Les chameaux

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Les dunes tourbillonnent, le sable brûle. Le désert est un mirage, le désert est une bulle. 

Dans ce lac oranger, nagent les grains. Les traces se perdent, se perdent les uns. Les chameaux filent au fil de la vie, formant une file, ils s'élancent, se balancent et défilent. Leur danse est rythmée, la cadence est de mise. Leur grâce est semblable à une douce promise. Marchants pas à pas, ils transportent leurs bosses.  Leur dos est une montagne, la nuit est une noce.

Les étoiles brillent dans la lumière de la nuit. Bleutée comme un saphir, étincelante comme la vie. Mais la pierre est glaciale, tout autant que la nuit. 

La patience est une science, que les chameaux maîtrisent. Le froid pour eux n'est qu'une caresse, une brise. Leurs courbes dessinent des vagues discrètes et rondes. Leur charisme raisonne comme l'écho et ses ondes. Il parfume l'Orient de son odeur lactée, le musc se sent et flotte le thé. 

 Leurs yeux doux observent, au delà des dunes, un horizon voilé, teinté de bonne fortune. Leur regard reste fixe et le soleil se lève. Brûle le phœnix, comme brûlent les rêves. 

 Leurs traces les suivent,  comme une ombre derrière. Il rêvent d'un endroit, où le sol serait vert. Personne ne les arrête, infatigables. Mais le désert est un piège en mouvement immuable.

Les chameaux percent, tout comme le croyant, le mensonge qui court, qu'apporte le vent. Leur cœur les guide, à travers cet océan. Leur pelage est ocre, il répond au néant. 

Bientôt ils arrivent, et les accueillent les palmiers. Ils poursuivent leur cadence, du premier au dernier.  La fraîcheur dans ce feu est un coin de paradis... Leurs efforts sont récompensés par ce bel oasis. Un à un, il s'y dirigent, et l'eau les appelle :  je suis claire et limpide, aussi savoureuse que belle. Que quiconque veuille me boire, qu'il le fasse sans appel ! Voilà donc leur trésor, rare et charmant. Quelle est confortable, cette verdure, qui depuis l'aube les attend ! 

Il s'y prélassent longuement, avant de faire le plein. Aujourd'hui, ils prennent la route pour demain. Leurs longues pattes vont, toujours fines et fortes, à travers le désert, seuls, sans escorte. 

Qui donc les a cru ? Le fennec ? Le caracal ? Ils détournèrent le regard, et n'y virent que du mal.  Tout comme les fainéants ont tord, les aveugles disent qu'ils voient. Tout comme la vipère mord, les orgueilleux se croient rois. Comme les mirages sont trompeurs ! A foi qui a foi !

Les chameaux filent au fil de la vie, formant une file, ils s'élancent, se balancent et défilent. Avec noblesse, le sable est foulé. Dans l'immensité dorée, s'avancent les majestés . Leurs bosses sont lourdes mais la charge n'est rien. Pour les princes du désert, l'épreuve est un bien. Toute la nature est en soit une miséricorde. Les chameaux connaissent l'harmonie, et non la discorde. 

 Le désert les aime, les enlace de respect. L'espoir les berce, les encercle la paix. 

Les dunes tourbillonnent, le sable brûle. Le désert est un mirage, le désert est une bulle. Le mirage est tel la bulle fragile, une fois qu'elle disparaît  : on espère l'avoir mais on ne l'a jamais. 

Les chameaux le savent, et ne le suivent jamais. 











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