Christian bis

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Jour n°2358

Cible : Christian Dufour, mâle de type vétérinaire, démon supérieur de l'Enfer des félidés, bras droit de Chatan en personne.

Tentative(s) : 18

Les lumières s'éteignent. Je suis plongé dans le noir. 

Heureusement que je suis nyctalope.

Mes voisins de cellules sont un chat errant et un bichon frisé. Ils ne sont pas très bavards et je les comprends tout à fait. Avoir été abandonné ici par son humain, c'est la pire chose qui puisse arriver à un chat. Les chiens ne comptent pas, ils sont trop inférieurs pour comprendre.

Mes yeux brillent dans le noir. En boule dans le fond de ma cage, je ne dormirais pas de la nuit.

Les secondes, les minutes et finalement les heures s'écoulent avec lenteur. Je ne quitte pas la porte des yeux, attendant avec espoir de voir l'arrivée mon humaine. 

Enfin, la douce lumière salvatrice se glisse dans la petite fenêtre et les rayons de l'astre divin viennent m'éclairer tel le messie.

Quelle classe, laisse très certainement échapper mon voisin de cellule, ébloui par ma personne.

Je viens de trouver mon nouveau dieu, ajoute sans aucun doute le bichon frisé.

Mais dans ma cage, malgré la lumière divine sur moi, je ne dois pas être beau à voir. J'ai faim, j'ai froid, j'ai peur.

Les rayons du soleil me réchauffent peu à peu et l'espoir revient. Il faut encore attendre pour que les premiers démons viennent enfiler leurs blouses et attendre encore plus pour que mon humaine daigne venir me chercher.

Dans le petit couloir, j'entends des bruits de pas. La porte s'ouvre brusquement et mes compagnons de cellule se redressent avec espoir, pensant que le Diable vient les sortir de là. Mais c'est moi qu'il choisit.

« Tu n'as rien mangé Silvestre, note-t-il. Ne t'inquiètes pas, ta maîtresse est venue te chercher. »

Il ponctue sa phrase d'un sourire malhonnête et ouvre la grille pour me récupérer. Vicieux comme il est, il m'empêche de me faufiler hors de la cage et la façon dont il m'attrape ne me permet pas lui lacérer le visage. Mais c'est me sous-estimer, car je suis passé maître dans le domaine de la fourberie depuis longtemps.

J'attends qu'il me sorte de la cage et je le fixe de mes grands yeux bleus... Avant de lui mordre le nez. Comme ça, pour le plaisir. Il pousse un cri mêlant douleur et surprise et me laisse tomber. J'atterris sur mes pattes et je file hors de la prison.

« Reviens ici !, crie-t-il à mon attention avant de s'adresser à ses collègues. Attrapez ce chat, bon sang ! Il s'enfuit ! »

Cherchant la sortie, je me perds et j'entre dans l'horrible salle d'auscultation aux murs verts. Je m'apprête à faire depuis tour lorsque deux mains connues m'attrapent et qu'un bisou remplis d'amour s'écrase sur mon museau. Je secoues vivement la tête pour voir le visage de mon agresseur.

Mon humaine. Enfin.

Elle porte sa petite robe blanche adorée que je me ferais un plaisir d'utiliser comme griffoir, pour me venger de m'avoir abandonner ici.

Tu aurais pu venir plus tôt, sale humaine ! Tu ne sais pas ce que j'ai enduré ici par ta faute !!

Le visage de mon humaine s'illumine de joie en entendant mon miaulement.

« Silvestrounet !! Qu'est-ce que tu manqué ! »

Alors soit elle est complètement idiote et elle n'a pas compris que j'étais en colère, soit c'est une excellente actrice.

Enfin, je ne m'attarde pas là-dessus vu qu'elle me couvre de câlins.

Je remarque également que le paternel est là. Unique mâle que je tolère à proximité de mon humaine. Tout simplement parce que mon pouvoir allergisant le tient naturellement à distance. Il doit être uniquement ici pour signer la caution et me libérer de prison. 

Gentil papounet. Pour le remercier,  je ne dormirais plus dans son lit pendant un ou deux jours.

Le Diable en blouse blanche entre dans la pièce, le nez rougi par une marque de morsure encore fraîche et parfumé de désinfectant. Mais il garde son éternel sourire démoniaque et adresse même un clin d'œil à mon humaine.

« Je crois qu'il était pressé de vous retrouver, mademoiselle.

- Oui, il m'a manqué à moi aussi ! » 

L'éternuement du paternel ponctue la phrase de mon humaine. Il se mouche avec une discrétion inégalée et propose de remplir les papiers. J'acquiesce d'un miaulement.

Le Démon fait donc payer une somme astronomique à mes humains. Néanmoins je suis déçu, un chat de mon rang vaut bien plus que cela.

Les mâles se serrent la main et le Diable adresse un sourire charmeur à mon humaine. Par réflexe, je sors les griffes, mais le paternel est plus rapide que moi.

Il prends sa fille par les épaules et l'entraîne loin du vétérinaire, marmonnant que ce n'est pas un homme pour elle. Dans les bras de mon humaine, j'affiche un air surpris.

Je viens de me trouver un allié de taille et il se trouve que je l'avais sous le museau depuis le début. Comment ai-je fait pour ne pas le voir plus tôt !? Les ennemis de mes ennemis sont mes amis, c'est bien connu. Je sens qu'on va faire une bonne équipe tous les deux...

Le paternel éternue à nouveau et laisse échapper un juron, insultant mon pouvoir allergisant.

Quoi que, ce n'est pas gagné.

Félin pour l'autre [en pause]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant