Chapitre 2 : Le Saut

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Je fus réveillée quelques temps plus tard par les soubresauts du train. Encore engourdie par le sommeil, je trouvai normal le fait que ma tête soit posée sur l'épaule du contrôler. Une fois mes esprits retrouvés, je bondis sur mes pieds,gênée, à deux doigts de m'éjecter à l'autre bout du compartiment. Ma reaction le rendit totalement hilare. 

_ J'attendais que tu te réveilles. J'ai fini ma tournée et maintenant, je suis censé te surveiller. Pour pas que tu t'échappes au prochain arrêt! 

M'échapper. Comme si j'avais une raison, tiens. En dehors de mon père, je n'avais personne. Je me rassis, boudeuse, et il se mit à rire : 

_ Ben dites donc, t'en tire, une jolie tête!

_ Mouais...  

Voyant que je n'étais pas disposée à dire quoi que ce soit, il sortit de sa poche un petit carnet, et crayon et commença à grifonner. Je l'observais du coin de l'oeil : de temps en temps, il levait ses yeux vers moi, comme pour vérifier si je ne m'étais pas fait la malle. 

Au bout d'un moment, il remit le carnet dans sa poche et soupira,  ennuyé. Il regarda sa montre et sourit.

_ C'est à nous dans trente secondes. Tu viens? 

_ On est déjà arrivé? fis-je surprise, car nous n'étions partis que depuis moins d'une heure. 

Il rit de nouveau. Je me mis à l'aimer, son rire. Mais bon, là n'est pas la question. 

_ Mais non, banane, on doit sauter. Dans exactement ... 23 secondes. 

_ ... 

Sauter. J'espérait de tout mon coeur qu'il s'agissait d'une blague, ou d'un simple lapsus. Il m'attrappa le bras sans ménagement, m'entraîna au fond du compartiment et ouvrit d'un seul geste la porte qui normalement donnait sur le quai. Là, elle s'ouvrait sur la campagne environnante et sur le sol qui se déroulait à toute vitesse sous les roues. 

_ À trois, dit-il, mon poignant toujours prisonnier de ses doigts. Un...Deux...Trois! 

D'un mouvement brusque, je me jetai en arrière, m'arrachant à lui. Il tituba et tomba dans le vide. Le train était désormais sur un pont au dessus d'un lac noir à la surface duquel je pus apercevoir les ondes créée par le corps du contrôleur s'enfonçant dans l'eau sombre et calme.

J'étais agenouillée, immobile, les larmes aux yeux.  J'étais soulagée d'avoir échappé à ce supplice. Ou du moins, j'aurais dû l'être : plus j'y pensais, plus les larmes redoublaient. Je ne savais pas pourquoi mais je me sentais toujours attachée à lui et sans le vouloir, je me sentais triste de ne pas avoir sauter, ce qui était un sentiment totalement absurde. J'avais l'impression de l'avoir trahi. Logiquement ce n'était pas possible : il avait voulu me faire sauter d'un train en marche, je n'avais pas à éprouver de remords. Et pourtant... 

Tout cela s'était passé dans ma tête en à peine une demie seconde. Sans m'en rendre compte, je m'étais approchée du pas de la porte et tout à coup, sans vraiment comprendre pourquoi, je me jetai dans le vide. 

"Voilà, j'espère que cela vous a plu! Manifestez-vous, en commentaires, critiques, je veux savoir ce que vous en pensez!!! Bisous XXX!

RéciproqueOù les histoires vivent. Découvrez maintenant