Chapitre 1

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Je ne sais pas si ça vous est déjà arrivé de vous demander si vous êtes né dans le bon corps. De tellement vous sentir mal parce que ce corps vous est étranger. Ou de ne pas être à l'aise dans les vêtements que vous devez porter selon la société.

Personnellement, c'est ce que je vis tous les jours. Ça a commencé en primaire. Je n'étais pas à l'aise quand maman m'habillait avec des robes ou des jupes. Je me sentais nue. Alors je lui avais demandé de ne plus m'en acheter parce que je n'en mettrais plus.

La puberté est venue à moi vers mes 12 ans. Ça m'avait horrifiée de voir mes seins commencer à pousser. Au début, j'avais essayé de les aplatir en les bandant pour ne pas qu'ils se voient. Je devais espérer intérieurement que ça les arrêterait dans leur élan. Raté...

Je me sentais compressée avec ces bandages, j'avais l'impression de manquer d'air. J'ai alors trouvé refuge dans les brassières de sport : c'est confortable et ça ne met pas en avant nos « atouts ». J'ai quand même la chance d'avoir une petite poitrine. Je ne sais pas comment j'aurais réagi si je faisais du E...

J'ai aussi commencé à porter des vêtements larges pour cacher encore plus cette féminité qui ne me plait pas, qui me fait me sentir vulnérable. Et au grand désespoir de ma mère, j'ai commencé à porter des pantalons de garçon.

Maman a toujours voulu que j'aie les cheveux longs. Ça m'insupportait tellement que je les attachais constamment sinon ils allaient tout le temps dans ma figure. En été je transpirais de la nuque. C'est invivable les longs cheveux !

Alors à 15 ans je me suis décidée à aller chez le coiffeur. Je me suis fait une coupe garçonne mais ça restait encore un peu féminin. J'avais un côté un peu plus épais et long que l'autre pour pas trop énerver ma mère. Je m'étais aussi fait une mèche pour pas que mon front soit nu. Dieu que vous auriez dû voir ça, maman était prête à commettre un meurtre !

— Qu'est-ce que c'est que ça ?! m'avait-elle demandé, horrifiée, en désignant mes cheveux.

— Je suis allée chez le coiffeur, avais-je expliqué.

— Mais... et tes longs cheveux alors ?

— C'est toi qui voulais que je les garde long. Ça m'a toujours emmerdée donc j'ai été les couper. Maintenant je me sens mieux.

Plus libre, pour être exacte.

— Mais c'est tout ce qui te restait de féminin !

— Justement, c'est pour ça que je les ai coupés.

— C'est ça que tu veux alors ? Ressembler à un garçon de la tête aux pieds ? Et demain ce sera quoi ? Tu vas te faire opérer pour qu'on te mette une paire de couilles et un pénis ?!

— T'es lente à la détente, maman. Mais je n'irai pas jusque-là.

— C'est honteux quand même.

— Qu'est-ce qui est honteux ? De vouloir être bien dans sa peau ?

— Mais bon Dieu, Ambre ! Regarde-toi ! Quel garçon voudrait d'une fille qui leur ressemble ? Personne ne voudra de toi ! Et les gens vont se moquer de toi !

— Je m'en fiche. Tout ce que je veux, c'est d'être bien dans mon corps. Et puis, les garçons, je m'en fiche pas mal de ce qu'ils pensent.

— Serais-tu lesbienne ? avait demandé maman avec des yeux écarquillés.

Elle devait se dire que cette dernière nouvelle serait la cerise sur le gâteau concernant sa fille. À vrai dire, j'ai toujours été amoureuse du même garçon... mais j'ai pas envie d'en parler. Ça me blesse déjà assez comme ça. Peut-être plus tard.

— Peut-être, avais-je répondu à ma mère avec un sourire malicieux.

L'expression sur son visage m'aurait fait exploser de rire mais j'avais fait tous les efforts du monde pour garder mon sérieux.

Maman et moi sommes en désaccord depuis ma naissance et ça m'amusait de lui faire croire des choses à mon sujet. Ça ne faisait qu'accentuer sa rage mais au point où j'en étais, je m'en foutais pas mal.

Elle n'acceptait pas mon look parce que les apparences avaient toujours eu de l'importance pour elle. C'est comme si nous avions une réputation à tenir. Moi, je pars du principe que tant qu'on se sent bien dans ce qu'on porte, on s'en fiche de savoir ce que les autres pensent de nous. Chacun sa vie, point.

Maman devait croire que cette crise s'arrêterait bientôt, que je deviendrais plus féminine vers l'âge adulte. Ce n'était qu'un passage de ma crise d'adolescence.

Aujourd'hui j'ai 17 ans. Je suis en rhéto dans une école de Namur. Et j'ai toujours le même look.

TomBoy [en cours de correction]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant