Jour n°2357
Cible : Silvestre, Felis silvestris catus, dieu parmi les chats.
Nombre de vies restantes : 8/9
Chien.
Ce mot me glace le sang. Cette vision d'effroi me paralyse.
Pourquoi a-t-il fallut que je tombe face-à-face avec ce chien en particulier.
Le caniche d'en face m'aurait suffit. Il aboie plus qu'il ne mord et c'est lui qui est terrorisé par les chats. Ou pourquoi pas le labrador du coin de la rue ? Idiot comme il est, il ne ferait pas de mal à une mouche.
Il y avait tant de choix, alors pourquoi le boxer ? Pourquoi lui, surnommé Katzerminator par l'ensemble du quartier. La liste de ses victimes est connue de tous et s'allonge de jour en jour. Le siamois de la famille Lambert, le calico de la p'tite rousse et même celui de la mère Michelle !
Un grognement me tire hors de mes pensées. Katzerminator montre les crocs et je les vois déjà plantés dans ma gorge, mon pelage blanc maculé de sang.
Puis il bondit.
Je remercie la déesse des chats de m'avoir donné d'excellents réflexes, car je bondis à mon tour, traversant le jardin à toute allure. Cela énerve bien évitement le canidé qui se lance à ma poursuite. Mais je suis plus rapide.
Et plus agile.
Devant moi se dresse ma sortie de secours. Certes, le portail est fermé, mais c'est ce qui va en grande partie me sauver la vie. Parce que moi je peux bondir par dessus. Et le chien restera coincé. Avec grâce, je franchis l'obstacle et retombe sur le haut de la murette, mais je ne m'arrête pas là et je bondis de l'autre côté.
Mes coussinets délicats entre en contact avec le goudron, mais je sais que je suis sauvé. Derrière moi, j'entends Katzerminator aboyer de toutes ses forces.
D'un simple mouvement de tête, je jette un regard dédaigneux à l'intention de monsieur le chien qui bave. Cela a le don de le mettre plus en rogne qu'il ne l'est déjà et il aboie de plus belle, m'offrant une ribambelle d'obscénités.
Qu'est-ce que c'est vulgaire un canidé...
Fier, je bombe le torse, je lève la tête et je travers la route avec élégance, défilant tel un mannequin sur macadam. Le truffe haute, le regard vif, qu'est-ce que je suis beau !
La perfection incarnée. La beauté féline à l'état brute. L'intelligence dans toute sa splendeur. La grâce divine. La roue de vélo en plein tronche.
Pardon ?
Perdu dans l'adoration de ma propre personne, j'entends à peine la sonnette de la bicyclette qui fonce vers moi. Je reconnais les yeux globuleux d'Arthur, cramponné à son guidon. Le crissement des pneus sur le goudron m'avertit lui aussi de l'impact imminent.
Mais mon cerveau est incapable de réagir et mes pattes restent solidement ancrées dans la route.
Puis c'est le choc. La douleur. La mort.
Je sens mon corps partir en arrière et heurter le sol.
Tout se déroule au ralenti autour de mon auguste personne.
Le cycliste termine sa course dans les rosiers de Mme Michelle. La porte de ma maison s'ouvre en grand et la douce voix de mon humaine hurle tragiquement mon nom.
« SILVESTRE !!! »
C'est la dernière chose que j'entends.
Je ne vois pas ma vie défiler.
Et tout devient noir.
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Félin pour l'autre [en pause]
Humor" Jour n°2348. Mon humaine a encore ramené un autre être de son espèce inférieure à la maison. Avec l'air de merlan frit avec lequel elle l'observe, je sens que le mâle lui fait de l'effet. Je ne peux tolérer qu'il s'approprie mon humaine. Je...