Chapitre 3: Balade à froid

1.4K 84 9
                                    

Le froid me mordait les os, se frayant douloureusement un chemin à travers ma chair. De l'eau. De l'eau partout. Au dessus, en dessous, dans mon souffle, dans ma gorge. Mes pensées étaient engourdies. Je me rappelais d'un saut. J'essayai tant bien que mal de reconstituer le fil de mes pensées. Je ne bougeais presque plus. J'avais arêté de me battre contre les courants glacés qui me malmenaient comme une simple feuille morte. Je me sentais partir.  Tout doucement. Une lente agonie durant laquelle je suffoquai, éperdue de froid. Le noir envahissait peu à peu mon esprit. 

Puis soudain, quelque chose de chaud m'enlaça, quelque chose de vivant, d'appaisant. On mit une main sur mes lèvres et mon nez, comme pour m'étouffe. Mais au lieu de cela, je réspirais aisément. Je ne me posais aucune des mille questions qui tambourinaient dans ma tête : j'étais trop lasse. On me tira vers le bas. Ou le haut, je crois bien. Ma tête fut hors de l'eau, puis mon cou, mes épaules, et bientôt tout mon corps se retrouva allongé sur la terre ferme. Je fus prise d'une quinte de toux effroyable et déversai sur le sol tout ce que mes poumons enflés retenaient de liquide. Je m'assis et ouvris les yeux, complètement sonnée. Je reprennais lentement mes esprits, regardant aux alentours.  Le soleil était encore à son zénith et projetait ses rayons sur l'eau calme d'un immence lac, à peine agité par mon plongeon. Un pont, destiné à une voix ferrée, le traversait. Ce fut alors que je me souvins : le saut, la peur, le contrôleur... Le contrôleur? Mais où était-il encore passé celui-là? 

Je finis par l'apercevoir,assis pas très loin, trempé, gardant son éternel sourire malgré la fatigue qui lui courbait le dos. Je faillis l'étrangler ; heureusement il m'en empêcha juste à temps, d'un simple geste de la main qui me vexa et me fit sentir comme la pire des incapables. À défaut de frapper, je hurlai :

_ Mais t'es complètement malade! D'où tu forces les gens à sauter d'un train?

_ Je ne t'y avais pas forcé, tu as décidé toute seule! protesta-t-il.

Je restai quelques secondes sans bouger, la bouche béante face à cette réflexion mi-vraie, mi-fausse. Je me mis à fouiller dans mes poches :

_ Cette fois j'en ai marre, j'appelle la police.

C'était sans compter sur mon téléphone, complètement détrempé, qui émétait de pauvres gargouillis sordides. Exaspérée, je lançai la pauvre chose dans les fourés et résolu de retrouver le chemin de la civilisation. Seule.

_ Au fait, dit une voix derrière moi, moi c'est Julien. Et derien.

Le vent cinglant me giflai et rendait insuportables mes habits trempés. Nous étions cernés pas une forêt dense et je me décidai à suivre la direction qu'avait pris le train. Je sentis une main qui me tirait en arrière. 

_ T'arrrête tes bêtises maintenant, lança Julien d'un ton étonnemment brusque. Enlève-moi ça. 

Eh bien, il voulait que je me déshabille, maintenant. Je voulu le gifler, il m'en empêcha encore une fois. Je me promis de réussir à le frapper un de ces jours. 

_ Si tu gardes des vêtements mouillés, tu vas attraper la crève! Enlève au moins ton haut et mets ça. 

Il me donna sa veste, une chose bleue sombre trop grande pour moi qui avait miraculeusement eu le temps de sêcher. Je la pris de mauvaise grâce et croisai les bras. Il leva les yeux au ciel et se retourna, me laissant me changer. Je retirai mon T-shirt, l'essorai, passai le vêtement et en fermai maladroitement les boutons, les doigts tremblant à cause d'un début de fièvre. 

_ C'est bon, dis-je.

Il me fit face et souris. J'avais l'air du pingouin dans Batman, et il avait l'air d'apprécier le spectacle. Je me renfrognai et me remis à marcher. Il me tira de nouveau : 

_ Tu vas me faire prendre le chemin le plus long, rigola-t-il.

_  Eh bien, vas-y, m'emportai-je, j'arriverais à te suivre! 

_ Mmmh, ça m'étonnerai. 

_ Miso! 

Et je continuai ma route. Il me suivait sans bruit, les mains dans les poches, sans doute amusé par ma colère. Sans prévenir, il bifurqua à droite.

_ Mais? Où tu vas?

_ Chez moi. Enfin en quelque sorte. C'est une cabane qu'on utilise pour attendre le prochain train.

"On"? Mais de qui parlait-il?

_Mais si tu préfères y aller toute seule, je t'en prie, me taquina-t-il.

Je soupira et lui emboîtai le pas. Oui, je sais, on ne suit pas des inconnus dans la forêt, mais entre mourir et risquer mourir, la question ne se posait pas.

"Donc je vous présente le chapitre 2! Je sais, l'intrigue met du temps à commencer, mais j'avais hâte de savoir ce que vous en pensiez ;) ! Bisous, et merci pour vos commentaires, ça m'a fait très plaisir après une journée pourrie! "

ps : pardon pour les fautes, je ne suis pas habituée à mon clavier :P

RéciproqueOù les histoires vivent. Découvrez maintenant