Chapitre 4

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— Hey oh ? Y'a quelqu'un ?

Assis sur l'un des murets de la cour de récréation, Nathan tente désespérément de me faire revenir dans la réalité.

— Quoi ? demandé-je après avoir repris mes esprits.

— C'est à toi. Je viens de noter le blond là-bas : 7/10.

Noter les garçons de l'école est notre petit moment de détente, à Nathan et moi. Au début, ça me faisait bizarre de parler garçons avec lui mais je m'y suis vite faite. Tout comme j'ai dû me faire à son esprit tordu... !

Nathan est du genre à ne jamais montrer sa vraie personnalité. Il se cache derrière un masque et il n'a rien trouvé de mieux que de passer pour un sado-maso. C'est pourquoi les gens le perçoivent comme quelqu'un de bizarre et que personne ne s'en approche. Mais ce qu'ils ne savent pas, c'est que sous ce masque pervers se cache en fait un garçon super gentil et romantique.

— Y'a quelque chose qui ne va pas ? s'inquiète Nathan. Lucas et sa bande t'ont encore maltraitée ?

— Non, y'a rien, réponds-je.

— Mais t'es complètement ailleurs depuis ce matin donc il a dû se passer quelque chose !

Oui, oui, il s'est passé quelque chose. En rentrant chez moi hier, je me suis repassé cette rencontre inattendue en boucle dans ma tête. J'étais prête à regretter de ne pas lui avoir dit comment je m'appelle. Mais qu'importe, Timmy a dû m'avoir oubliée à la seconde où je suis sortie de son champ de vision.

Le temps d'une soirée, j'ai quand même réussi à croire que le monde n'est peut-être pas aussi mauvais que je le pense, à espérer que ma vie pourrait être meilleure.

Et puis ce matin, je suis retombée dans la réalité. Rien qu'en arrivant à l'école j'ai compris que ça ne changera jamais. Tout ça à cause d'une simple phrase.

— C'est que tu me connais bien, réponds-je à Nathan.

— Je suis ton meilleur ami, me rappelle-t-il, je suis fait pour ça. Raconte-moi tout !

— Eh bien, je me suis pris la tête avec maman...

— ... Pour changer, fait-il remarquer.

— ... Donc je suis allée me calmer en jouant au basket, continué-je en ignorant sa remarque. Tu vois ? C'est le coin que j'ai trouvé par hasard en me promenant y'a quelques mois.

Nathan acquiesce de la tête.

— J'ai joué comme une merde... et puis un garçon est arrivé et il m'a proposé de faire une partie avec lui.

— Oh mais c'est sympa ça ! commente Nathan d'un air enthousiaste.

— Mouais...

— Ils ne sont pas tous comme Lucas. Et tout le monde n'est pas comme les gens de cette école de merde. Arrête de te méfier. Tu te prends trop la tête.

— Parce que tu ne te méfierais pas toi ? On m'a toujours poignardée dans le dos, on a toujours trahi ma confiance et tu voudrais que je fasse confiance à un inconnu ?

— C'est faux ce que tu dis là. Moi, je ne t'ai jamais rien fait de mal et tu me fais confiance. Et il faut apprendre à le connaître avant de déterminer si oui ou non tu peux lui faire confiance.

— C'est pas pareil. Et j'aurais trop peur qu'il finisse par me trahir.

— Qu'est-ce qui est différent alors ?

Je n'en ai aucune idée. Le fait que Nathan soit homo ? Ridicule comme argument.

— Il était comment avec toi le type d'hier ? s'ntéresse Nathan.

— Tu veux le pecho ? demandé-je pour tenter de changer la discussion.

— C'est pas de ça qu'on parle, Ambre.

Je le sais. Je profite d'un silence pour me remémorer les instants de la veille.

— Il était gentil. C'était bizarre de passer un moment avec un garçon qui ne me juge pas et qui n'avait pas l'air de me vouloir du mal.

— Eh bien c'est cool. Vous allez vous revoir ?

— Je sais pas moi, on s'est rencontré par hasard.

Mais tu oublies un petit détail ma chère, tu l'as remballé...

— Tu ne me dis pas tout, hasarde Nathan.

Il a dû voir que j'ai plissé mon nez à la suite de ma réflexion.

— Il s'est présenté. Il s'appelle Timmy. Et il m'a demandé comment je m'appelle.

— Et ?

— Et je lui ai dit qu'avoir des amis n'était pas mon fort puis je suis partie.

Nathan soupire. Je crois qu'il ne sait pas s'il doit en rire ou en pleurer.

— T'es grave quand même !

— T'aurais fait quoi à ma place ?

— Je lui aurais dit comment je m'appelle. J'aurais essayé d'être gentil avec lui histoire de me faire un ami de plus. C'est pas compliqué. C'est la vie, Ambre.

— Et si cet ami t'embobine encore pour te faire du mal, t'y as pensé à ça ? Je ne survivrais pas à une nouvelle trahison et à des moqueries supplémentaires. Tu le sais aussi bien que moi.

J'ai ressorti mon argument le plus puissant. Et je le pense vraiment. Je ne survivrais jamais à un autre abus de confiance et à de nouvelles injures. Je n'en ai plus la force.

Nathan m'aurait répliqué que qui ne tente rien n'a rien, que je n'ai qu'à essayer pour ne rien regretter, quitte à vivre un enfer de plus au pire des cas. Mais il sait que je suis à bout. La discussion est close.

TomBoy [en cours de correction]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant