Chapitre 8

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Enlacés et comme endormis, ils furent bercés par la mélodie des sanglots. Noah pouvait sentir son épaule se mouiller au rythme des larmes. Petit à petit, la symphonie cessa, et comme dans un rêve, leurs lèvres furent soudainement attirées l'une vers l'autre. Comme si, dans le fond, tel était l'ordre des choses. Embrasser Eden c'était semblable à se jeter dans le feu. Cela ressemblait à ce genre de sentiment qu'on ressent quand on fait quelque chose qu'on ne devrait pas faire. C'était de l'amour crépitant, ça ressemblait à de l'interdit et à une brûlure mortelle. C'était brûlant et Noah ne voulait pas que ça s'arrête. Ses doigts se baladaient dans les cheveux d'Eden et leur baiser redoublait d'intensité. Il avait le cœur en feu, et il brûlait à l'unisson avec celui d'Eden. Leur baiser se consuma à regret. Ils se regardèrent, mis étonnés mis satisfaits, en silence.

- Maintenant je ne sais plus quoi penser. Grogna Eden.

Il fit un sourire niais, heureux d'avoir peut-être réussi à cramer sa décision de le quitter. Eden poussa un soupire, tira une chaise et se laissa mollement tomber dessus.

- Tu es un crétin Noah Johns.

- Merci. Répondit-il en gardant ce stupide sourire.

Elle se leva et entreprit de faire les cent pas.

- Bon, j'imagine que je ne peux pas me débarrasser de toi. Déclara-t-elle, sourcils froncés, perdue dans ses pensées.

- Non.

Il arrêta sa marche infernale et haussa les épaules. Elle sourit enfin et sembla se détendre.

- Alors je ferais avec.

Ils passèrent la nuit ensemble, dans la maison étrangement vide d'Eden où même le silence est assourdissant. Où étaient passé ses parents ? Elle ne parlait jamais de sa famille. En même temps, elle ne parlait jamais de sujet intime. Allongés l'un contre l'autre dans un lit trop grand pour une seule personne, cette absence de vie se faisait ressentir. Comme si, dans cette maison, tout était mort mis à part eux.

- J'aimerais que tu puisses me raconter tous tes secrets. Lui souffla-t-il à l'oreille d'une voix endormie.

Elle ne répondit rien en se contentant de saisir son bras et de l'attirer vers elle pour qu'il le passe autours de ses épaules.

- Je t'aime Eden.

Il y eut un temps de silence. Comme elle se trouvait dos à lui, il ne pouvait voir quelle tête elle faisait. Néanmoins, il devinait facilement son malaise face à sa déclaration. Elle finit par répondre en murmurant :

- Moi aussi. C'est pour ça que je ne peux pas tout te dire.

Elle paraissait triste, encore une fois, et Noah se dit qu'elle venait de passer une grosse journée, alors il ne préféra pas insister. Les rideaux entre-ouverts laissaient passer un rayon de lune qui venait effleurer leur peau. Eden avait peur du noir. Elle laissait toujours une lumière sur son sillage pour ne pas se faire totalement engloutir par les ténèbres. Il s'appuya sur son coude pour se redresser et se pencha pour embrasser les lèvres d'Eden. Une fois leur baiser coupé, elle resta en silence, les yeux se baladant dans le vide. Elle ressemblait à une poupée, s'en était effrayant. Il prit son visage entre ses mains et lui chuchota :

- Tout ira bien maintenant.

Alors elle sourit. Sur le moment, il crut que c'était un sourire sincère, mais en réalité, c'était un sourire de défaite. Parce qu'elle savait. Elle savait ce qui allait s'ensuivre.

Il s'endormit en la serrant fort contre lui, comme pour l'empêcher de partir loin.



Document vidéo

La pièce est éclairée par le soleil, nous sommes en plein jour. On peut distinguer facilement une fille aux cheveux décoiffés, dont les mèches folles partent dans tous les sens. Ses yeux sont d'un vert profond et son sourire a quelque chose d'inexplicable qui vous fend le cœur. Elle parait endormie et a l'air candide. Elle semble si innocente, avec son air coupable.

- Ceux qui m'aiment s'en vont, car je fais fuir ceux que j'aime. Le feu leur fait mal. Et le feu, c'est moi. Avant on était mon frère, mes parents et moi. Puis on a envoyé mon frère a l'internat, pour que mes problèmes ne lui tombent pas dessus, pour que je ne consume pas sa vie, et on s'est retrouvé tous les trois. Puis ensuite, c'était juste moi. C'était beaucoup plus simple comme ça. Me laisser dans une maison tranquille, à l'abri des disputes incessantes de mes parents, qui me rendent visite le plus souvent possible. C'était beaucoup mieux comme ça, pour tout le monde. Mes parents étaient tellement fatigués à cause de moi. Et puis, ces changements fréquents de maisons, au fil des incendies, c'était trop dur. C'est moi qui leur ait dit de me laisser seule. Ca me donne l'impression de les préserver.

D'un geste, elle place ses cheveux derrière ses oreilles, et soupire.

- Je ne sais pas comment je vais faire avec Noah. Stupide journal, stupide caméra à qui je confie tous mes sentiments, je te pose cette question ? Comment faire pour le repousser quand on est irrésistiblement attiré l'un vers l'autre ? J'ai essayé maintes et maintes, mais ça n'a jamais marché. Qu'est-ce qui ne va pas avec ce garçon ? Il ne peut rien faire pour moi.

Un sourire rêveur apparait sur son visage.

- Mais il est si gentil. Il m'apaise. Oui c'est ça, il m'apaise. Mais il ne peut pas me sauver. On ne peut pas reconstruire quelqu'un avec des cendres.

Elle soupire une nouvelle fois et baisse les yeux au sol.

- J'espère qu'il me pardonnera de lui avoir briser le cœur.

Fin de la vidéo



Noah se réveilla avec le vide entre ses bras. Une peur intense l'envahit, peur qu'elle soit partie, peur que ce ne soit qu'un rêve. Cette peur était injustifiée et exagérée, pourtant elle était glaçante. Il se sentit immédiatement rassuré lorsqu'il entendit quelqu'un chanter depuis la cuisine. Il descendit lentement les escaliers et trouva Eden, dansant et chantonnant, en train de préparer le petit déjeuner. Elle se tourna vers lui, une bouteille de jus d'orange à la main, un sourire radieux aux lèvres. Elle était si détendue, si rayonnante. Tout ressemblait à un rêve. Il s'avança, se pencha vers elle et déposa un baiser sur ses lèvres.

- C'est bête que tu sois réveillé, je voulais te faire la surprise. Déclara-t-elle d'une voix douce, en retournant à son activité.

Jamais il ne l'avait vu comme ça. Elle semblait si relaxée, comme si l'on venait de retirer un poids de ses épaules. Il ne put s'empêcher de l'embrasser dans le cou. Elle répondit en riant. Elle terminait le déjeuner quand quelqu'un sonna à la porte.

- J'y vais. Dit-elle en souriant.

Elle sortit de la cuisine, et comme il n'avait rien d'autre à faire dans cette maison inconnue, il la suivit. Ils étaient tous deux en pyjama, mais ça ne semblait pas gêner le moins du monde Eden quand elle ouvrit la porte en grand.

- Eden Johns ? demanda le premier policier qui se tenait face à eux.

Et le second tenait à la main un sac plastique dans lequel reposait un briquet violet. L'arme du crime. L'arme d'Eden.


Les embrasés [Heart on fire]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant