Les abeilles

159 33 31
                                    

Les abeilles sont les reines du ballet de printemps, elles s'en vont, reviennent, à plein temps. Butinant de fleur en fleur, et se mélangent les odeurs ! Ah ! Des fleurs coulent leur nectar, joyau exquis, doré, figé dans le temps du printemps. Ah ! Elles s'en vont, reviennent, à plein temps.

Elles défilent, une par une. Le labeur est dur, et durent leurs sélections. Vite, elles se mettent à l'action. C'est à qui aura la meilleure rose, le plus beau bouquet ! Avez-vous essayé la jacinthe, avez-vous goûté les œillets ? Les fleurs se courbent, honorant les altesses. Servez-vous, mesdames, pardonnez notre maladresse ! Pourtant si belles sont les fleurs, si belles leurs hôtes. Les couleurs se côtoient, et valsent, côte à côte. Le jaune a rougi dans le rose verdâtre, le bleu a doré dans le violet rougeâtre. Tableau de tâches où les abeilles se multiplient. Tableau de chasse où l'harmonie tâche d'y laisser ses plis.

Les abeilles zèbrent les horizons où vie leur est aisée. Elles virevoltent, dans les airs, de leurs ailes aiguisées, pointant leurs piques, menaçant Thésée . L'abeille est la sœur de l'abeille, sur cela tout doute est infondé. Là bas, un monstre court, une abeille meurt, massacrée. La peine est grande, le deuil renforcé. Combien d'ours ce mois-ci nous ont attaqués ?

La justice appelle, dans un élan osé, les détentrices du miel, si souvent outragées. Pourquoi détruit-on leurs biens, à ces innocentes ? Leur boisson guérit les plaies, quelle créature y serait méfiante ?

L'humain est un ours qui détruit les ruches les plus stables. Les abeilles le savent, pauvres damnées ! Voilà qu'on les vole ! Elles prennent leur envol. L'homme fuit, mais vers où fuit-il ? La vengeance est une terre fertile de fleurs amères. Amères dans la mer du temps. Dans le temps du printemps.

Les abeilles le savent, elles détestent se venger. Mais la justice les appelle, leur travail est ravagé. Elles n'ont plus de maison, nulle part où aller. Mais le pire, c'est que leurs sœurs tombent, que personne ne leur creuse de tombe. Dans le temps du printemps.

Le sacrifice souffle au loin dans le vent qui fait bourdonner les abeilles. La jumelle se sacrifie pour sa jumelle. L'aile qui périt sauve une autre aile. Belles ! Belles ! Les abeilles. Dans le temps du printemps.

La gentille petite fille s'assoit dans le gazon. L'abeille s'approche. Pas un son. La petite fille, immobile, se fait piquer. Une autre abeille atterrit à ses pieds. Les larmes de l'enfant ne cessent de couler. Que coule le miel des abeilles, encore et encore ! Dans le temps du printemps.

Seulement, les innocents paient pour les crimes des ours. Que le miel coule à flot dans les sources ! Et les abeilles restent les reines du ballet du printemps, elles s'en vont, reviennent, à plein temps.

Petite  grande NatureOù les histoires vivent. Découvrez maintenant