Chapitre 4

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Quand je me réveille je suis à l'infirmerie. En tout cas ça y ressemble. Je suis allongée sur un lit recouvert d’un papier blanc. Au-dessus de moi une étagère pleine de médicaments en tout genre est fixée au mur.
Je ne vois personne alors je me lève pour retourner en classe. Lorsqu’une dame vêtue de blanc arrive. L'infirmière.
    — Reste ici, m’intime-t-elle, repose-toi. Tu iras manger avec les autres. Après on verra comment tu te sens.
J’acquiesce en hochant la tête. Elle me répond par un sourire puis se détourne, en direction de la sortie.
    — Attendez ! m’exclamé-je.
    — Oui ?
    — Comment suis-je arrivée ici, enfin je veux dire, qui m'a emmenée là ?
Elle réfléchit un instant, faisant mine d’avoir oublié. Pourtant elle sait, je le lis dans ses pensées.
    — Hum...deux garçons, finit-elle par avouer.
    — Comment ils étaient ? Physiquement j’entends.
Elle semble surprise par ma question et ouvre de grands yeux ronds.
    — Pourquoi veux-tu savoir ça ?
Bonne question... Je vais opter pour une réponse simple et innocente.
    — Je voudrais les remercier !
    — C'est gentil de ta part. Si mes souvenirs sont bons... L'un était blond aux yeux noisette, les cheveux en bataille. Environ 1m75. Je ne l'avais jamais vu, il doit être en seconde, ou nouveau dans l'établissement.
Théo, sans aucun doute.
    — Et l'autre ? insisté-je.
    — Et bien il était brun aux yeux verts. Bien coiffé. Environ 1m80 et plutôt musclé.
Le garçon que j'ai vu avant de tomber dans les pommes je pense. Enfin ça me paraîtrait logique. J’aimerais vraiment savoir qui il est.
    — Je connais le premier, mais le second... Vous ne connaitriez pas son nom, sa classe, enfin quelque chose qui me permettrait de le retrouver ?
Elle a l’air ravie d’être utile à autre chose que de soigner des élèves malades et me fait un grand sourire. Un peu trop grand peut-être.
    — Si bien sûr ! Il s'appelle Esteban Roye, il est en première, à moins qu'il ait redoublé...
    Je vois bien qu’elle ne sait pas si elle doit ajouter quelque chose ou pas, même sans être télépathe, ça se lit sur son visage. Comme ça a l’air intéressant, je lui lance un sourire qui l’encourage à continuer.
— Tu ne peux pas le louper. Il fait craquer toutes les filles du lycée. Cependant aucune ne l’intéresse d'après ce que j'ai pu observer. Bonne chance !
Elle me fait un clin d'œil. Non mais je rêve ! Qu'est-ce qu'elle s'imagine celle-là ? Je ne le connais même pas ce mec. Et puis, tomber amoureuse ce n'est pas vraiment mon truc... Je lâche quand même un dernier merci, histoire d'être polie. Et je retourne m'allonger.

L'infirmière vient me chercher pour que j'aille manger. Mais je n’ai pas faim. Du moins c'est ce que je lui affirme. En réalité, c’est juste que je n’ai pas envie de me retrouver toute seule. Je ne veux surtout pas voir Théo, encore moins s'il s'est fait de nouveaux amis. Il m'a abandonnée alors qu'il savait très bien que j'avais besoin de lui parler, de me soulager d'un poids que j'ai sur le cœur et sur la conscience. Mais non, Monsieur préfère draguer, parce que je le connais, c'est ce qu'il est actuellement en train de faire. Grand bien lui en fasse.

Elle m'oblige tout de même à y aller. Tant mieux. En fait je meurs de faim. Je marche, mais lentement. Parce que je ne suis pas tout à fait remise et que, de toute façon, je ne suis pas si pressée que ça. La cantine est vraiment bruyante, elle est très grande. Je vois une table libre et je m'y installe, seule, évidemment. Je commence à manger; j'ai à peine commencé que je vois Théo se lever de sa table et venir vers moi. Pas question.
    — Dégage, lui ordonné-je d’un ton glacial.
    — Mais...proteste-t-il
    — Dégage j'ai dit !
J'ai parlé un peu fort et tout le monde se retourne, plus par réflexe que par intérêt.
J'ai l'impression qu'il ne comprend pas pourquoi je fais ça. D’abord il ne bouge pas, consterné. Puis finalement il s’en va, l’esprit encore un peu perturbé.

Les gens continuent de me fixer. Cette fois je ne comprends pas... Ok j'ai crié. Ok je n’ai pas été sympa. Ok je ne suis qu’en seconde. Ok personne ne me connait. Ok je suis bizarre. Ok je suis...
    — Je peux manger avec toi ? Mia, c'est ça ?

    Je me retourne instinctivement, sous l'effet du stress.
    Le garçon de tout à l'heure. Si ce que l'infirmière a dit à son sujet est vrai, c'est normal que tout le monde me regarde comme ça... Personne ne me connait, sauf lui, le gars le plus populaire... Les gens doivent s'interroger sur qui je suis.
    — Esteban, c'est ça ? Oui, assieds-toi, il faut que je te dise un truc.

C’est vrai qu’il est plutôt pas mal, même très beau je dois l’avouer. Il a des traits superbement sculptés, et de ce que je peux en voir, son corps aussi.
    — Tu connais déjà mon prénom ? me demande-t-il en adoptant un air surpris alors que je lis dans ses pensées que ça ne le surprend pas le moins du monde.
    — Toi aussi, contre-attaqué-je.
Ma remarque le laisse de marbre, il ne s'attendait pas à ça.
    — Bon alors, tu voulais me dire quoi ? Que je suis parfait ? Merci mais ça je le savais déjà...
Il est aussi très stupide, et beaucoup trop superficiel.
    — Ok c'est bon, casse-toi, lui ordonné-je.
    — Je rigole, détends-toi !
    — J'ai pas vraiment envie de rire tu vois...
    — C’est bon, alors, t’accouche ? s’impatiente-t-il.
    — Merci.
    — C'est tout ? s’écrie-t-il, étonné.
Je n’aime pas les gens comme lui et je ne les aimerai jamais. Il faut toujours qu'ils en fassent des tonnes pour rien. C'est vraiment pénible. Cependant, je décide de rester polie.
    — Oui.
    — Ok...

Puis plus rien. Je mange distraitement mon plat - des pâtes avec du cordon bleu – ne pouvant m’empêcher de me demander pourquoi il est à ma table.
    — Pourquoi es-tu venu manger avec moi ? lui demandé-je innocemment.
    Il s’accorde un instant de réflexion puis pose ses couverts.
    — J’en avais envie. Je te dérange ?
J’aurais aimé lui répondre que oui, mais ça aurait été mentir.
    — Non, chuchoté-je, presque inaudible.
    — L'inverse m'aurait étonné ! Pourquoi tu pleurais tout à l’heure ?
    — Je ne pense pas que ça te regarde.

 Le reste du repas se passe en silence. Je n’ai rien à lui dire moi à ce salaud. Parce que c'est ce qu'il est. Un salaud. Je l'ai vu, entendu. Beaucoup de filles l'ont aimé...Mais il a toujours dit non. Et pas avec tact. Il les a jetées comme de vieilles chaussettes. Après avoir joué avec elles, bien entendu. Pathétique. Beaucoup ont pleuré, certaines se sont même mutilées. Et il en a conscience. Je le déteste, rien que pour ce qu'il leur a fait subir.
J’aurais dû m’en douter. Un garçon aussi beau ne pouvait pas être aimable. C’est dur, mais la vie est comme ça.

Bravo Mia. Premier jour et tu as perdu ton meilleur ami. En plus de ça tu es en froid avec le gars le plus populaire.
Je sens que je vais passer une année géniale...

Je sais, c'est tout.Où les histoires vivent. Découvrez maintenant