Chapitre 5

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Je n'ose plus retourner à mon havre de paix depuis cette rencontre. J'ai bien trop peur de revoir Timmy, qu'il se moque de moi parce que je l'ai remballé. Je ne veux pas m'attacher à lui à force de le rencontrer par hasard.

A la sortie de l'école, une main m'agrippe l'épaule et m'entraîne dans la rue derrière l'école. Ce sont les potes de Lucas. Ce dernier n'assiste jamais à ces maltraitances. Est-il seulement au courant ? En est-il le cerveau ? Allez savoir.

— On aimerait vérifier que t'es bien une fille, dit Estéban en me plaquant au mur.

— Vous n'avez pas déjà assez vérifié comme ça ? répliqué-je.

C'est vrai, ce n'est pas la première fois qu'ils le font. Je fais genre que ça ne m'atteint pas dans le but, l'espoir, qu'ils s'en lassent mais à première vue c'est toujours aussi tordant de me tripoter.

— On veut s'assurer que tu ne t'es toujours pas fait opérer depuis la dernière fois, répond Xavier en mettant ses mains sous mon t-shirt.

J'ai souvent envie de leur répliquer que s'ils me tripotent toujours, c'est parce qu'ils sont incapables de sortir avec des filles mais j'ai bien trop peur que ce genre de tripotage prenne une autre tournure. Ils se sont toujours contentés de me tripoter les seins et ça me soulage qu'ils n'aillent pas voir ailleurs.

Quand ils en ont fini avec moi, Estéban me murmure à l'oreille :

— Tu peux y aller. Mais t'inquiète pas, on vérifiera encore. C'est notre dernière année ensemble après tout. Après on ne saura plus vérifier, c'est bien dommage.

Je pars aussi vite que je le peux. Je n'aime pas pleurer, ça me donne l'impression d'être faible et je n'aime pas montrer que je me sens mal. Je ne veux pas qu'on ait pitié de moi. Mais il y a des jours où on ne peut s'en empêcher.

Je tente de me cacher dans la capuche de mon sweat. La phrase d'Estéban tourne en boucle dans ma tête. « T'inquiète pas, on vérifiera encore ».

Avant, ça ne me faisait trop rien qu'ils me tripotent la poitrine. C'était comme si elle ne faisait pas partie de mon corps. Mais aujourd'hui, je me sens tellement sale après ces attouchements !

En rentrant chez moi, je fonce sous la douche. Je ne veux plus sentir leurs mains sur mes seins. C'en devient trop pour moi.

Je me rhabille et fonce au terrain de basket. Je contemple le panier sans filet avec un regard vide. Je n'ai pas envie de jouer. Je me dis qu'une seule personne arriverait à me remonter le moral...

Je déverrouille mon smartphone et vais dans mes musiques. Je clique sur « Borders » d'Amber. Amber qui aborde également le concept de tomboy. Quel hasard, hein ?

En fait, j'avais tapé mon prénom sur YouTube, mais je m'étais dit que j'aurais plus de chance d'avoir des résultats si je l'écrivais en anglais. Je voulais tomber sur des chansons ou des artistes ayant mon prénom. J'ai découvert cette chanson qui est immédiatement devenue un coup de cœur.

Je ne peux contrôler mon corps. Dès qu'il entend de la musique, qu'elle soit rythmée ou non, il se met à bouger comme bon lui semble. Alors je danse sur « Borders ».

C'est une chanson qui parle du vécu de la chanteuse. Elle y dit des choses qui me touchent beaucoup : « Tous ces gens ici me regardant fixement / Secouant leur tête, les yeux sévèrement baissés sur moi / Qu'est-ce qui ne va pas chez moi ? La colère, la cruauté je les mérite / Et je ferais n'importe quoi pour être ce qu'ils appellent parfaite ». Le deuxième couplet parle plutôt de se relever, qu'il y a toujours une solution. Mais je n'en suis pas encore là.

J'aime le changement de voix d'Amber : le rap masculin et le chant féminin. C'est à croire que deux personnes chantent.

J'ai l'impression que je n'ai plus dansé depuis une éternité. Ça fait tellement du bien ! Tout en dansant, j'ai l'impression qu'Amber est là, à mes côtés, et qu'elle me dit que tout ira mieux. Mais je n'y crois pas.

TomBoy [en cours de correction]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant