— Rushuna ne me laisse pas, ne m'abandonne pas !! AHAAHAAHH !!
Je me réveillais en sursaut. Toujours le même cauchemar, impossible à oublier. Je la vois me suppliant de la sauver, les mains tendues vers moi, tandis qu'un monstre sans forme rampait vers elle, et commençait à boire son sang. La petite fille courait, courait, s'enfonçant dans un bois noir profond où le linceul blanc devenait rouge sous ses pas, entendant des sanglots et des cris, les visages se déformant. La neige, les larmes, la forêt, tout se transformait en une mer de liquide écarlate et entamait un tourbillon autour d'elle. Elle tandis que des figurants l'observent en riant. Puis je me réveillais enfin de ce supplice. Je me tenais dans mon lit en sueur. Il m'arrivait parfois quand le cauchemar changeait de pleurer et de hurler dans mon sommeil.
Je ne pouvais plus supporter de dormir. Quand cette souffrance prendrait-elle fin ?
Je fus traumatisée par les hommes. J'avais creusé un fossé, une distance de sécurité afin de me préserver. À la suite de cette affaire sordide, je devins froide, fermée. Jamais je n'oublierais le visage monstrueux de l'inconnu qui nous poursuivait pendant cette nuit de ténèbres glaciale de décembre.
Elle était morte en me protégeant. Je pouvais encore apercevoir ses traits figés de souffrance baignés de sang, ses yeux remplis de larmes, m'enjoignant de courir. Il avait achevé ma mère d'une façon si atroce que dans mon sommeil, j'entendais des sanglots, des gémissements, des grincements de dents de douleurs et des éclats de rire infernal. En la voyant morte sur le sol, son corps inerte étendu, j'avais poussé un cri, l'homme m'avait jeté un regard diabolique, puis s'était rué sur moi. Je m'étais défendue avec la rage du désespoir.
Soudain, j'avais senti quelque chose de froid me traverser le bas du ventre, j'avais mordu la main de l'agresseur et m'étais mis à courir aussi vite que possible. Le ciel noir se souviendra de ce crime, tandis que la terre se désaltérerait de l'alliance de la neige de nacre et du sang innocent de ma mère.
Mon père avait disparu, m'abandonnant à mon sort. Ma parenté coréenne ne voulant pas d'un fardeau et d'une enfant portant malheur me plaça dans une famille d'accueil, en évitant tout contact avec moi et mon entourage. Ils subvenaient à mes besoins en envoyant une grosse somme d'argent.
Les gens dans mon nouveau foyer, quoique fort gentils, ne me furent d'aucun secours. Car au fond de moi, j'étais rongée par l'amertume et le remord. Je me détestais, chaque souvenir qui me hantait me glaçait le sang. Je développais alors la soif et le désir d'extérioriser ma peur et ma tristesse sur ceux que je haïssais. Ces jours resteraient les plus sombres et ainsi s'éveilla en moi la fièvre de la vengeance.
Savoir que j'avais été dans l'incapacité de la défendre m'était insupportable. J'avais appelé au secours... Mais, je voyais dans leurs yeux la terreur, les gens fuyaient... J'étais si impuissante. Je déversais ma rage et ma colère en martyrisant tous mes adversaires de combat. Je n'avais plus confiance en personne, l'aide ne pouvait venir que de moi ! Les populations étaient lâches et je les haïssais ! Je prenais beaucoup de plaisir à entendre le sifflement d'une balle. Je l'imaginais traversant le corps de mon ennemie, creusant un trou brûlant dans sa chair, répandant une sensation de calcination. J'appris le maniement des armes à feu, ainsi que les arts martiaux. Depuis mon neuvième anniversaire, je m'entraînais sans relâche. Sur chaque visage croisé, je ne voyais que lui, je me sentais agressé et en danger par tous ceux qui m'approchaient.
Parfois dans la nuit, j'entendais la douce voix de maman, apaisant mon âme et soignant mes blessures. Alors une étincelle d'espoir jaillissait et mon cœur reprenait un peu de son souffle vital. Mais malgré mon antipathie pour les autres, quelque chose en moi me criait d'aider ceux qui en avaient besoin. Si les lésions laissaient des cicatrices, les plaies n'en était pas plus refermées, j'avais refait ma vie sans rien oublier.
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Le Sang Sur La Neige
AcciónElle était si pâle...Je caressais ses cheveux et ses joues... En peu de temps son visage fut recouvert d'une fine couche de givre qui accentua son teint cadavérique. Le sol enneigé rougis par son sang semblait crier vengeance. Mes larmes tombaie...