soit bien à l'intérieur. De sa place, il me fit un signe de la main tandis que j'étais restée sur le banc du quai. Je le regardai, comme si c'était la dernière fois que je le voyais. Et bizarrement, sur l'instant, ça ne me faisait rien.

Si j'avais su.

Le poids des mots.Où les histoires vivent. Découvrez maintenant